Alain VI, vicomte de Rohan, ou l’origine de la fortune des Rohan
Dimanche 14 septembre 2008, par
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Bulletin et mémoires de la Société Polymatique du Morbihan, t. CXXXIV, 2008, p. 79-122.Citer cet article
Frédéric Morvan, Alain VI, vicomte de Rohan, ou l’origine de la fortune des Rohan, 2008, en ligne sur Tudchentil.org, consulté le 11 octobre 2024,www.tudchentil.org/spip.php?article546.
Cet article est la propriété exclusive de son auteur.
Lorsque j’ai travaillé sur ma thèse dont le sujet est « les hommes d’armes du duché de Bretagne de 1213 à 1381 » [1], je me suis très vite vu confronté à l’omniprésence de la maison de Rohan. L’abondance de la documentation en est bien sûr la cause. Les Rohan furent et sont encore non seulement la plus illustre famille de Bretagne, mais aussi une des plus importantes d’Europe. Au XVIIIe siècle, la puissance de ce lignage était telle qu’elle disposait d’historiens dévoués comme dom Hyacinthe Morice [2]. Ce bénédictin consacra une grande partie de son travail à transcrire les actes des Rohan et évita la disparition complète des informations contenues dans le Chartier de Rohan conservé au château de Blain. Les sources archivistiques concernant les Rohan restent tout de même très abondantes. Elles sont aujourd’hui conservées à Vannes, aux Archives départementales du Morbihan, à Paris, à la Bibliothèque Nationale de France et aux Archives Nationales de France, et surtout à Nantes, à la Bibliothèque municipale, dans le fonds Bizeul.
Souvent lors de mes recherches, un nom revenait pour le XIIIe siècle : Alain VI, vicomte de Rohan. Ce personnage est presque un inconnu et pourtant il eut un rôle majeur dans l’essor de la maison de Rohan. Seul Hervé du Halgouët, dans son ouvrage sur les vicomtes de Rohan, évoque son importance dans la constitution de la fortune des Rohan [3]. Alain VI fut en effet celui qui constitua un patrimoine territorial si important qu’il permit à sa famille de commencer une ascension sociale irréversible puisque son petit-fils épousa tout de même la fille d’un roi (celui de Navarre), descendante directe de Philippe le Bel, roi de France. Ce vicomte de Rohan fut aussi un homme de son temps, grand seigneur, c’est-à-dire grand propriétaire foncier et un chef de guerre. Même s’il n’eut pas à prendre les armes en ces temps de relative paix pour la Bretagne et pour le royaume de France, il participa pleinement à l’essor économique, et grâce à une politique rigoureuse et quelque peu opportuniste, il permit à sa maison non seulement de s’enrichir, d’accroître et d’étoffer son patrimoine foncier, mais aussi d’opérer les transformations nécessaires qu’exigeait la nouvelle situation politique.
En effet, les Capétiens étaient devenus au début du XIIIe siècle, en écrasant l’empire Plantagenêt ou Angevin, les plus puissants souverains de la Chrétienté. L’aristocratie militaire de l’Europe occidentale avait du choisir, en 1205, entre l’influence anglaise et l’influence française. Rares furent ceux qui eurent le droit de conserver des biens de part et d’autre de la Manche. Le roi de France, Philippe Auguste, voulait être certain de la fidélité de ses hommes, de ses nombreux nouveaux vassaux. Le temps des trahisons, des revirements et de l’opportunisme, était révolu. Cette politique fut aussi reprise, à son compte, par le protégé du roi de France, Pierre de Dreux, dit Mauclerc, prince capétien (puisque arrière-petit-fils du roi Louis VI le Gros), duc de Bretagne par la volonté royale et de par son mariage avec Alix de Thouars, duchesse de Bretagne. Pierre et son fils et héritier, Jean Ier renforcèrent le pouvoir ducal en s’appuyant sur la terre, la pierre, l’argent et les hommes. Ils rétablirent l’intégrité du Domaine ducal, bien écorné par les usurpations de grands seigneurs bretons lors des différentes minorités des souverains bretons du siècle précédent. Ils firent construire ou restaurer de très nombreuses places fortes (dont Suscinio dans la presqu’île de Rhuys). Ils constituèrent une réserve fiduciaire, sans doute une des plus importantes du royaume, leurs permettant de s’assurer nombre de fidélités. Les membres de leur entourage étaient liés à eux bien sûr par l’argent, mais aussi par des liens vassaliques, par des liens d’amitié, par des relations de parenté. Souvent les ducs de Bretagne de la maison de Dreux recrutaient dans les couches inférieures de l’aristocratie militaire car ils ne reçurent qu’un soutien limité des grandes familles seigneuriales de leur duché, d’autant plus qu’ils pouvaient être considérés comme des usurpateurs. En effet, Aliénor Plantagenêt, sœur aînée d’Alix de Thouars, était toujours en vie en 1241, alors en résidence surveillée en Angleterre [4]. Elle pouvait être reconnue non seulement en tant qu’héritière de l’empire angevin (lui venant de son père Geoffroy Plantagenêt), mais aussi en tant que duchesse de Bretagne (lui venant de sa mère Constance de Bretagne).
Toutefois, une seule grande famille bretonne montra une fidélité constante envers la nouvelle dynastie ducale : ce furent les Rohan. Il faut avouer qu’ils, et surtout Alain VI, surent en profiter pour se constituer un des plus beaux patrimoines fonciers de Bretagne. C’est seulement en se référant à une documentation forte de plus de deux cents actes, documents essentiellement d’origine juridique et financière, qu’il sera possible de comprendre comment Alain VI a recueilli un héritage familial dont la constitution était encore très marquée par le comportement de l’aristocratie angevine ; comment il en a fait un ensemble homogène situé au coeur de la Bretagne ; comment enfin il est parvenu à devenir un des plus puissants et des plus riches seigneurs du duché.
I- Un riche héritier
Alain VI est tout d’abord un très riche héritier. Cet héritage provient non seulement de son père, mais aussi de sa mère [5].
De son père, il obtint non seulement la vicomté de Rohan, mais aussi une grande influence auprès des ducs de Bretagne de la maison de Dreux. L’analyse de cet héritage permet de revenir sur les prédécesseurs d’Alain VI. L’historien Hervé du Halgouët nous dit que le premier vicomte de Rohan, Alain Ier, obtint vers 1120 de son frère, Geoffroy, vicomte de Porhoët (que nous savons, héritier des vicomtes de Rennes grâce aux travaux d’Hubert Guillotel [6]), toute la partie du Porhoët située à l’ouest de la rivière Oust. Sa part était très étendue mais de moindre valeur. Alain Ier construisit sa motte féodale tout d’abord à Castennec, à l’intersection de deux grandes voies d’accès intérieure, le Blavet et la voie romaine allant de Rennes à Carhaix. Puis, il changea d’avis et s’installa à Rohan sur l’Oust. Selon le vicomte du Halgouët, « à l’origine, la vicomté occupe l’angle Nord-Ouest de l’évêché de Vannes. L’Oust (de Lantillac à Hémonstoir, le Blavet et le ruisseau du Doré, aujourd’hui canalisé), forme les limites orientales et septentrionale ; à l’Ouest la Vicomté s’appuie sur l’Ellé, de sa naissance à la Roche-Periou ; au sud sur le cours Stanghingany, l’étang actuel de Pontcallec, le cours inférieur du Sarre qui se jette dans le Blavet près de Saint-Rivalain. Là se produit une brusque descente jusqu’à l’Evel. Puis deux lignes brisées à angle droit, (allant de l’Evel à Saint-Jean-Brévelay (inscrivant Camors), et Saint-Jean-Brévelay à Pleugriffet) ferment le Sud-Est » [7].
Ce fut incontestablement grâce au mariage d’Alain III de Rohan avec Constance de Rennes-Richmond que les vicomtes de Rohan accédèrent à un rang prépondérant dans l’aristocratie non seulement bretonne mais aussi angevine. Il est possible de penser que cette alliance prestigieuse eut pour origine Eudes II, vicomte de Porhoët, du même lignage qu’Alain III. Eudes II, à partir de 1148, était le baillistre (c’est-à-dire le régent) du duché de Bretagne, portant même le titre de comte de Bretagne, seul titre reconnu par les administrations française et anglaise jusqu’en 1296. Cette importance lui venait de son mariage avec la mère de la duchesse de Bretagne, Berthe de Cornouaille, alors veuve d’Alain de Rennes, seigneur de Richmond. Ce dernier était le détenteur d’un des cinq fiefs les plus importants d’Angleterre, fief donné à ses ancêtres par leur cousin, Guillaume le Conquérant, pour leur aide lors de la bataille d’Hastings en 1066. La nouvelle épouse d’Alain III de Rohan, Constance de Rennes, ou de Richmond ou encore de Bretagne, reçut en héritage ou en dot des biens considérables, nous ne savons pas ni quand, ni par qui, en Bretagne et en Angleterre. Les fiefs cornouaillais de Corlay et de Mur furent détachés du Domaine ducal pour lui être donnés. Elle obtint de l’héritage paternel les fiefs de Swavesey et de Fulbourn dans le Cambridgeshire, fiefs relevant de l’honneur de Richmond, alors entre les mains de son frère, le duc Conan IV. Grâce à l’internet [8], nous savons que ces deux fiefs couvraient une grande partie du comté de Cambridge. Une partie de la future cité de Cambridge en faisait partie.
Par cette alliance, les vicomtes de Rohan entraient à la fois dans la famille ducale et dans la plus haute aristocratie angevine possessionnée des deux côtés de la Manche. Il est possible que les dons faits par Alain III et Constance lors de la fondation de l’abbaye de Bon Repos (la nécropole des Rohan), consistant en des droits sur les églises de leurs fiefs anglais [9], aient pour but de les préserver des confiscations royales car la seconde moitié du XIIe siècle fut marquée par des conflits violents entre la noblesse bretonne et les monarques Plantagenêt. Ce mariage ducal permit encore aux enfants d’Alain III et de Constance de faire de superbes alliances. Alain IV épousa Mabille de Fougères, membre d’un puissant lignage du comté de Rennes, très bien pourvu lui aussi en terres en Angleterre et en Normandie. Constance, sa sœur, épousa Eudes de Pontchâteau, homme fort du comté nantais (elle sera la mère de la riche Constance de Pontchâteau, épouse d’Olivier de Clisson).
Ces dernières alliances révèlent par ailleurs la désaffectation des Rohan envers les Plantagenêt et leurs ralliements au roi de France, Philippe Auguste, qui fit la conquête de la Normandie et aussi de la Bretagne au tout début du XIIIe siècle et qui défit définitivement les Plantagenêt et leurs alliés aux batailles de Bouvines et de La Roche-aux-Moines en 1214. Lorsque le roi de France s’imposa et ordonna à l’aristocratie dite angevine de choisir entre lui et le roi d’Angleterre, les Rohan décidèrent de rester sur le continent où devaient se concentrer leurs fiefs les plus importants et les plus lucratifs. Cette décision leurs valut néanmoins de perdre leurs immenses biens anglais qui furent immédiatement confisqués par les rois d’Angleterre. Comme d’autres lignages bretons, normands, poitevins, ralliés récemment aux Capétiens, pendant longtemps, sans doute, ils durent caresser l’espoir de retrouver leurs fiefs perdus, d’autant que les Plantagenêt, afin de retrouver leur influence sur leurs anciennes possessions, usèrent et abusèrent de la politique des confiscations-restitutions, laissant croire à ce possible retour.
Mais revenons aux alliances matrimoniales des Rohan qui démontrent leur ralliement aux Capétiens.
- Constance de Rohan épousa donc Eudes de Pontchâteau qui reçut de Philippe Auguste en remerciement de son ralliement la terre très lucrative de Guérande détachée du Domaine ducal. En contrepartie, Eudes se chargea de contrôler le comté nantais au nom du roi de France [10].
- Marguerite et Josselin de Rohan s’allièrent au sein de deux lignages particulièrement honnis par les rois anglais. L’époux de Marguerite, Hervé de Léon, était le descendant du roi Etienne de Blois, grand rival d’Henri II Plantagenêt [11]. L’épouse de Josselin, Mathilde de Montfort-Gaël était l’héritière d’une des branches de cette famille qui obtint d’Edouard le Confesseur, roi d’Angleterre, le comté d’East-Anglia (soit les Norfolk et Suffolk actuels), comté perdu lors de sa fameuse révolte contre Guillaume le Conquérant [12].
L’analyse de l’arbre généalogique des Rohan [13] révèle aussi que les Capétiens furent particulièrement généreux envers eux. Rien de plus normal, Philippe Auguste et son protégé, Pierre de Dreux, duc de Bretagne en 1213, en les appuyant obtenaient tout de même le soutien de membres de la famille ducale. Josselin, fils cadet d’Alain III et cousin germain de la duchesse Constance, obtint en épousant Mathilde de Montfort le contrôle d’un des plus importants fiefs du comté de Rennes, c’est-à-dire la terre de Montfort-sur-Meu, avec le château du même nom et avec celui de Boutavant [14]. Son neveu, Geoffroy Ier (mort en 1221), épousa Gervaise de Vitré, dame de Dinan-Sud, de Bécherel et de Léhon, dont les importants fiefs anglais avaient été eux aussi confisqués [15]. Elle était alors veuve de Juhel III de Mayenne, le plus puissant seigneur du Nord-Ouest du royaume de France [16]. Par ce mariage hautement politique, Geoffroy, allié de Pierre de Dreux et du roi de France, contrôlait les côtes nord du comté de Rennes, c’est-à-dire là où les Anglais aimaient à débarquer. Par ailleurs, Geoffroy se présenta non seulement comme le successeur de Juhel III, le tuteur des filles de ce dernier, mais encore en tant que protecteur des pupilles de Juhel, à savoir les seigneurs de Vitré, de Fougères, de Laval et de Goëlo. Ce dernier était alors Henri de Rennes, dit aussi d’Avaugour, grand rival de Pierre de Dreux qui l’avait outre dépossédé de sa fiancée, Alix de Thouars, mais aussi de ces fiefs du Trégor et du Penthièvre.
