Tudchentil

Les sources sur les gentilshommes bretons

L'histoire de Keroulas

Du Moyen Âge à nos jours

Par la famille de Keroulas.

Depuis le Moyen-Âge, le berceau de la famille de Keroulas se trouve au manoir de Keroulas à Brélès, en Pays de Léon. Plus de 6 siècles et près de 20 générations plus tard, cette belle demeure du XVIIe siècle est toujours la résidence de descendants de la famille.

Le manoir de Keroulas conserve de précieuses archives dont les plus anciennes datent de la fin des années 1300. Elles ont permis de remonter aux périodes les plus reculées de l’histoire familiale.

Le nom de famille de Keroulas s’est éteint en Pays de Léon au XVIIIe siècle. Les Keroulas d’aujourd’hui descendent de Ronan Mathurin de Keroulas (1730-1810) qui s’installe vers 1764 au manoir de Tal ar Roz au Juch près de Douarnenez. Sa nombreuse postérité estimée à plus de 5.000 personnes a surtout essaimé au Juch et dans les communes environnantes.

Ce beau livre illustré, travail collectif de plusieurs enfants de la famille, vous invite à plonger dans la destinée des Keroulas, à suivre son évolution au fil des siècles et à découvrir de nombreux épisodes parfois très surprenants.

Le livre est en vente chez l’éditeur aux éditions Récits au prix de 35 €.

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Voute et sablière de l'église Saint-Melaine de Morlaix, XV et XVIe siècles.
Photo A. de la Pinsonnais (2009).

Le dossier hagio-historiographique des Rohan (1479) : de Conan à Arthur et de saint Mériadec à saint Judicaël

Jeudi 18 juin 2009, par André-Yves Bourgès.

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André-Yves Bourgès, Le dossier hagio-historiographique des Rohan (1479) : de Conan à Arthur et de saint Mériadec à saint Judicaël, 2009, en ligne sur Tudchentil.org, consulté le 19 mars 2024,
www.tudchentil.org/spip.php?article650.

On prête à Mgr de Quélen, alors archevêque de Paris (1821-1839), la sortie suivante dont l’humour (involontaire) a assuré la fortune : « Non seulement Jésus-Christ était fils de Dieu, mais encore il était d’excellente famille du côté de sa mère ».

De même pourrait-on dire des Rohan qu’ils revendiquaient à la fin du XVe siècle, non seulement d’être les agnats de Conan Mériadec, mais encore de descendre du roi Arthur par leur ascendance maternelle de Léon.

Ces deux revendications sont explicitement exprimées dans le fameux mémoire que Jean II vicomte de Rohan a produit en 1479 au soutien de ses prétentions de préséance aux Etats de Bretagne contre le comte de Laval. La première fait référence à « l’office et légendaire dudit glorieux S. Meriadec avec celui de S. Goury », conservé « entre autres lieux en l’église cathédralle de Vennes », ainsi qu’aux traditions locales. La vita de saint Mériadec qui, dans son état actuel, ne remonte pas, nous semble-t-il, au-delà des années 1430-1440 et fait partie, avec les vitae de saint Gobrien et de saint Gonéri, d’un dossier « horizontal » dont la proximité textuelle et thématique a été depuis longtemps remarquée, signale en effet la filiation entre Conan Mériadec et le saint ; en outre, elle présente ce dernier comme le parent du vicomte de Rohan, dont Mériadec sollicite et obtient l’octroi de 3 foires franches à Noyal-Pontivy. Cet épisode occupe une place disproportionnée dans la vita, ce qui est peut-être l’indication que le texte dont nous disposons a fait l’objet de coupures au moment de son introduction dans les livres liturgiques tardifs qui nous l’ont transmis. Sont ainsi absents de la vita, sans qu’on puisse affirmer formellement qu’ils faisaient partie de l’ouvrage original, deux épisodes figurés dans les fresques du XVe siècle de l’église de Stival, qui retracent en 12 tableaux la vie de Mériadec : l’un de ces tableaux nous montre le saint en oraison devant deux stèles christianisées ; un autre nous fait assister à l’imposition par Mériadec de sa cloche à main sur la tête d’un personnage agenouillé. Dans les deux cas de figure nous avons incontestablement affaire à la représentation de gestes et pratiques d’une religion « populaire » qui peut-être déjà n’avaient pas trouvé leur place dans le texte original de la vita ou que l’abréviateur de cette dernière a omis, sinon délibérément occultés ; mais il est d’autres éléments que le texte dont nous disposons ne nous a pas transmis et qui se lisent dans le mémoire de 1479 :