Il est vraisemblable qu’en permettant le remariage de Gervaise de Dinan, le duc Pierre Ier ait laissé le pouvoir dans le Nord de son duché à Geoffroy Ier de Rohan, tandis qu’il se réservait le Sud de la Bretagne où se concentrait l’essentiel du Domaine ducal. Il est vrai aussi que le duc de Bretagne n’avait pas le choix car le roi de France, qui avait aussi, semble-t-il, permis cette alliance, avait mis sous sa protection directe bon nombre de seigneurs bretons du Nord de la Bretagne, possessionnés par ailleurs dans le royaume de France, en Normandie et en Anjou. La politique de Geoffroy devait être certainement plus supportable à la haute aristocratie du Nord que celle du duc. Deux documents étayent cette idée :
Le premier est l’acte de 1218 où Geoffroy, vicomte de Rohan, prêta à Eudon de La Roche-Derrien, lors de son départ pour Jérusalem, six cent livres aux conditions suivantes : Eudes devait lui donner en gage toute sa terre de Petite-Bretagne, sauf la dot de sa femme, Villana. Il confiait à son créancier la garde de son fils, de la fille d’Eudes de Quemper, son oncle, et surtout son château de La Roche. Geoffroy pourrait y placer un serviteur pour veiller à la conservation des biens et des enfants. Si Eudes décédait pendant le voyage, et que son fils décéda, il devait être remplacé par un de ses frères. Tous ses revenus, sauf ce qui sera employé par le vicomte ou son fondé de pouvoir pour l’entretien des biens d’Eudes, passeront à l’extinction de la dette ; et, si elle n’était pas payée à son retour, il devait s’acquitter d’une manière ou d’une autre avant de rentrer en possession de sa terre. S’il y avait un surplus, le vicomte devait en garder la moitié [17]. Cet accord est très important pour Geoffroy Ier car il montre que le vicomte avait la confiance de l’aristocratie du Nord de la Bretagne qui lui permettait de contrôler La Roche-Derrien, principale place-forte du Trégor, dominant aussi le Goëlo voisin, appartenant à Henri d’Avaugour, grand rival de Pierre de Dreux.
Le second acte date d’août 1221. Pierre Ier, duc de Bretagne et comte de Richmond, y garantit à Geoffroy, vicomte de Rohan, sa protection dans la guerre qu’il menait alors contre Raoul, seigneur de Fougères. Il y promettait de le défendre contre tous dans sa terre de Bretagne, de lui garder son affection en tant que fidèle vassal, et une fois la guerre terminée, de lui rembourser toutes les dettes dont il lui serait redevable [18]. Ce dernier document montre que le vicomte Geoffroy avait la confiance de Pierre de Bretagne, mais qu’il semble avoir eu quelques soucis avec les pupilles hérités de Juhel de Mayenne qui ont désiré, les armes à la main, se séparer d’une tutelle trop pesante. Très certainement, grâce au soutien ducal, Geoffroy parvint à les soumettre.
Toutefois, la présence du vicomte de Rohan dans la partie septentrionale du duché ne dura pas car Geoffroy mourut peu de temps après la ratification de cet acte, laissant le titre vicomtal à son frère, Olivier Ier qui le suivit dans la tombe en 1226 sans doute au retour de la Croisade [19]. Le vicomte fut alors Alain V, le frère puîné, qui fut au service d’un autre fidèle des Capétiens, Eudes III, vicomte de Porhoët. Ce dernier lui avait donné en effet pour ses bons et loyaux services, car il devait l’employer en tant qu’homme d’armes, non seulement des droits dans la paroisse de Mohon [20], mais aussi sa fille cadette, Aliénor. Alain V, devenu vicomte, fut l’allié inconditionnel de Pierre de Bretagne pendant la guerre civile de 1230 à 1235. En fait, il est le seul membre de la haute aristocratie bretonne à décider de soutenir le duc de Bretagne révolté contre Blanche de Castille qui refusait de partager avec le duc la régence du royaume de France. Pierre de Bretagne se tourna alors vers Henri III d’Angleterre qui lui offrit protection, hommes d’armes, argent mais surtout la restitution de l’honneur de Richmond. Dans cette trahison du duc envers son propre lignage, Alain V y trouva son compte. En 1230, Henri III, ne pouvant lui restituer ses biens anglais alors aux mains d’autres fidèles anglais lui donna 200 marcs de terres à prendre à la saint Michel sur les Marches de l’Angleterre avec le pays de Galles [21]. L’année suivante, le 12 octobre 1231, Henri III le prit sous sa sauvegarde et lui confirma ses terres en Angleterre s’il restait fidèle au comte de Bretagne ou à ses héritiers [22]. Par ailleurs, l’alliance entre le vicomte de Rohan et le duc de Bretagne fut renforcée par plusieurs actes :
- à Rennes, en juin 1231, Pierre Ier donna au vicomte de Rohan des lettres de garantie attestant que si Alain V perdrait sa terre en Angleterre, il lui donnerait des rentes en Bretagne de la même valeur. Cette promesse fut garantie par son fils, Jean, héritier du duché [23]. En même temps, le duc s’obligea encore à ne pas faire la paix avec Raoul, seigneur de Fougères, ancienne pupille de Geoffroy de Rohan et héritier d’Eudes III de Porhoët, sans le consentement du vicomte de Rohan [24].
- En août 1231, Jean, héritier du duché, prit l’engagement de défendre toujours les vicomtes de Rohan et leurs héritiers envers et contre tous et ne les traduire devant lui et les siens qu’en sa cour de justice de Ploërmel [25].
Cette alliance fut particulièrement rentable pour le vicomte de Rohan puisque les biens patrimoniaux anglais de sa famille lui furent enfin restitués. En 1232, Pierre Ier, duc de Bretagne et comte de Richmond, attesta que son fidèle, Alain, vicomte de Rohan, avait donné à l’abbaye de Bon Repos, pour le salut de son âme et de l’âme de son frère, Geoffroy, 10 livres sterling par an de rente sur ses rentes de Costessey dans le Norfolk, en Angleterre [26]. Alain V avait donc récupéré cette terre relevant de l’honneur de Richmond appartenant à Pierre de Bretagne. Toutefois, le vicomte de Rohan ne garda pas longtemps ses terres anglaises. Il savait la situation de Pierre Ier périlleuse, d’autant que l’expédition d’Henri III sur le Continent avait tourné court et que Louis IX, roi de France, disposait d’une puissance militaire invincible. Il est probable qu’il décida, peu après 1232, de se séparer de ses biens Outre-manche, que de toute façon, il ne pouvait que perdre puisque le duc Pierre était contraint de se soumettre au roi capétien et donc de renoncer à son alliance anglaise. Il les échangea contre les terres bretonnes de Roger de La Zouche [27]. Roger de La Zouche n’était pas n’importe qui. En tant que cadet du lignage de Porhoët, il avait hérité d’une partie du fief de Porhoët, certainement mise sous séquestre lorsqu’il choisit le camps de Jean sans Terre entre 1205 et 1214. Pierre Ier de Bretagne, en février 1216 lui avait concédé sa protection pour toutes ses terres bretonnes lors son expédition anglaise de 1216 [28], sans doute dans l’espoir de le voir se rallier à sa cause. Ce fut en vain car Roger resta fidèle au roi Jean et obtint alors d’importantes récompenses : le manoir d’Ashby en 1219, la fonction de sheriff de Devonshire en 1229 et surtout le droit de faire cet échange avec le vicomte de Rohan, son cousin, l’année suivante. Les terres bretonnes de Roger de La Zouche durent être suffisamment importantes pour compenser la perte de si considérables fiefs anglais. En effet, c’est à partir de cet échange que les La Zouche, devenus grands propriétaires fonciers, furent intégrés à la haute aristocratie anglaise.
Par ailleurs, grâce à cette guerre civile, le vicomte de Rohan reçut de l’argent. Dans l’enquête réalisée sur ordre du roi de France pour évaluer les dégâts perpétrés par Pierre Mauclerc, il résulta que le duc avait contraint Jean de Dol, seigneur de Combourg, avoué de l’évêque de Dol, à payer 400 livres au vicomte de Rohan pour des chevaux qu’il disait avoir reçus de lui [29]. Enfin, il est possible que ce fût à cette époque aussi que les vicomtes de Rohan reçurent du duc de Bretagne le fief de Gormené détaché du Penthièvre.
Toutefois, l’expansion de la maison de Rohan connut une accalmie avec la mort, sans doute jeune d’Alain V, en 1232. Ce vicomte de Rohan ne laissa que des enfants mineurs. La fortune des Rohan fut aussitôt gérée par Josselin de Rohan, seigneur de Noyal-Pontivy et de Montfort, l’oncle d’Alain V [30] et peut-être aussi, à l’intérieur de la vicomté, par le sénéchal héréditaire de la vicomté de Rohan. Cette fortune ne fut donc pas administrée par la mère d’Alain VI, Aliénor de Porhoët, car elle s’était remariée avec Pierre de Chemillé. Elle avait néanmoins obtenu en douaire la terre de Corlay. Son second époux n’était pas n’importe qui puisqu’il s’agit en fait de Pierre de Thouars, fils de Guy de Thouars, régent de Bretagne (mort en 1213) et de la dame de Chemillé et de Brissac en Anjou. Pierre était ainsi le beau-frère de Pierre Mauclerc et donc l’oncle maternel de Jean Ier, duc de Bretagne depuis 1237. Une nouvelle fois, il est possible de remarquer les liens étroits qui rattachent la maison de Rohan à la maison ducale de Bretagne. Par ailleurs, la généalogie nous révèle un autre lien. En effet, Mabille, soeur d’Alain VI, qui reçut en dot l’important fief de Guéméné-Guingamp, épousa Robert de Beaumer, neveu de Pierre Mauclerc et donc cousin germain de Jean Ier.
Même si elle ne régenta pas la vicomté de Rohan, Aliénor de Porhoët eut une importance énorme dans la constitution de la fortune d’Alain VI. Sa proche parenté avec le duc de Bretagne dont elle était la tante lui permit très certainement d’obtenir une part non négligeable de la succession de son père, Eudes III de Porhoët. Cette succession très complexe se fit toutefois en plusieurs étapes. Tout d’abord, l’affaire fut mal engagée pour Aliénor car le principal héritier d’Eudes III était Raoul III de Fougères, fils aîné de la fille aînée d’Eudes III, et ennemi d’Alain V. Raoul obtint, à Crépy-en-Valois, en juin 1235, du roi de France, Louis IX, en récompense du soutien qu’il avait fourni au roi lors de la guerre contre Pierre Mauclerc, l’exemption de rachat et de garde dans ses terres de Bretagne [31]. Ainsi, le seigneur de Fougères n’avait plus à payer le rachat féodal qui devait être versé lors d’une succession, surtout celle de son grand-père, un des plus importants seigneurs du duché. Raoul de Fougères était donc alors tout puissant car il allait tenir, sans puiser dans ses coffres, à la fois la terre de Fougères, la plus importante du Nord-est du duché, et celle de Porhoët, la plus grande du duché. Toutefois, l’accession au trône de Jean Ier, neveu par alliance d’Aliénor fut très bénéfique pour celle-ci. Très certainement, le nouveau duc s’appuya sur elle et sur ses droits (selon l’Assise au comte Geoffroy de 1185, un tiers des fiefs de son père devait lui revenir, à elle et à sa soeur cadette, alors mineure) afin de réduire les prétentions de Raoul de Fougères et démanteler la vicomté de Porhoët. En mai 1239, le duc Jean Ier accepta, à Angers, l’hommage de Raoul pour le fief de Porhoët, mais exigea en contrepartie que Raoul accepta l’hommage de Pierre de Chemillé pour ce qu’il tenait (au nom de son épouse) dans le fief de Porhoët [32]. En septembre 1239, le duc usa de son droit de seigneur supérieur et fit les parts de chaque héritier. Raoul obtint alors l’exemption du droit de rachat pour la terre de Porhoët, la paroisse et la forêt de Lannouée avec le château de Josselin. Pierre de Chemillé et la vicomtesse douairière de Rohan, son épouse, devaient avoir La Chèze et La Trinité, ainsi que la forêt de Loudéac. Il fallut surtout estimer le patrimoine des Porhoët et furent nommés en tant qu’enquêteurs pour le seigneur de Fougères, Paien d’Ynet et Robert Chesnel, et pour Pierre de Chemillé, Guillaume, fils d’Harsi, fils de Menguy. L’arbitre devait être Guillaume de Montbourcher, qui était un adversaire de Raoul de Fougères et un proche du duc [33]. Un an plus tard, le 25 septembre 1240, les deux parties firent un nouvel accord devant le duc de Bretagne. Pierre de Chemillé et son épouse devaient recevoir de Raoul de Fougères en supplément d’héritage ce qui, sans doute, leur avait été enlevée lors de la guerre civile, c’est-à-dire la paroisse de Mohon (terre qui, rappelons le avait été donnée par Eudes III à Alain V de Rohan), à tenir de Raoul en hommage. En même temps, les deux parties s’engagèrent à donner à Jeanne de Porhoët, troisième fille d’Eudes III, une dot à prendre sur les terres de Porhoët [34].
La mort de la veuve d’Eudes de Porhoët permit au duc de Bretagne d’intervenir encore dans la succession de Porhoët. Le 15 avril 1241, à l’abbaye de La Meilleraye, Jean Ier attesta de l’accord entre Raoul de Fougères d’une part, ses oncles maternels, Pierre de Chemillé et Olivier de Montauban (nouvel époux de Jeanne de Porhoët) de l’autre. Raoul devait avoir deux parts, soit le domaine et le château de Josselin, la forêt de Lannouée et la paroisse de Mohon. Ses oncles devaient obtenir la ville et le château de La Chèze, la ville de La Trinité et la forêt de Loudéac. L’estimation devait être faite par Bonabes de Rougé, Méen de Derval, Jean de Maure et Georges Le Voyer, chevaliers, tous proches du duc de Bretagne [35]. La succession du plus important fief de Bretagne ne fut réglée définitivement que le 7 novembre 1248 au manoir de La Ville Jagu, résidence de Marguerite, veuve d’Eudes III, entre Raoul de Fougères, Pierre de Chemillé et son épouse, Olivier de Montauban et son épouse. L’accord délimita les possessions de chacun d’entres eux dans le fief de Porhoët. Raoul devait avoir, en fin de compte, la forêt de Lannouée, la paroisse de Mohon et les deux tiers du douaire de Marguerite, soit les hébergements du Plessis et de La Ville-Jagu. L’autre tiers du douaire devait aller à Pierre de Chemillé et à Olivier de Montauban. La division des parts fut particulièrement bien marquée. Aliénor de Porhoët et son époux, Pierre de Chemillé, ayant échangé avec le second époux de Marguerite, Caro Bodegat, chevalier du Porhoët, 100 livres de rente assis dans la paroisse de Mohon, Caro se devait de prêter hommage à Raoul de Fougères tout comme les héritiers du chevalier Henri de Coëtlogon. Par ailleurs, Pierre de Chemillé et Olivier de Montauban ne pouvaient pas demander à Raoul de Fougères le parcours de leurs bêtes dans la forêt de Lannouée. Raoul ne pouvait faire de même dans la forêt de Loudéac qui appartenait alors entièrement à Pierre et à Olivier et à leurs femmes. Le duc de Bretagne fut déclaré le garant de l’accord comme le mentionne un autre acte fait devant la cour de Ploërmel en février 1249 [36].
Le duc de Bretagne, avec le soutien de son oncle, Pierre de Chemillé, et surtout grâce à cette succession qui s’appuyait sur des règles fixées lors de l’Assise au comte Geoffroy de 1185, était non seulement parvenu à disloquer le plus grand fief du duché, la vicomté de Porhoët, mais encore à accroître la puissance de ses alliés, les vicomtes de Rohan qui devaient hériter en fin de compte d’Aliénor sans compter qu’Alain VI racheta plus tard la part de sa tante, Jeanne. L’héritier du Porhoët, Raoul de Fougères, pour obtenir son immense héritage, avait été contraint de renoncer à une part non négligeable de la vicomté de son grand père. Il devait se contenter de vagues hommages. Jamais, il ne porta le titre prestigieux de vicomte de Porhoët.
Tout était alors en place pour faire d’Alain VI l’un des plus importants vicomtes de Rohan. Grâce à l’action de Geoffroy Ier, les vicomtes de Rohan s’étaient hissés aux plus hautes places de l’aristocratie bretonne. Grâce à la politique d’Alain V, ils avaient considérablement étendu leurs fiefs, avec la Gormené et la restitution de leurs terres anglaises en attendant l’incorporation des fiefs d’Aliénor, soit La Chèze, La Trinité et Loudéac. L’alliance entre le vicomte de Rohan et les ducs Pierre Ier et Jean Ier avait porté ses fruits. Il ne restait plus à Alain VI qu’à renforcer son autorité sur ses terres et ses vassaux. Il fit davantage en continuant la politique d’expansion de la maison de Rohan.
II- Alain VI, un rassembleur de terres
Il est très vraisemblable qu’Alain VI ne fut vicomte de Rohan à part entière qu’à la mort de son grand-oncle, Josselin, en 1251 [37]. A cette date, celui-ci lui laissa l’ensemble de ses biens. Plusieurs actes montrent aussi un changement dans l’administration des biens de la maison de Rohan :
- En avril 1254, à Nantes, Alain VI rééditera le serment de fidélité de son père auprès du duc de Bretagne. En contrepartie, il obtint de Jean Ier des privilèges juridiques qui lui permit de devenir le vassal direct du duc. Les affaires concernant Alain, vicomte de Rohan, et ses héritiers, pour la vicomté de Rohan, les terres de Porhoët et de Guéméné-Guingamp et autres lieux en Bretagne ne devaient être jugées qu’à Ploërmel [38]. En avril de la même année, le duc lui confirma dans toutes ses dispositions, le serment d’aide et d’assistance qu’il avait souscrit en 1231 à la demande de son père, le vicomte Alain V [39].
- L’année suivante, il fit hommage à Yolande de Dreux, sœur du duc Jean Ier, pour son fief de Gormené, dépendant de la terre qui lui avait été donnée en dot lors de son mariage avec le comte d’Angoulême, soit le Penthièvre. Yolande attesta aussi que le chevalier Alain Le Voyer et maître P. Minet avaient enquêté sur ce que Pierre, comte de Bretagne, avait dans le fief de Gormené et les biens qu’Alain V, au temps où il vivait, avait dans ce même fief. Le médiateur fut le chevalier Guillaume de Soubric [40].
Le soutien ducal lui étant assuré, Alain VI s’occupa alors de montrer toute son autorité sur ses vassaux. Il participait ainsi à un phénomène politique nouveau. La politique de centralisation des rois capétiens envers leurs vassaux directs, tels le duc de Bretagne, amenèrent ce dernier à entreprendre une stratégie similaire envers ses propres vassaux directs dans son duché, comme le vicomte de Rohan, qui répercuta la pression subie sur ses propres vassaux.
Ainsi Alain VI réglementa le rôle du sénéchal héréditaire de Rohan. En juin 1255, il attesta de l’accord fait devant la cour Jean Ier, entre lui et Olivier, sénéchal de la vicomté de Rohan, sur les droits de ce dernier, soit 20 livres de rente sur le fief de Deles entre l’Oust et le Blavet, sauf ce que le chevalier Sylvestre de La Feuillée tenait dans le fief susdit [41]. Trois ans plus tard, mentionné en tant que chevalier et vicomte de Rohan, il déclara, après enquête faite sur les droits d’Olivier, son sénéchal de la vicomté de Rohan, lui aussi chevalier, que ce dernier avait seulement le droit aux vêtements de la vicomtesse de Rohan, avec tout son harnais lorsqu’elle entrait dans la vicomté de Rohan. Olivier devait aussi se présenter au vicomte lorsqu’une fois par an, le vicomte tenait sa cour dans sa maison et devait le servir [42]. Alain VI réduisit son sénéchal féodal à l’état de serviteur. Il limita aussi son influence auprès des autres hommes d’armes de sa vicomté. Ainsi, un acte de 1259 montre qu’en janvier, Henri de Quénécan, chevalier, emprunta à Alain VI l’importante somme de 300 livres. Lors de cet emprunt, il promit de rembourser en plusieurs fois. Il donna pour caution Olivier Le Sénéchal, chevalier, qui devait lui être proche [43]. Ce lien avec le sénéchal féodal de Rohan devait le déservir puisque peu de temps plus tard, il est possible de constater qu’il était ruiné. En février 1268, Geoffroy de Bintin, chevalier, sénéchal de Ploërmel, attesta qu’Henri de Quénécan, chevalier, devait au duc de Bretagne 180 livres de monnaie courante et qu’il avait, pour garantir l’emprunt, gagé tous ses biens. Comme le vicomte de Rohan tenait entre ses mains la terre d’Henri pour ce qui lui était du, le sénéchal de Ploërmel s’accorda, au nom du duc, avec le vicomte de Rohan. Ce dernier devait avoir la terre d’Henri et en contrepartie paierait au duc de Bretagne 15 livres de rente [44]. Grâce à un tour de passe-passe, le vicomte de Rohan s’était emparé des biens des Quénécan faisant perdre aux sénéchaux féodés de Rohan de puissants alliés.
Alain VI utilisa la même méthode afin de contraindre ses plus importants vassaux du Sud de sa vicomté, les Lanvaux, à lui céder une grande partie de leurs possessions et donc de leur influence. Les Lanvaux avaient atteint, au début du XIIIe siècle, les sommets de la hiérarchie féodale, en obtenant par mariage une grande partie de l’héritage des Hennebont, sans doute héritiers des anciens vicomtes de Vannes [45]. La maison d’Hennebont détenait en effet, depuis le XIIe siècle, dans le Sud-ouest du Vannetais, les importants châteaux d’Hennebont, de Tréfaven, de Pontcallec et de La Roche-Moisan. Leurs domaines séparaient ainsi le domaine ducal du Vannetais de celui de Cornouaille et empêchait le vicomte de Rohan d’atteindre le Golfe du Morbihan. Au début du XIIIe siècle, ce lignage d’hommes de guerre tomba en quenouille. Les deux héritières épousèrent alors des cadets d’importantes maisons seigneuriales : l’aînée se maria à Geoffroy de Lanvaux, cadet des seigneurs de Lanvaux ; la cadette convola avec Hervé de Léon, chef de la branche cadette de la maison vicomtale de Léon. Les Lanvaux et les Léon étendirent alors leurs zones d’influence. Les Lanvaux purent rivaliser dans le Vannetais avec leurs seigneurs supérieurs, les vicomtes de Rohan. Ils constituèrent aussi un obstacle à la politique d’acquisitions dans cette même région des ducs de Bretagne, Pierre Ier et surtout Jean Ier, acquisitions réalisées à partir de leur nouveau château de Suscinio.
Il semble même que les tensions entre les Lanvaux et leurs seigneurs supérieurs furent telles que les épées furent tirées de leurs fourreaux puisque Geoffroy, fils d’Olivier de Lanvaux, attesta en 1228 d’une paix signée avec le vicomte de Rohan. Le sujet de la querelle semble avoir été l’hommage des Camors, lignage d’hommes de guerre. Il fut décidé que Geoffroy de Lanvaux, alors chevalier, ainsi que ses héritiers, devaient conserver cet hommage, à condition de la tenir du vicomte. Toutefois, Geoffroy de Camors devait rester l’homme lige du vicomte pour tous ses fiefs si toutefois il renonçait à la terre de Borgeil et à son droit d’y établir toutes fortifications, murs, fossés, barrières, palissades, étangs, marchés et trafic [46]. Le vicomte de Rohan s’octroya ainsi le monopole sur toutes les fortifications dans sa vicomté, droit essentiel pour tous membres de l’aristocratie militaire. Malgré tout, les Lanvaux profitèrent du mécontentement d’une partie de cette aristocratie pour reprendre les armes non seulement contre le vicomte de Rohan mais aussi contre le duc de Bretagne. Olivier de Lanvaux trouva sans doute comme allié son beau-frère Hervé de Léon. Quelques documents suggèrent qu’Hervé de Léon entra en effet en guerre contre le duc. La chronique de Rhuis atteste qu’il fut tué à cette époque et que le château ducal de Quimperlé fut incendié sans doute par ses troupes [47]. Ainsi, le chef de la branche cadette de la maison vicomtale de Léon avait attaqué le duc par le Sud de la Bretagne non loin de ses propres biens et des châteaux hérités de la maison d’Hennebont. Outre Hervé de Léon, Olivier de Lanvaux eut aussi d’autres alliés : Pierre de Rostrenen et Pierre de Craon. Un acte de janvier 1249 mentionne que le chevalier Eudes de Baudrimont s’engagea auprès du duc de Bretagne à ne pas porter secours à Pierre de Rostrenen, Pierre de Craon et Olivier de Lanvaux si ceux-ci violaient le traité conclu [48]. Une paix eut donc lieu entre ces hommes d’armes et le duc de Bretagne. Elle peut avoir été réalisée en même temps que celle de Quimperlé. L’origine de ce conflit provient encore des politiques expansionnistes des ducs de Bretagne. Pierre de Rostrenen et Pierre de Craon avaient en effet à se plaindre des ducs. Il se peut que le seigneur de Rostrenen ait voulu réclamer, les armes à la main, une part du Poher en tant que descendant de la maison vicomtale de Poher. Les comptes de 1262 mentionnent que les fiefs et châteaux de cet ancien lignage étaient à cette date entre les mains du duc [49]. Pour John Archer [50], le riche Pierre de Craon, fils du malheureux Amaury de Craon, ancien seigneur de Ploërmel, aurait appuyé cette révolte. Toutefois, il est à remarquer que la terre de Ploërmel qu’il réclama lui aussi en vain est très proche des terres de Pierre de Rostrenen et des domaines de Lanvaux.