  • Le roi Conan avait trois fils dont l’aîné fut saint Mériadec, le second le successeur de son père à la principauté de Bretagne et le troisième le vicomte de Rohan ; ainsi la filiation entre le vicomte de Rohan et Conan Mériadec est-elle définitivement explicitée et clarifiée.
  • Les armes de Bretagne, que portaient originellement les trois fils de Conan Mériadec, furent changées miraculeusement pour celles de gueules à macles d’or « sur le corps et fiertre de mondit seigneur S. Mériadec » : c’est donc pour obéir à cette injonction miraculeuse que les Rohan avaient adopté leurs armes actuelles.
  • Les macles se trouvent figurées dans les pierres et arbres aux alentours du lieu et manoir de Perret, où saint Mériadec « fit sa résidance et mena vie contemplative et solitaire pour la pluspart de ses jours » : à l’instar des éclogites de Plounévez-Lochrist qui, comme l’a montré L. Chauris, jouent un rôle dans un épisode de la vita de saint Hervé, l’hagiographie populaire s’appuie ici sur la géologie pour conforter la tradition relative à saint Mériadec, dont elle situe la principale résidence au manoir de Perret, dans la demeure même des Rohan (il s’agit en effet du manoir des Salles, aujourd’hui en ruines, qui avait lui-même succédé sur place à une villa gallo-romaine).

La seconde revendication concerne l’ascendance arthurienne des vicomtes de Rohan, ascendance dont le mémoire de 1479 fait remonter l’origine aux seigneurs de Léon, dont les Rohan avaient hérité les biens par le mariage de Jean Ier de Rohan avec Jeanne de Léon :

« Duquel Roy Artus sont issus les prédécesseurs dudit vicomte [de Rohan], seigneurs d’icelle seigneurie de Léon, par droicte ligne, ainsy qu’il est tout notoire au païs et en la partie ».

D’ailleurs, ajoute l’auteur du mémoire, il est également prouvé par « auctorité et voix publique du païs, que mesmes par les livres contenans par histoires la vie et gouvernement dudit Roy… », Arthur faisait sa résidence au château situé près de la forêt de Goelforest (c’est-à-dire la Forêt-Landerneau) et « tenoit les chevaliers de la Table Ronde à faire jouxtes, armes et prouesses en certains lieux prez ledit chasteau, comme il appert tout évidemment audit lieu ». Cette description renvoie évidemment à celle que donne son adversaire le comte de Laval dans un mémoire de 1467 où un passage évoque la décoration et les merveilles de la forêt de Brecilien, dont il était le possesseur :

« Item auprès du dit breil, y a ung aultre breil nommé le breil de Bellenton, et auprès d’icelui, il y a une fontayne nommée la fontayne de Bellenton, amprès de laquelle fontayne le bon chevalier Ponthus fist ses armes, ainsi que on peult le voir par le livre qui de ce fut composé ».

Considérant sans doute que les personnages de Conan Mériadec et du roi Arthur ne pouvaient pas fonder à eux seuls la prétention à recueillir éventuellement la couronne ducale, problématique qui sous-tend toute l’argumentation destinée à se voir reconnaître la préséance aux Etats de Bretagne ; et aussi souhaitant combattre le comte de Laval sur son terrain « brocéliandais », où le vicomte de Rohan se trouvait en limite territoriale avec son adversaire, héritier des anciens seigneurs de Gaël et de Montfort, l’auteur du mémoire de 1479 a sollicité le légendier de l’abbaye de Saint-Méen. Si l’on consulte « la legendacie (sic : probable cacographie pour le légendaire) du glorieux sainct Monsieur S. Meen que fonda le Roy saint Giguel près Gael », affirme l’auteur du mémoire, « on trouvera que la seigneurie de Gael n’estoit qu’une Chevalerie », ce qui naturellement ne se peut comparer avec la puissance initiale des Rohan ; mais, c’est l’archéologie qui vient apporter un argument décisif aux prétentions des Rohan : « on peut voir en une grande vitre de l’église de Monsieur saint Méen de Gael, fondée par le benoist Roy de Bretagne Monsieur saint Giguel », ce que l’auteur du mémoire dit être « la plus ancienne fondation d’abbaie et vitre de ce duché », la preuve que les ancêtres du vicomte de Rohan ont porté dans leurs armoiries aux macles « un canton des armes de Bretagne, au haut du côté dextre de l’escu » et qu’il s’agit là de la marque de leur parenté avec la lignée ducale. Saint Judicaël, personnage historique, incontestable roi de Bretagne aux temps mérovingiens, dont la représentation figurait dans les vitraux de la fin du XVe siècle de l’église Notre-Dame-du-Roncier à Josselin, aurait ainsi consacré l’ascendance royale des Rohan lors de la fondation de l’abbaye de Saint-Méen.

Inutile de rappeler qu’en 1479, la fragile continuité dynastique des ducs de Bretagne était représentée par deux enfançonnes, Anne, née en 1477, et Isabeau, née en 1478, dont le vicomte de Rohan s’efforcera en vain d’obtenir le mariage avec ses fils, François et Jean.