Au demeurant, le conflit entre les héritiers d’Hennebont, les Léon et les Lanvaux, et le duc de Bretagne ne paraît pas avoir été résolu avant 1260 car en septembre de cette même année, une autre paix fut signée, à Paris, devant le roi de France. Le roi attesta ainsi qu’Hervé de Léon, écuyer, lui avait déclaré avoir fait la paix avec Jean Ier, duc de Bretagne, lui assurant sa fidélité contre tous ses ennemis, réservant sa foi au roi de France pour ses fiefs et terres tenus de lui. Hervé de Léon promit pour sa part de ne plus faire la guerre en Bretagne. S’il devait la recommencer, le roi de France était autorisé à lui saisir ses terres et châteaux, avec tous les revenus dans le royaume de France. Par cette paix, Hervé de Léon fut déclaré quitte de tous les dommages et de la forfaiture de son père vis-à-vis du duc, et dut payer à ce dernier 10 000 livres de monnaie courante de Bretagne [51]. Le roi s’intéressa ainsi au sort d’Hervé de Léon car celui-ci, en épousant la dame de Châteauneuf-en-Thimerais, était devenu l’un de ses plus importants vassaux à l’Ouest de Paris. Ce mariage marqua aussi la réconciliation entre la maison de Léon et celle de Dreux puisque la dame de Châteauneuf n’était autre que la nièce de Pierre Ier.
Néanmoins, cette paix ne concerna pas Olivier de Lanvaux qui avait été contraint de se soumettre à son seigneur supérieur, le vicomte de Rohan. En effet, un acte d’Alain de Lanvaux daté du 22 juillet 1287 et contenant deux vidimi, nous apprend que son grand-père, Geoffroy, avait fait sa soumission au vicomte en 1228 et que son père, Olivier, fit de même en 1258 [52]. La situation des Lanvaux était alors catastrophique. Tout leur lignage semble connaître de graves difficultés financières. Un acte du 13 mars 1265 montre que Geoffroy de Lanvaux, dit d’Hennebont, sans doute car il manquait de terres afin de maintenir son rang, fut réduit à louer une terre de sa cousine Adelice pour vingt ans contre la somme de huit cents livres et cent sous. En octobre 1266, à Pontivy, Alain de Lanvaux s’obligea à jurer une paix définitive avec le vicomte de Rohan. Il semblerait qu’Alain VI profita du désarroi des Lanvaux pour en faire ses débiteurs. En 1267, Alain VI prêta trois cents livres à Geoffroy de Lanvaux dit d’Hennebont, écuyer. En contrepartie, le vicomte de Rohan reçut en gage des terres dans la paroisse de Noyal. Geoffroy, ne pouvant payer, dut consentir à ce qu’elles soient mises en vente. Personne n’étant venu à la Cour ducale de Ploërmel, elles furent adjugées par le duc de Bretagne à Alain de Rohan [53]. En mai 1270, le chevalier Geoffroy de Lanvaux avait abandonné à Alain VI, son seigneur, une rente annuelle de 20 livres qu’il lui devait et lui laissa aussi d’autres droits seigneuriaux qu’il possédait dans la paroisse de Noyal [54]. En septembre, Hervé de Bouteville, sénéchal de Ploërmel et de Broërech, prit acte de l’acquisition par le chevalier Alain V, vicomte de Rohan, de plusieurs terres dans les paroisses de Noyal et de Saint-Gonneri, appartenant à l’écuyer Geoffroy, dit de Hennebont, à concurrence de cent livres en compensation des 1 165 livres qu’il avait prêtées [55]. Geoffroy de Hennebont semble être alors totalement ruiné. Si les Lanvaux étaient très endettés envers le vicomte de Rohan, ils l’étaient encore davantage envers le duc de Bretagne. Selon un compte ducal datant toujours de la même année, les Lanvaux, Alain et Geoffroy (ce dernier étant le cousin de Geoffroy d’Hennebont), devaient 4 400 livres au duc de Bretagne [56]. Finalement, en 1273, il semblerait que les Lanvaux-Hennebont se soient révoltés contre leurs créanciers, le duc de Bretagne et le vicomte de Rohan, mais en vain car la même année, les comptes rendus par ses officiers de finances au duc de Bretagne révèlent que la terre de Lanvaux était entre les mains du duc qui s’était emparé de leurs châteaux d’Hennebont et de Lanvaux [57]. Une nouvelle fois, l’alliance entre Jean Ier et Alain VI était apparu au grand jour puisque le duc s’était s’engagé envers le vicomte de Rohan, son allié, à ne pas conclure la paix avec Geoffroy, sans le consentement du vicomte ou de ses héritiers [58]. La ruine des Lanvaux, branche aînée, fut elle-aussi totale. Tous les biens de Geoffroy de Lanvaux dans les paroisses de Remungol, de Melrand et de Moréac furent alors vendus par le duc pour 3 500 livres et une nouvelle fois le vicomte de Rohan s’en porta acquéreur [59]. L’année suivante, le duc fit savoir qu’il avait mis en vente, avec l’accord du vicomte de Rohan, tout ce qu’avait Geoffroy dans la vicomté de Rohan, afin de recouvrer la dette de Geoffroy. Encore une fois, comme personne n’était venue payer cette dette, le vicomte avait réclamé les biens au nom de son droit de retrait et avait payé, selon la coutume, 4 000 livres [60]. Au total, Alain VI avait augmenté son influence au sud de sa vicomté et le duc de Bretagne avait accru ses possessions dans le Vannetais.
Le sénéchal de Rohan, les Quénécan et les Lanvaux ne furent pas les seuls à subir la politique d’Alain VI. En son nom propre, il procéda à des échanges, d’abord avec l’abbaye de Lantenac [61]. En mars 1271, à l’abbaye de Lanténac, l’abbé Jean et le couvent de Lanténac lui cédèrent le moulin à eau de Trémuson, dans la paroisse de Loudéac, en échange d’un quartier de seigle qu’ils devaient le jour de la Saint-Jean-Baptiste. De plus, ils acquièrent une rente de trois quartiers de froment, mesure de Rohan, sur les dîmes que le vicomte possédait à Henles, dans la paroisse de Trevé. Alain de Rohan procéda aussi à des achats : en novembre 1271, Hervé de Bouteville, sénéchal de Jean Ier, duc de Bretagne en Broërech et Ploërmel, attesta qu’Olivier de La Moussaie, écuyer, avait vendu devant sa cour, à noble homme Alain, vicomte de Rohan, chevalier, son seigneur, le grand pré d’Uzel, dans la paroisse du même nom pour 40 livres [62]. Le même mois, toujours devant la même juridiction, il fut mentionné qu’Henri dit Berthelot avait vendu pour 20 livres à Alain VI ses droits et propriétés dans trois villae dans la paroisse de Saint-Eleio [63] . Mais surtout, le vicomte de Rohan fit des prêts difficiles à rembourser pour les emprunteurs, souvent ses vassaux, tout comme les Lanvaux et les Quénécan : en mai 1272, Hervé de Bouteville, sénéchal du duc de Bretagne en Broërech et Ploërmel, attesta qu’en la cour du vicomte de Rohan, il avait fait faire vendre la villa de Locminé, dans le fief du vicomte, appartenant à Alain de Keranhoët, chevalier, défunt, pour 180 livres de dettes envers le duc de Bretagne. Comme le vicomte avait exercé son droit de retrait, il devait payer au duc une rente annuelle 13 livres et 10 sous [64]. En février 1273, Geoffroy, dit La Vache, chevalier, sénéchal du duc de Bretagne à Ploërmel, attesta qu’en sa cour Alain de Keranhoët, héritier du chevalier défunt, s’était obligé envers Alain VI de tous les revenus qu’il percevait dans la villa de Locminé pour 200 livres. Ne les ayant pas payés, le vicomte, par la médiation du duc de Bretagne, les fit vendre. Le duc les adjugea au vicomte de Rohan pour 15 livres de rente annuel [65]. Toutefois, certains réussirent à résister à la pression d’Alain VI de Rohan. En 1276, Alain VI eut aussi fort à faire avec une puissance montante, les Beaumanoir. Jean de Beaumanoir, seigneur de Mérignac, chevalier, reconnut devoir une dette envers Alain VI qui avait garanti le paiement de la dot de sa fille, mariée à l’écuyer Geoffroy Tournemine, soit 20 livres de rente et 1 500 livres de monnaie courante [66]. Peu de temps après, ce même Jean de Beaumanoir remboursa Alain VI, en lui versant 160 livres de rente par an et 500 livres de monnaie courante [67].
Disposant de fonds sans doute impressionnants du fait de sa fortune foncière, Alain VI semble donc avoir jouer le rôle de banquier auprès de ses vassaux mais aussi d’autres seigneurs moyens du duché de Bretagne. Ses deux fils cadets, Geoffroy et Josselin de Rohan, tous deux clercs, furent des prêtes noms. Sous prétexte d’augmenter leurs patrimoines, Alain VI leurs acheta de nombreuses terres et droits. Plusieurs actes mentionnent que Geoffroy, alors chanoine de Saint-Brieuc (préparant une probable accession à l’évêché de Saint-Brieuc), obtint une importante dotation :
- En août 1261, Alain de Trégarantec, écuyer, alloué du vicomte de Rohan, attesta qu’en sa présence Adelice (de Lanvaux), dame de Tihenri, épouse d’Eudes Picaut, chevalier, avait vendu pour 100 livres de monnaie courante, avec l’autorisation de son mari, devant la cour du vicomte de Rohan, à Geoffroy de Rohan et à ses héritiers, ses droits et propriétés dans la paroisse de Rogclensen, évêché de Cornouaille [68].
- En août 1279, Geoffroy Conan, écuyer, alloué de noble homme Alain, vicomte de Rohan, chevalier, dans la vicomté de Rohan, dans le Porhoët et dans le Gormené, attesta que Pierre d’Avalloc avait vendu pour 20 livres à Geoffroy de Rohan, clerc, sa terre dite Gormené dans la paroisse de Plogonas, évêché de Saint-Brieuc. Un autre document de la même année mentionne que ce même Geoffroy Conan avait attesté que Guillaume dit le Normant avait vendu pour 15 livres à Geoffroy ce qu’il avait dans la paroisse de Saint-Teleo avec tout le bois [69].
- L’année suivante, en février, Geoffroy, fils de Conan, écuyer, alloué de la vicomté de Rohan, constata de l’achat par Geoffroy de Rohan pour 175 livres et 5 sous des biens de Geoffroy de Guenan, ceux de la mère et des frères de ce dernier, dans la paroisse de Plumelin, biens mis en vente par Pierre Villouart, Amou, sa femme et Normand, bourgeois de Vannes [70].
- Le 15 novembre 1286, Alain de Camors, écuyer, fils de Henri de Camors, écuyer, défunt, donna à Geoffroy de Rohan, toujours clerc, ce qu’il avait dans les paroisses de Plumelin et de Camors [71].
- Le 5 décembre 1287, à Vannes, Eudon Roussel, fils de Roger, alloué de la vicomté de Rohan dans les terres qui furent à Geoffroy de Lanvaux, chevalier, défunt, dans les paroisses de Neyzin, Remungol et Plumeliau, fit savoir que Geoffroy de Rohan, clerc, chanoine de Saint-Brieuc, avait acheté plusieurs terres [72].
- En 1288, Guillaume, fils de l’écuyer Geoffroy de Plumeliau, seigneur de Kermeniou, attesta que comme Alain de Camors, fils aîné et héritier d’Henri de Camors, écuyer, lui avait donné tout son fief dans la paroisse de Plumelin, évêché de Vannes, à tenir du vicomte de Rohan, il les donnait à Geoffroy de Rohan, chanoine de Saint-Brieuc [73].
- Enfin, le 25 juin 1295, Geoffroy Conan, écuyer, vendit aussi à Geoffroy de Rohan sa terre de Cloharec en Querliver, paroisse de Naizin [74].
Pour son troisième fils, Josselin, lui aussi clerc, Alain VI procéda de la même manière :
- Le 25 février 1278, Eudes Rossel Rougé, alloué du vicomte de Rohan dans la terre qui fut à Geoffroy de Lanvaux, chevalier, attesta qu’en sa présence le chevalier Eudes Picaut, avec l’accord de son fils, Guillaume Picaut, écuyer, avait vendu pour 20 livres à Josselin de Rohan, fils du vicomte de Rohan la villa de Kerjean et ce qu’il avait dans la paroisse de Noyal-Pontivy, évêché de Vannes [75].
- En août 1283, Geoffroy Conan, écuyer, alloué de la vicomté de Rohan, attesta qu’Olivier dit Bodiz, écuyer, avait donné à Josselin de Rohan, fils du vicomte de Rohan, son fief dans la paroisse de Mur, fief qui relevait de l’abbaye de Caradeuc, évêché de Cornouaille [76].
- En 1284, le même Geoffroy Conan attesta que Guillaume de Mur, écuyer, avait vendu pour 30 livres à Josselin toute sa terre et ses droits entre la villa Saint-Caradeuc et la villa de Saint-Conoto, dans la paroisse de Mur [77].
- En janvier 1284, toujours Geoffroy Conan attesta de la vente faite par Benoîte, fille de Guillaume de Mur, épouse de Rolland, fils de Geoffroy Rolland, à Josselin de Rohan de la villa Kervili dans la paroisse de Saint-Marieuc, évêché de Cornouaille [78].
- En 1285, Geoffroy Conan, alloué de la vicomté de Rohan, attesta qu’Eudes Gillebert, écuyer, et son frère, Josselin, avaient vendu pour 40 livres à Josselin de Rohan leur bois de Kiliou dans la paroisse de Meleriac, évêché de Cornouaille [79].
- La même année, le château de Corlay fut vendu à Josselin par Alain du Fou, écuyer. On ne sait comment cet Alain du Fou avait acquis cette place forte et dans quel état elle était à cette époque [80].
- Toujours en 1285, Guillaume de Mur, écuyer, vendit contre 70 livres à Josselin de Rohan plusieurs terres dans la paroisse de Mur [81].
- En 1291, Pierre de Alnet, fils de Guillaume de Alnet, écuyer, défunt, donna pour son bon service à Josselin de Rohan ce qu’il avait dans la paroisse de Mereliac, évêché de Cornouaille [82].
- En 1293, Eudes Le Veneur et Alain de Fagon, écuyers, attestèrent que Josselin de Rohan avait retiré des terres dans les villas de Kilivenec et la villa de Corlay [83].
- La même année, Eudes de Pulsos, et son épouse, Théophanie, concédèrent à Josselin de Rohan tout ce qu’ils avaient dans le bourg de Merlesc [84].
Ainsi, si Geoffroy obtenait des biens dans le Sud de la vicomté, surtout dans les anciens fiefs des Lanvaux, Josselin se retrouvait à la tête d’un beau patrimoine à l’Ouest, dans l’évêché de Cornouaille, autour de Corlay, c’est-à-dire auprès du douaire de sa mère, Aliènor. Ces acquisitions permettaient de même à leur père d’accroître les biens de la famille sans faire face à l’hostilité généralisée de ses vassaux, hostilités qui pouvaient se transformer en révolte armée.
De cette longue liste, il ressort que tout comme son soutien et allié, le duc de Bretagne de la maison de Dreux, qui acheta en son nom et au nom de ses fils cadets d’importants fiefs, quitte à utiliser la force, Alain VI accrut considérablement sa puissance territoriale. Geoffroy Ier de Rohan avait réussi à instaurer son pouvoir jusqu’aux côtes nord de la Bretagne, Alain VI s’imposa en soumettant ses principaux vassaux dans sa vicomté, tels les Quénécan, le sénéchal héréditaire de Rohan et surtout les Lanvaux. En absorbant, de gré ou de force, les biens de ce lignage si important dans le Vannetais, Alain VI faisait une percée remarquable au Sud de sa vicomté.
III- Alain VI un grand seigneur
Si nous nous reportons au fameux Livre des Ostz de 1294 qui fournit la liste des principaux fiefs relevant directement du duc de Bretagne, ainsi que les devoirs militaires de chacun de ces fiefs [85], Alain VI était l’un des plus puissants seigneurs du duché. Il était surclassé uniquement par le comte de La Marche et d’Angoulême, seigneur de Fougères et de Porhoët, héritier direct de Raoul III de Fougères, et par Henri III d’Avaugour, seigneur de Goëlo, de Dinan-Sud, de Léhon et de Mayenne (dans le Maine). Alain VI était néanmoins incontestablement le plus important seigneur de la baillie de Ploërmel et de Broërech. Il y déclara ainsi neuf chevaliers et demi : cinq pour sa vicomté de Rohan, un pour le fief de Guéméné-Guingamp, un demi pour la terre de Gormené et trois pour le fief de Porhoët qui relevait en fait de son cousin, le comte de La Marche, seigneur de Porhoët.
La vicomté de Rohan s’était formée en plusieurs étapes [86]. On connaît l’importance financière de cette terre puisqu’en 1306, le droit de rachat de cette vicomté, soit une année de revenu, avait été estimé à 4 243 livres [87]. D’après H. du Halgouët, en 1294, la vicomté de Rohan s’étendait sur 56 paroisses et comprenait l’ancienne vicomté de Rohan [88], démembrement du Porhoët (donc 39 paroisses), les seigneuries importantes de Mûr (six paroisses détachées du Domaine ducal de Cornouaille) et de Corlay [89] (douze paroisses démembrées du Poher), les fiefs des Lanvaux [90] (sauf les paroisses de Mellionec et de Plouray) et le tiers du comté du Porhoët, c’est-à-dire les seigneuries de La Chèze et de Loudéac, sans compter les différents achats effectués par Alain VI.
Si l’on considère qu’un chevalier du au duc de Bretagne représentait une forteresse majeure, c’est-à-dire très certainement construite en pierre, Alain VI disposait d’une dizaine de places fortes. Comme nous l’avons mentionné, le premier vicomte de Rohan disposa de deux place-fortes, toutes deux sur l’Oust. La première se situait à Castennec en Bieuzy. Elle contrôlait deux grandes voies d’accès intérieur de la Bretagne, le Blavet et la voie romaine allant de Rennes à Carhaix [91]. Alain Ier l’abandonna pour construire le château de Rohan, une motte féodale avec une tour carrée [92] qui devint le centre de son fief [93]. A la fin du XIIe siècle, les Rohan obtinrent les châtellenies importantes de Mur et de Corlay, avec la mouvance de cette dernière, Gouarec [94], contenant deux châteaux importants, Les Salles en Sainte-Brigitte à l’extrémité du territoire de Cléguérec [95] et Les Salles en Perret attestés dès 1125 [96]. Ils avaient aussi le château des Salles de Pontivy construit près du Blavet au XIe siècle [97] et Castel-Finans par ailleurs sur le même fleuve, sur un promontoire comme Castennec [98]. Alain VI obtint à la mort de sa très riche mère, Aliénor de Porhoët, après 1274, les châtellenies et châteaux de Lannouée, de La Chèze et de Loudéac qui relèvent en juveigneurie du Porhoët et pour lequel il devait trois chevaliers d’ost en 1294 « par la main au comte de La Marche » au comte de La Marche, seigneur de Porhoët, son cousin [99]. Il annexa comme nous l’avons vu à son domaine personnel une partie des domaines des seigneurs de Lanvaux, ses parents et vassaux, avec le château de Griffet en Plessis-Griffet [100]. Il obtint ainsi Griffet, alors que le duc confisquait Lanvaux [101].
La seconde terre déclarée à Ploërmel par le vicomte de Rohan fut celle Guéméné-Guingamp qui s’étendait sur cinq paroisses [102]. Toutefois, cette terre se trouvait aux mains de la famille de Beaumer qui l’avait obtenu lors du mariage de Robert, fils de Gilles de Beaumer et d’Agnès de Couci (et donc nièce de Pierre Mauclerc), avec Mabille de Rohan, soeur d’Alain VI. En 1294, le vicomte de Rohan en est le seigneur supérieur pour les autorités ducales, peu importe qu’elle ait été donnée en juveigneurie à une date antérieure. Cette seigneurie comprenait trois châteaux importants : La Roche-Périou en Priziac [103], Guéméné et Cravial en Lignol [104].
D’après le Livre des Ostz, le vicomte de Rohan avait aussi le fief de Gormené ou Gourmené pour lequel il devait un demi chevalier. Il était situé en fait dans le Penthièvre, principalement dans la paroisse de Plouguenast, qui avait été uni à la seigneurie voisine de Pontgamp ou Pontguégant. Il ne manquait pas d’importance puisque, selon le partage de 1298, il représentait environ deux cents livres de rente. A la mort de Yolande de Dreux, fille du duc Pierre de Dreux, sa dot, le Penthièvre, fit retour au domaine ducal. Le vicomte de Rohan devint alors le vassal immédiat du duc pour cette terre qui prolongeait sa châtellenie de La Chèze.
Toutefois, la puissance territoriale d’Alain VI restait limitée. Les acquisitions du vicomte de Rohan dépendaient de la bonne volonté ducale. Il arriva un moment où Alain se retrouva freiné dans son désir d’expansion. A l’Est, il se heurta immanquablement au comte de La Marche et d’Angoulême, son parent et seigneur, mais aussi proche cousin et l’allié du duc de Bretagne. Par ailleurs, il devait partager son fief du Porhoët avec ses demi-frères Chemillé, cousins germains du duc de Bretagne. En janvier 1285, Thomas de Chemillé, écuyer, mentionna qu’il s’était accordé avec son frère aîné, Alain, vicomte de Rohan, sur l’héritage de leur mère, Aliénor de Porhoët. Le vicomte lui donnait la terre de La Rivière, dans la paroisse de Pleumieuc, évêché de Saint-Brieuc, et les villae de Saint-Sansom et Hoieu Heou dans la paroisse de Bréhant-Loudéac. Thomas se disait pour cela homme et donc vassal de son frère mais réservait le droit du comte de La Marche, seigneur de Porhoët [105]. La même année, Guy de Chemillé, seigneur de Brissac, donna quittance à Alain, vicomte de Rohan, sans doute son oncle, de 350 livres selon le testament de son frère Jean de Chemillé [106]. A l’Ouest, Alain VI ne pouvait espérer retrouver les fiefs de Guéméné-Guingamp et de La Roche-Piriou encore entre les mains des Beaumer, eux-aussi proche parents du duc de Bretagne. Quelques actes le montrent. Le 19 octobre 1283, Thomas de Beaumer, seigneur de Guéméné-Guingamp s’accorda avec Alain VI pour que les seigneurs de Guéméné-Guingamp ne doivent l’obéissance de leur terre au vicomte de Rohan qu’en la ville de Pontivy [107]. Deux ans plus tard, en 1285, le samedi après la Pentecôte, à Moncontour, le chevalier Alain de Querriguel arbitra un différend entre Alain, vicomte de Rohan, chevalier, et Thomas de Beaumer, seigneur de Guéméné-Guingamp. Il devait se prononcer sur la plainte de Thomas qui avait dénoncé le vicomte de Rohan pour avoir été à l’encontre de leur accord car le vicomte avait jugé et fait pendre un voleur du fief de Guéméné-Guingamp ailleurs qu’à Pontivy. L’arbitre décida de débouter Thomas de Beaumer de sa plainte [108].
La prudence était de rigueur car le fait de toucher aux biens de ces voisins et parents signifiait non seulement mécontenter le duc de Bretagne, mais aussi le roi de France qui était de plus en plus le recours de la haute aristocratie bretonne face aux empiétements du duc de Bretagne et de son administration. Le seigneur de Porhoët était alors le très puissant seigneur de Lusignan, comte de La Marche et d’Angoulême, un des principaux feudataires du roi de France. Les Chemillé étaient de puissants seigneurs d’Anjou, détenteurs des fiefs de Brissac et de Chemillé. Ils étaient alors intouchables. Toutefois, Alain VI entra en concurrence avec le duc de Bretagne. Après s’être entendu pour dépecer les biens des Lanvaux, le vicomte de Rohan commença en effet à connaître quelques soucis avec Jean II, qui à partir de son château de Suscinio, voulait faire du Golfe du Morbihan un bassin purement ducal. Alain ne pouvait accéder à la mer et devait se contenter de rester cantonner au coeur de la Bretagne. Le vicomte de Rohan se tourna alors vers le roi de France. Le 27 novembre 1291, le vicomte de Rohan se plaignit ainsi devant le Parlement de Paris du duc de Bretagne qui ne cessait d’empiéter sur sa juridiction. Le duc s’était emparé de ses droits sur des vignobles pour une valeur de 40 livres. Il avait loué les terres du vicomte dans les paroisses de Plouray et de Mellionec pour une valeur de 1 000 livres, mais il avait ordonné des travaux pour le creusement de l’étang dit de Pontcallec qui inondèrent les terres du vicomte entraînant des dommages pour 1 000 marcs. Les agissements des gens du duc, dans sa vicomté, avait coûté à Alain VI 100 livres. Les levées effectuées sur ordre du duc sur les hommes taillables du vicomte étaient estimées à 1 000 marcs. Le vicomte de Rohan se plaignit encore des agissements du sénéchal de Ploërmel, de la puissance de la cour de Ploërmel, que le comte (ou duc) de Bretagne avait reçu en hommage lige Hervé de Léon pour ses fiefs dans la vicomté de Rohan [109].
Plusieurs autres actes révèlent que les relations entre le vicomte de Rohan et le duc de Bretagne s’étaient en effet rafraichies, voire devinrent franchement mauvaises. Le duc Jean II était revenu sur les décisions de son père particulièrement favorables à Alain VI. Ce fut sur le cas des sénéchaux héréditaires de Rohan que Jean II revint. Le 26 janvier 1290, à Auray, le duc Jean II jugea le désaccord entre Alain VI et Olivier, sénéchal féodal de la vicomté de Rohan, sur la demande d’Olivier. Il déclara que les lettres données par le vicomte à l’aïeul d’Olivier, Olivier Le Sénéchal, chevalier, devaient être exécutées car elles étaient scellées. En contrepartie, Olivier ne pouvait rien avoir des moulins que tenait le vicomte dans la ville de Rohan [110]. Jean II se pencha aussi sur l’affaire Lanvaux aux dépens d’Alain VI :
- En 1289, le 25 octobre, Alain VI fut contraint de reconnaître à sa sœur Tiphaine, veuve de Geoffroy de Lanvaux, chevalier, défunt, par pitié et aumône, 40 livres de rente en viager pour son douaire représentant le tiers des biens de son époux [111].
- En 1288, Jean II rendit un jugement, à Ploërmel, sur les réclamations du vicomte de Rohan. Comme ce dernier tenait les fiefs de Geoffroy d’Hennebont, écuyer, pour dettes depuis maintenant 15 ans, il les conservait car il les tenait selon la coutume depuis 14 ans et plus [112].
Il est à remarquer que le duc Jean II acceptait constamment les demandes du vicomte de Rohan, mais aussi accordait son écoute aux Lanvaux. Le 1er juillet 1298, il fit plus. En effet, à Premur, près de Muzillac, il jugea encore le différend entre Alain VI et Alain de Lanvaux. Ce dernier demandait la restitution de ses terres dans les vicomtés de Rohan et de Porhoët, terres données par le duc en sa cour de Ploërmel au vicomte, terres lui venant de son père, Geoffroy de Lanvaux, chevalier et de son grand-père, Alain de Lanvaux, chevalier, terres qui avaient été vendues sur ordre du duc Jean Ier au vicomte, soit le manoir du Griffet et la paroisse de Ploeuc. Alain de Lanvaux avait accusé le vicomte, devant le duc, de parjure et de trahison et l’avait défié, avec ses frères, Guillaume, Jean, Raoul et Geoffroy, en « gages de bataille », c’est-à-dire qu’il lui déclarait une guerre privée. Sur le conseil d’amis, de sages, en raison de l’âge du vicomte, de l’impuissance de son corps (le vicomte devant être malade), le duc de Bretagne annula le gage de bataille et accorda au vicomte les terres dites, déboutant Alain et ses frères de leurs demandes [113]. Toutefois, un autre acte du 21 juillet 1299 révèle que le duc Jean II donna à Alain de Lanvaux le droit d’être payer par le vicomte de Rohan d’une somme de 3 000 livres en compensation de ses pertes [114]. Le coup dût être rude pour Alain VI car la somme à payer était énorme.
L’année suivante, en janvier 1289, à Nantes, Jean II rendit un nouveau jugement entre Alain VI et Geoffroy de Hennebont, écuyer, sur les terres que Geoffroy tenait dans la paroisse de Noyal, et sur les biens de Penbezu, de Steziou, et de Coët questel, sur les terres de la mère de Geoffroy dans les villes de Kermenguy et de Kermcollen dans la paroisse de Plussulien, sur une place à Corlay, et sur d’autres lieux dans la vicomté de Rohan. Après plusieurs altercations, le duc de Bretagne confirma que le vicomte de Rohan devait conserver ces biens. Geoffroy devait jurer sur les Evangiles de ne plus rien réclamer [115].
Vers la fin de sa vie, Alain VI a très certainement changé de politique et s’est davantage tourné vers les autres grands seigneurs du duché de Bretagne qui avaient eu à souffrir des agissements du duc. Il s’allia aux éternels rivaux ducs de Bretagne, les Avaugour, héritiers en ligne masculine des droits ducaux de la maison de Rennes. Les ducs de la maison de Dreux leurs avaient ravis leurs terres ancestrales du Trégor, du Penthièvre, mais encore de Dinan. Ainsi, le fils aîné et héritier d’Alain VI, Alain de Rohan, épousa Agnès d’Avaugour, sans doute sa cousine germaine, fille d’Henri II d’Avaugour, adversaire du duc Jean II. Alain de Rohan rajouta la terre que sa mère, Isabeau d’Avaugour, avait obtenue en dot dans le Goëlo, soit le fief de Correc, à la dot de son épouse. Selon le contrat de mariage en date du 9 octobre 1281, son futur beau-père, Henri II d’Avaugour, chevalier, seigneur de Goëlo et de Mayenne, donna à sa fille ainée, Agnès d’Avaugour, 400 livres de rente à percevoir sur la forêt et le manoir de Garennes, avec le droit de parcours des bêtes. En contrepartie, l’héritier du vicomte devait lui obéir au château de Châtelaudren comme juveigneur, c’est-à-dire en tant que vassal apparenté. Comme Alain VI n’avait pas confiance dans la parole d’Henri d’Avaugour qui fut pendant si longtemps un fervent ennemi de sa maison et de celle des ducs de Bretagne de la maison de Dreux, il demanda des garanties : Pierre Tournemine, Geoffroy Le Vicomte, Richard de Boisbou, Olivier de Boisbili, chevaliers, et Geoffroy Tournemine, autorisé par son père, Pierre Tournemine, durent non seulement garantir l’accord sur leurs biens, mais se tenir comme otages d’Alain à Pontivy [116].
Alain VI se rapprocha aussi des Clissons qui s’étaient rebellés contre le duc Jean Ier, ce qui leurs avaient coûté une grande partie de leur influence dans le comté de Nantes, mais qui grâce à des mariages fructueux, étaient parvenus à devenir non seulement d’importants seigneurs normands, mais aussi les vassaux directs du roi de France. A la mort de son héritier, Alain, en 1299, Alain VI maria son fils cadet Geoffroy à Catherine de Clisson.
Enfin, Jeanne de Rohan, fille d’Alain VI, épousa Hervé de Léon, le plus important seigneur du Léon, grand seigneur vannetais, qui avait vu ses cousins, les vicomtes de Léon, dépossédés de leurs fiefs par le duc tout comme ses autres proches parents, les Lanvaux-Hennebont. Le père d’Hervé fut celui qui se révolta contre Jean Ier. Depuis cette révolte, les Léon n’avaient fait qu’accroître leur importance en Normandie et dans le pays chartrain. En mars 1286 un important traité entre Hervé de Léon et Alain VI fut signé devant la cour ducale de Ploërmel. Comme le vicomte de Rohan avait promis en dot à sa fille 100 livres de rente sur les paroisses de Noyal et de Beuzi dans l’évêché de Vannes, 500 livres de monnaie courante et les levées de 200 livres sur la terre de Jeanne en Goëlo lui venant de sa mère, Hervé réclama immédiatement le versement non seulement de la moitié de la dot prévu mais aussi les 180 rais de froment qu’Hervé de Léon disait que le vicomte de Rohan avait levées dans sa chambre de Correc, sans compter les acquisitions faites hors du Goëlo par le vicomte de Rohan et sa épouse, Isabeau d’Avaugour. La cour ducale décida qu’il devait avoir 100 livres de rente, plus 1 500 livres, soit 500 livres pour la dot et 1 000 livres pour les retards de payement des 100 livres de rente, à verser en quatre fois. Hervé de Léon renonça alors à ses revendications sur le Goëlo [117]. L’affaire n’était toutefois pas encore totalement réglée en août 1296 puisqu’il y eut de nouveau un accord. Hervé réclamait en effet au vicomte la paroisse de Noyal. Le vicomte lui donna alors 100 livres de rente sur la paroisse de Plusulien, exceptés les villes marchandes, les forêts et les garennes, à condition qu’il devienne son homme, c’est-à-dire son vassal. Mais comme Hervé de Léon s’était plaint de cette décision au duc de Bretagne devant la cour de Ploërmel, il fut décidé que les 100 livres devaient être assises sur la paroisse de Melrant, c’est-à-dire sur le lieu-dit La ville Robert (sans doute Kerobert), sur les tenures de Guillaume, fils Le Gous de Broch, sur celles d’Eon, son frère, sur celles d’Henri, fils de Josselin, en la ville Auclerc, sur les tenures de Guillaume, fils de Josselin, c’est-à-dire aussi sur les domaines du vicomte à La Bruyère, soit le manoir et le moulin de Beaumont, le pré de l’étang, le moulin de Pallas, toutes les moutures et foulages des terres et domaines dessus dits, sauf cinq arpents, c’est-à-dire encore sur la moitié de la terre jadis au fils Saliz de Coëtsulan et sur le droit du sénéchal féodal de Rohan, sauf ce qu’avait l’abbaye de Beauport sur le froment. La cour estima ces rentes à 85 livres par an. Pour les compléter, la rente de 100 livres devait être assise sur la paroisse de Baud, c’est-à-dire sur la ville de Hehe, sur la tenure de Cosquehec, sur la ville Conan, sur les tenures de Guillaume, etc [118].
Par ailleurs, l’ampleur de la fortune d’Alain VI se vérifie lorsque l’on s’attarde sur les problèmes familiaux que connut ce grand seigneur à la fin de son existence. Malade en 1298, Alain établit sa succession. Il avait eu de nombreux enfants de ses deux mariages. De sa première épouse, Isabelle d’Avaugour, dame de Correc, il eut donc Jeanne, épouse d’Hervé de Léon, Alain, l’héritier présomptif de la maison de Rohan et très certainement Geoffroy. Il est très difficile de placer Isabelle d’Avaugour sur l’arbre généalogique de la maison d’Avaugour, peut-être fut-elle la fille d’Alain d’Avaugour, seigneur de Dinan et de Mayenne, très opposé à son père, Henri d’Avaugour, ennemi juré des ducs de Bretagne de la maison de Dreux. Ces enfants du premier lit étaient bien établis en 1298 [119]. Alain, son fils aîné, devait adjoindre à la part de son père, soit très certainement la vicomté de Rohan augmentée de la Gormené et d’une partie du Porhoët, les biens hérités de sa mère dans le Goëlo, soit le fief de Correc, sans compter, dans la même région, des droits et des terres constituant la belle dot de sa femme. Pour Geoffroy, son père avait effectué, comme nous l’avons constaté précédemment, de nombreuses acquisitions, peut-être en vue de son installation sur le siège épiscopal de Saint-Brieuc. Il fallut aussi prendre des dispositions pour les enfants qu’Alain VI eut de son second mariage avec Thomasse de La Roche-Bernard. Il est à remarquer que cette dernière était membre d’un lignage jusque là sans histoire et surtout fidèle à la cause des ducs de Bretagne de la maison de Dreux. Il est probable que le mariage d’Alain VI et de Thomasse intervint au moment où les relations entre les ducs de Bretagne et le vicomte de Rohan devaient être particulièrement cordiales, soit avant l’avènement de Jean II. Il est fort possible qu’il eut un accord entre Alain VI et son fils aîné afin de garantir aux enfants de son second lit la jouissance de leurs parts. Ainsi, en 1298, le vendredi avant la Noël, à Perret, Alain de Rohan, fils aîné et principal héritier d’Alain, vicomte de Rohan, chevalier, alors malade, promit de donner à ses frères, Josselin (déjà bien doté, comme nous l’avons vu, par son père), Guy et Eon, en héritage 600 livres de rente, soit 200 livres à prendre sur les revenus de la terre de Gormené au château de Pontguegant et si nécessaire sur les revenus des moulins et sur les possessions des Rohan dans la paroisse de Saint-Telen, soit encore 200 livres à prendre sur les revenus des bois de Téléné et soit enfin 200 livres, à percevoir sur les revenus des bois de Coëtcastel, de Steheon, de Penbean, du Plesse et du Deroedon et sur le domaine de Tenovent. L’acte fut scellé par les chevaliers Jean, sire de Beaumanoir, Thomas de Chemillé, Thibaud de La Feuillée, par les écuyers Karou de Bodegat, Alain du Parc, Guillaume de Borquetel, tous vassaux de la vicomté de Rohan [120]. Au même moment, devant la cour ducale de Ploërmel, Alain VI et Alain de Rohan, chevalier, son fils, s’occupèrent du douaire de la future veuve d’Alain VI. Thomasse, vicomtesse de Rohan, devait recevoir 3 000 livres en deniers, 24 écuelles d’argent, 24 sauciers d’argent, 24 hanaps d’argent, 6 pots d’argent à eau, 2 coupes d’argent, les joyaux, des couronnes et des chapeaux, tous les draps, les haras de Quenecan avec l’usage de la forêt de Quénécan, des terres à Lanmeilec, à Cavarn et à Château-Cren, les vaches dans les forêts de Loudéac, de Quénécan et de Poulancre, tout cela à cause des bons services de Thomasse lors de la maladie du vicomte [121].
Si tout est en place pour protéger la veuve et les enfants du second lit d’Alain VI, tout fut remis en cause par la mort, non celle d’Alain VI, mais celle de son fils, Alain. En août 1299, Alain VI qui avait donc survécu à son fils aîné fut contraint de payer au duc de Bretagne le droit de rachat pour la mort de son fils à qui il avait donné en viager le tiers de toutes ses terres de Bretagne, ce qu’il nous indique la part qu’il avait reçu de son père. Il devait alors payer 1 300 livres, somme garantie par Thomas de Chemillé, Geoffroy de Fresne, chevaliers et Alain Conen, écuyer [122]. Quasi au même moment, le duc de Bretagne en profita pour empiéter sur son autorité dans la vicomté de Rohan. En effet, en juillet 1299, par lettres, Alain VI fut obligé de reconnaître qu’au duc de Bretagne appartenait le profit des droits de ligeance, de rachat et de vente à lever sur les juveigneurs de sa vicomté et de toutes ses terres de Bretagne [123]. Ainsi, le duc disposait d’une plus grande autorité sur les vassaux du vicomte de Rohan.
Après la mort d’Alain de Rohan, Alain VI modifia ses dispositions successorales et certaines réclamations venant de proches parents durent être satisfaites.
- En 1299, au château de Rohan, il donna à ses fils, Josselin et Guiard de Rohan, issus du second lit, toutes les terres du royaume d’Angleterre qu’il possédait encore. Le problème est de savoir lesquelles car nous n’en connaissons aucune à cette date [124].
- La même année, Alain, évêque de Cornouaille, fit savoir qu’Alain VI avait émancipé son fils, Olivier, clerc [125], ce qui permettait à ce dernier de ne pas être soumis à ses frères aînés et de pouvoir jouir en toute indépendance de sa part d’héritage.
- Alain VI régla le règlement de la succession de Philippa, sa sœur : en 1301, devant la cour ducale de Ploërmel, il s’accorda avec Olivier de Tinténiac, chevalier, et son épouse, Isabelle d’Avaugour, car ces derniers demandaient les joyaux de Phelippe, mère d’Isabelle, les chevaux, les arréages, les levées de terres. Le vicomte devait payer 20 livres de rente [126]. Le différend avec ses neveux se termina le 15 mars 1303 lorsque Jean de Beaumanoir, son beau-fils, fut chargé de l’arbitrage et assura 125 livres de rente à Geoffroy d’Avaugour et à sa sœur [127].
Après la mort de son fils aîné, Alain VI fut contraint ensuite de gérer les conséquences du décès de son fils puîné et successeur putatif, Geoffroy, qui mourut quelques mois avant lui, en 1303, laissant une veuve, Catherine de Clisson qui se plaignit de son douaire. En août 1303, le vicomte de Rohan et Catherine de Clisson, s’accordèrent devant le duc de Bretagne, sur les réclamations de la veuve de Geoffroy de Rohan. Cette dernière demandait en douaire, selon son contrat de mariage, le tiers de la vicomté de Rohan et de toutes les terres dans la vicomté de Porhoët ou 500 livres de rente. Elle n’obtint que 100 livres payables en deux fois et une rente de 50 livres [128]. Il ne faut pas oublier que Catherine n’était pas devenue vicomtesse de Rohan.
A la mort d’Alain VI en 1304, ce fut donc son troisième fils, Josselin, qui lui succéda et qui fut contraint de s’occuper de la succession de son père. En 1305, Josselin de Rohan et son frère Olivier se partagèrent les biens de leur père [129]. En 1307, un accord fut établi de même sur le douaire de Thomasse, veuve d’Alain VI, mère du vicomte Josselin, et sur les parts des différents frères cadets de Josselin. Devant la cour ducale de Ploërmel, Josselin s’accorda avec sa mère. Les meubles du vicomte et de la vicomtesse étaient laissés à Josselin qui devait payer les dettes de son père. Thomasse conservait la moitié de la donation testamentaire de son époux et ses bijoux en viager. Elle devait avoir la moitié des biens acquis lors de son mariage et recevoir le douaire habituel qui, selon la tradition familiale, consistait en la châtellenie de Corlay, mais aussi elle devait recevoir la moitié des revenus du haras de Quenecan et le bois de Poulancre. Il fut aussi décidé qu’Olivier de Rohan, frère du vicomte Josselin et son héritier présomptif, devait prêter hommage à son frère et recevoir 1 200 livres de rente. Il devait être aussi sous la garde de son beau-frère, le seigneur de Beaumanoir [130], sans doute parce qu’il était alors mineur. Par ailleurs, il est possible de penser que le nouveau vicomte ne s’entendait ni avec sa mère, ni avec son frère. Mais cet accord ne servit à rien car peu temps plus tard Josselin décéda à son tour. Ce fut donc Olivier de Rohan, devenu Olivier II, vicomte de Rohan, qui dut se charger de mettre fin à la succession de son père. Il est vraisemblable que les décès coup sur coup d’Alain et de Geoffroy, fils d’Alain VI, d’Alain VI lui-même, puis de Josselin, coûtèrent très chers au nouveau vicomte de Rohan car il fallut non seulement payer les droits de rachat au duc, soit un tiers de tous les revenus annuels de la maison de Rohan en Bretagne, mais aussi s’occuper des différents héritiers :
- un document étrange, qui semble confirmer l’hypothèse selon laquelle Josselin et Olivier de Rohan ne s’entendaient guère, en date du 9 janvier 1307, montre que Geoffroy d’Avaugour était l’héritier pour partie de Josselin, vicomte de Rohan. Il réclamait 125 livres. Olivier, nouveau vicomte de Rohan, lui accorda 75 livres de rente [131].
- Un autre document en date d’octobre 1307, toujours enregistré devant la cour ducale, révèle qu’Olivier II s’accorda avec la vicomtesse douairière Thomasse. Ce document fournit d’importants détails. Thomasse conservait en douaire la châtellenie de Corlay et la paroisse de Plusulien. L’assiette devait être estimée par Jean du Quelennec, Henri de Coëthuhan, tous deux chevaliers, maître Jean de Loudéac, Olivier de La Motte et Alain Conain. Thomasse devait avoir la moitié des acquisitions réalisées lors de son mariage. Elle pouvait rester à partir d’août dans la demeure ducale, afin de « tenir ses plaids », et cela pendant deux ans, avec ses gens, soit un chevalier et un alloué, Denise pour demoisselle, deux écuyers, soit Fauyt et un autre, Geoffroy Le Gentilhomme comme chambellan, Dom Guillaume des Noyers comme chapelain, le grand maître comme valet de chambre, Postel pour cuisinier, Aillet et Oignon pour charretiers. Elle devait encore obtenir 300 livres de rente payables en deux fois chaque année. Le vicomte devait payer toutes ses dettes. Sa sœur, Béatrix de Rohan, devait être en compagnie de sa mère depuis la Noël et pendant un an, avec Lorette, sa demoiselle, Henri de La Haye, son écuyer et Menguiot, son chambellan, et un palefrenier. Elle devait recevoir aussi 100 livres de rente. Le vicomte s’engagea à la marier au bout d’un an. Sa dot devait être estimée par le seigneur de Rochefort et Geoffroy d’Avaugour, ou à défaut par le duc de Bretagne lui-même. Béatrix aurait alors 50 livres de rente, les bois de Normandie, les bois de la châtellenie de Plusulien. Cette dot serait garantie sur les biens de Jean du Quelenec et de Pierre de Bodegat [132].
Cette succession complexe révèle l’immense fortune d’Alain VI qui était devenu un des plus grands seigneurs du duché de Bretagne. Sa fortune est typique de celle d’un grand seigneur car elle était composée de châteaux, de terres, de droits seigneuriaux en Bretagne, en Normandie et en Angleterre. Ses revenus dans le duché de Bretagne peuvent être estimés à environ 4 000 livres de revenus. Par comparaison, le duc de Bretagne retirait de son duché un revenu d’environ 20 000 livres. Comme tous seigneurs de son temps, Alain VI disposait de réserves en bijoux et en vaisselles d’argent, prêtes à partir à la fonte en cas de soucis et lui permettant de jouer un rôle de banquier auprès de ses vassaux connaissant des difficultés pécuniaires. Ces réserves étaient particulièrement abondantes. Comme le montre l’entourage que reçut sa veuve en douaire, cette fortune lui permettait aussi de disposer d’une domesticité abondante et hiérarchisée.
Ainsi, le long règne d’Alain VI, couvrant toute la moitié du XIIIe siècle, fut essentiel pour la maison de Rohan qui connut alors une double transformation. Tout d’abord, la structure de la fortune du vicomte de Rohan fut modifiée. Comme pour les autres membres de l’aristocratie anglo-normande, elle était composée de terres et de droits des deux côtés de La Manche. En choisissant le camp des Capétiens qui imposèrent l’un des leurs sur le trône breton, les vicomtes de Rohan durent faire un choix et décidèrent de rester dans la péninsule armoricaine. Ce fut à partir de ce moment, et grâce à des alliances matrimoniales particulièrement avantageuses, que les vicomtes de Rohan amplifièrent leur présence en Bretagne. Alain VI en fut le maître d’œuvre. Il hérita et augmenta les héritages lui venant de son père et de sa mère. Il utilisa son argent pour acheter de nouvelles terres et de nouveaux droits. Il usa de son influence auprès du duc de Bretagne afin de contraindre ses vassaux à lui céder des pans entiers de leurs patrimoines. Ces méthodes peuvent être qualifiées de peu recommandables. Il alla jusqu’à spolier ses neveux les Lanvaux ou les Avaugour. Il fut même excommunié pour ses pratiques [133].
Par ailleurs, ce fut Alain VI qui émancipa la maison de Rohan et en fit une entité politique cohérente. Sous ses prédécesseurs, mais aussi pendant une grande partie de son règne, l’influence du vicomte de Rohan dépendait de ses plus proches alliés et parents, les ducs de Bretagne. A partir de l’avènement de Jean II, Alain VI prit ses distances et, comme de nombreux autres membres de l’aristocratie bretonne, rechercha les moyens de s’opposer aux empiétements de l’administration ducale. Il se tourna alors vers le roi de France. Devenir seulement un grand seigneur, allié aux autres grandes familles bretonnes et non plus aux ducs de Bretagne de la maison de Dreux, permettait aux vicomtes de Rohan de connaître l’expansion rêvée par Alain VI et ses prédécesseurs. Toutefois, la présence ducale était devenue un obstacle à l’Est, à l’Ouest, au Nord et au Sud de la vicomté de Rohan. Les ducs de Bretagne de la maison de Dreux et leurs alliés et parents étaient bien trop puissants pour qu’Alain VI ou même son fils et héritier, Olivier puissent continuer l’expansion de la maison de Rohan. Il fallut la guerre de Succession de Bretagne (1341-1381) et les difficultés des ducs de Bretagne pour voir la maison de Rohan reprendre son expansion, reprendre le Guéméné-Guingamp, obtenir le fief ducal de La Roche-Moisan, intégrer tous les fiefs de la maison de Léon (en 1363) et une grande partie de ceux d’Olivier de Clisson, seigneur de Clisson et de Porhoët (mort en 1404).
[1] Thèse soutenue à l’Universtité de Lille III, le 12 janvier 2007, sous la direction conjointe du professeur Bertrand Schnerb, de l’université de Lille III, et du professeur Michael Jones, de l’université de Nottingham (U.K.).
[2] MORICE, Dom Hyacinthe, Mémoires pour servir de preuves à l’histoire ecclésiastique et civile de Bretagne, Paris, 1742-1746 (Dom MORICE, pr.)
[3] HALGOUET (H. du), La vicomté de Rohan et ses seigneurs, Saint-Brieuc, 1921
[4] Voir SEABOURNE (G.), « Eleanor of Brittany and her treatment by King John and Henry III », dans Nottingham Medieval Studies, 2007, vol. LI, p. 73-106
[5] Voir généalogies de Rohan
[6] GUILLOTEL (H.), « De la vicomté de Rennes à la vicomté de Porhoët (fin du Xe-milieu du XIIe siècle) », dans M.S.H.A.B., t. LXXII, 1995, p. 5-23
[7] HALGOUET, op. cit.,p. 10
[8] http://www.british-history.ac.uk/report.asp?compid=15503 (accès juin 2007).
[9] http://www.british-history.ac.uk/report.asp?compid=18826&strquery=rohan (accès juin 2007).
[10] Catalogue des actes de Philippe Auguste, par Léopold DELISLE, Paris, 1856, p. 229-230, n° 1000 A, original communiqué par A. de La Borderie en juin 1856.
[11] KERNEVEZ (P.) et MORVAN (F.) , « Généalogie des Hervé de Léon (vers 1180-1363) », dans B.S.A.F., t. CXXXI, 2002, p. 290-312.
[12] HOUTS (E. van) , « L’exil dans l’espace anglo-normand », dans La Normandie et l’Angleterre au Moyen Age, colloque de Cerisy-la-Salle (4-7 octobre 2003), Caen, 2003, p. 122-123
[13] Voir généalogie des Rohan
[14] Dom MORICE, pr., t. I, col. 1074-1075, copie de du Paz, français.
[15] http://www.british-history.ac.uk/report.asp?compid=56894, manoir de Ringwood (comté de Hampshire) ; http://www.british-history.ac.uk/report.asp?compid=1878, manoir de Cheveley (comté de Cambridge) (accès juin 2007).
[16] Voir POWER (D.), The Norman Frontier in the Twelfth and Thirteenth Centuries, Cambridge, 2004, p. 462-463.
[17] Dom MORICE, pr., t. I, col. 837 ; GESLIN de BOURGOGNE (J.) et BARTHELEMY (A. de), Les anciens évêchés de Bretagne. Histoire et monuments (A.E.), 6 vol., Paris, 1855-1879, t. IV, p. 71, n° XLV.
[18] Bibliothèque Municipale (Bibl. munic.) de Nantes, fonds Bizeul, 1691, n° 1, vidimus de Tanguy du Chastel, chevalier, garde de la prévôté de Paris, parchemin, 37 cm x 9, 7 cm ; Dom MORICE, pr., t. I, col. 846, d’après « Titres de Blain » ; LOBINEAU (G.-A.), Histoire de Bretagne (D.L., preuves), Preuves, Paris, 1707, t. II, col. 376.
[19] En 1225, Olivier, vicomte de Rohan, croisé, devant R., évêque de Cornouaille, et R., évêque de Nantes, attesta, que pour le salut de son âme, il avait donné à l’abbaye de Beauport ce que son frère, Geoffroy, jadis vicomte de Rohan, avait donné par testament, soit 20 quartiers de froment sur les moulins de Corlay. Il leurs donnait aussi sur la forêt de Quénécan tant en porcs qu’en jument et en nourriture ce qu’il avait en commun (Dom MORICE, pr., t. I, col. 856, d’après « Titres de Beauport »).
[20] En 1221, Eudes, fils de comte, concéda en héritage à Alain, vicomte de Rohan et à ses héritiers, pour le service d’Alain, la paroisse de Mohon, avec tous les usages et possessions dans la forêt de Lannoué, des bois verts et morts dans son domaine de Bodieuc, et un pacage de cent porcs et cent boeufs. Pierre, fils de Juhel, sénéchal de Bretagne, scella l’acte (Archives départementales du Morbihan (A.D.M)., fonds château de Kerguehennec, 20 J 7, original sur parchemin, observation : acte qui jadis était scellé de deux sceaux pendant « sigillo Petri filii Judicaëlis, seneschalli Britannae » ; A.E., t. VI, p. 164, n° LXXI, d’après un acte conservé dans les archives de M. de Janzé ; ROSENZWEIG (L.), Cartulaire général du Morbihan (Cartulaire Morb.), Vannes, 1893, p. 206, n° 254).
[21] Bibliothèque Nationale de France (B.N.F.), ms. français 22325, extraits de cartulaire de Bretagne, anciennement des Blancs-Manteaux, n° 41, p. 801 ; Bibl. munic. de Nantes, fonds Bizeul, n° 1689, fr. 1533, vidimus de 1251 et de 1253 = Dom MORICE ., pr., t. I, col. 871.
[22] Bibl. munic. de Nantes, fonds Bizeul, 1696, n° 1, vidimus des 14e et 15e siècles, parchemin, 15,8 cm x 7, 8 cm ; Dom MORICE, pr., t. I, col. 872, d’après « Titres de Blain ».
[23] Dom MORICE, pr., t. I, col. 869, d’après « Titres de Blain ».
[24] Bibl. munic. de Nantes, fonds Bizeul, 1691, n° 1, parchemin 14,5 cm x 5 cm, reste d’une simple queue ; Dom MORICE, pr., t. I, col. 870, d’après « Titres de Blain ».
[25] Comme il était trop jeune et n’avait pas encore de sceau, il fit placer celui de son père au bas de l’acte (Bibl. munic. de Nantes, fonds Bizeul, 1691, n° 2, observation : vidimus du 9 avril 1395 délivré par la sénéchaussée de Ploërmel à partir d’un autre vidimus de Jean Ier le Roux d’avril 1254 ou 1255, parchemin, 31 cm x 17 cm, reste de deux double queues de parchemin ; B.N.F., fonds français 22325, « titres de Blain », p. 865-866, copie ; B.N.F., ms. français 22325, p. 865, copie ; Cartulaire du Morbihan, op. cit., p. 214-215, n° 262).
[26] Dom MORICE, pr., t. I, col. 878, d’après « Titres de Bon Repos ».
[27] Voir JONES (M. ), « Notes sur quelques familles bretonnes en Angleterre après la conquête normande », dans M.S.H.A.B., 1981, t. LVIII, p. 73-97.
[28] Bibl. munic. de Nantes, fonds Bizeul, 1691, n° 1, parchemin, 12, 8 cm x 8 cm, reste d’une double queue ; Dom MORICE, pr., t. I, col. 832, d’après « Titres de Blain ».
[29] Dom MORICE, pr., t. I, col. 889.
[30] En 1235, Josselin de Rohan, seigneur de Montfort et de Noyal, ratifia la donation par son épouse, Mathilde, à l’abbaye de Bon Repos de ses dîmes sur la terre dite Kereven-Hubert (Dom MORICE, pr., t. I, col. 893, d’après « Titres de Bon Repos »). En janvier 1240 (nouveau style), Josselin de Rohan, seigneur de Montfort, avec l’accord de son épouse, Mathilde, confirma la donation par les anciens seigneurs de Montfort au prieuré Saint-Nicolas de Montfort de son usage dans la forêt de Collon, soit les bois morts pour le four et les bois vivants pour la réparation des clôtures (Dom MORICE, pr., t. I, col. 913, d’après « Titres de Saint-Melaine »).
[31] B.N.F., ms. français 22319, château de Vitré, p. 147-148 ; Dom MORICE, pr., t. I, col. 903, publication partielle ; LA BORDERIE (A.), « Recueil d’actes inédits des ducs et princes de Bretagne, XIe, XIIe, XIIIe siècles », dans Bulletin et mémoire de la société archéologique du département d’Ile-et-Vilaine, t. XIX, 1889, n° 108.
[32] B.N.F., fonds français 22330, p. 38 et Dom MORICE, pr., t. I, col. 910.
[33] B.N.F., fonds français 22330, p. 23 ; Archives départementales d’Ile-et-Vilaine (A.D.I.V.), fonds Hévin, dossier 53, p. 5 ; Dom MORICE, pr., t. I, col. 912-913, d’après « Cartulaire d’Alençon » ; Cartulaire du Morbihan, op. cit., p. 221, n° 272.
[34] B.N.F., fonds français 22330, p. 25 ; Dom MORICE, pr., t. I, col. 916. ; Cartulaire de la seigneurie de Fougères, connu sous le nom de Cartulaire d’Alençon (Cartulaire d’Alençon), éd. J. Aubergé, Rennes, 1913, p. 170-171, acte n° XLV.
[35] B.N.F., fonds français 22330, p. 27 ; Dom MORICE, pr., t. I, col. 919-920 ; A.D.I.V., fonds Hévin, dossier 53, p. 7 ; Cartulaire d’Alençon, op. cit., p. 172-174, acte n° XLVIII.
[36] A.D.M., fonds de Rohan-Chabot, parchemin scellé de cinq sceaux sur double queue ; A.D.M., 1 E 1471 ; A.D.I.V., fonds Hévin, dossier 53, p. 12 ; B.N.F., fonds français 22330, p. 29 ; Dom MORICE, pr., t. I, col. 933-935 ; Cartulaire du Morbihan, op. cit., p. 223-226, n° 275 ; Cartulaire d’Alençon, op. cit., p. 175-178, acte n° XLIX.
[37] 1251, 17 octobre, acte par lequel Josselin de Rohan reconnaît avoir reçu du vicomte de Rohan la terre de Noyal Pontivy (A.D.M., fonds du château de Kerguehennec, 20 J 7 ; Cartulaire du Morbihan, op. cit., n° 279).
[38] Dom MORICE, pr., t. I, col. 956
[39] Bibl. munic. de Nantes, fonds Bizeul, vidimus du 3 avril 1394
[40] B.N.F., ms. français 22325, p. 824, copie ; Dom MORICE, pr., t. I, col. 961-962, titre de Blain
[41] Dom MORICE, pr., t. I, col. 962-963, titre de Kercado
[42] Dom MORICE, pr., t. I, col. 968-970, copie de l’original, titres de Kercado.
[43] Bibl. munic. de Nantes, fonds Bizeul, 1692, n° 1, parchemin 25, 3 cm x 11 cm ; B.N.F., fonds français 22325, « titres de Blain », p. 878, copie.
[44] A.D.M., fonds château de Kerguehennec, 20 J 7 ; Dom MORICE, pr., t. I, col. 1081 ; Cartulaire du Morbihan, op. cit., p. 270, n° 335.
[45] Voir Généalogie des Lanvaux.
[46] Bibl. munic. de Nantes, fonds Bizeul, n° 1701, 1545 ; Dom MORICE, Pr., t. I, col. 862-863 ; Cartulaire du Morbihan, op. cit., n° 259. Un vidimus d’Alain de Lanvaux, seigneur et chevalier, daté du 22 juillet 1257, confirme les lettres de son père, Geoffroy (datées de 1228) et de Geoffroy de Lanvaux, son fils, au vicomte de Rohan, portant sur l’accord relatif à diverses possessions, dont le droit de manger, pour les seigneurs de Lanvaux au manoir de Borgeil (Cartulaire Morbihan, op. cit., p. 243-244, n° 297).
[47] POCQUET DU HAUT-JUSSE (B.-A.) et LA BORDERIE (A. de), Histoire de la Bretagne, 6 vol., Rennes-Paris,1896-1914, nle.éd., Mayenne, 1975, t. III, , p. 343, note 4.
[48] A.D.L.A., E. 176, n° 13 ; Dom MORICE, Histoire, op. cit., t. I, col. 171 ; ARCHER (J.), Une analyse du développement des pouvoirs des ducs de Bretagne auprès de leurs vassaux (1203-1305), Mémoire de maîtrise, Rennes, 1996, p. 95, note 35.
[49] POCQUET DU HAUT-JUSSE (B.-A.), « Le plus ancien rôle des comptes du duché, 1262 », dans M.S.H.A.B., 1946, p. 49-68.
[50] Archer, op. cit., p. 95, n° 15
[51] Lettres d’Hervé de Léon datées de septembre 1260 (Bibl. munic. de Nantes, fonds Bizeul, 1691, n° 3 ; B.N.F., fonds français 22325, « titres de Blain », p. 871 ; Dom MORICE, Pr., t. I, col. 979-980).
[52] Cartulaire du Morbihan, op. cit., p. 242-243, n° 297.
[53] Cartulaire du Morbihan, op. cit., p. 269, n° 332, Archives de Kerguehennec, acte non trouvé dans A.D.M., archives de Kerguehennec.
[54] A.D.M., fonds château de Kerguehennec, 20 H 7 ; Cartulaire du Morbihan, op. cit., p. 271-273, n° 339.
[55] Cartulaire du Morbihan, op. cit., p. 273-275, n° 340.
[56] Dom MORICE, pr., t. I, col. 1008
[57] Dom MORICE, pr., t. I, col. 1007
[58] Bibl. munic. de Nantes, fonds Bizeul, 1691, n° 4, original scellé, parchemin, 15, 2 cm x 7, 8 cm : « A touz celz que cestes presentes letres verront ou orront, Jahan, duc de Bretaigne, saluz en nostre segnour. Sachent nostre feal e nostré amé ait empris guerre contre Gefrey de lanvax, chevalier, pour nous, lequel Gefrey nous guerreyot, nous avons graer et octroyé à celui Alen, visconte, que nous ne noz ers ne feront pez o celui Gefreyn ne à ses eers sans la sentement et senz la volenté audit visconte ou asses ers. Ce fut doné à Venes le jour de samedi apres la Sainte Croix de setembre en l’an nostre segnour m. cclxxii ». Voir encore Dom MORICE, pr., t. I, col. 1027 ; Cartulaire du Morbihan, op. cit., p. 286, n° 352 d’après A.D.M., fonds du château de Kerguehennec mais non trouvé aux A.D.M.
[59] Dom MORICE, pr., t. I, col. 1030 ; Cartulaire du Morbihan, op. cit., p. 286-287, n° 353 d’après A.D.M., fonds du château de Kerguehennec mais non trouvé aux A.D.M.
[60] Dom MORICE, pr., t. I, col. 1032-1033 ; Cartulaire du Morbihan, op. cit., p. 289-290, n° 356 d’après A.D.M., fonds du château de Kerguehennec mais non trouvé aux A.D.M.
[61] Dom MORICE, pr., t. I, col. 1025 ; A.E., t. IV, p. 248, n° II, abbaye de Lantenac.
[62] Dom MORICE, pr., t. I, col. 1024-1025, Blain
[63] Dom MORICE, pr., t. I, col. 1024-1025, Blain
[64] Dom MORICE, pr., t. I, col. 1026, Blain ; Cartulaire du Morbihan, op. cit., p. 282, n° 347.
[65] Dom MORICE, pr., t. I, col. 1028, Blain ; Cartulaire du Morbihan, op. cit., p. 285, n° 350.
[66] Bibl. munic. de Nantes, fonds Bizeul, n° 1697, fr. 1541 ; B.N.F., fonds français 22325, « titres de Blain », p. 884.
[67] Dom MORICE, pr., t. I, col. 1040, Blain.
[68] Bibl. munic. de Nantes, fonds Bizeul, n° 1697, fr. 1541 ; B.N.F., fonds français 22325, « titres de Blain », p. 861 ; Dom MORICE, pr., t. I, col. 982.
[69] Dom MORICE, pr., t. I, col. 1049, Blain.
[70] Cartulaire du Morbihan, op. cit., p. 303-304, n° 378.
[71] B.N.F., fonds français 22 337, copie sur parchemin, titre de Blain ; Cartulaire du Morbihan, op. cit., p. 337-338, n° 413.
[72] Bibl. munic. de Nantes, fonds Bizeul, n° 1695, fr. 1539 ; Cartulaire du Morbihan, op. cit., p. 341-342, n° 417.
[73] Dom MORICE, pr., t. I, col. 1082, Blain.
[74] Bibl. munic. de Nantes, fonds Bizeul, n° 1701, fr. 1545 ; Cartulaire du Morbihan, op. cit., p. 365-366, n° 441.
[75] Cartulaire du Morbihan, op. cit., p. 302, n° 376 ; Dom MORICE, pr., t. I, col. 1045, Blain.
[76] Dom MORICE, pr., t. I, col. 1069, Blain.
[77] Dom MORICE, pr., t. I, col. 1073-1074, Blain.
[78] Dom MORICE, pr., t. I, col. 1073, Blain.
[79] Dom MORICE, pr., t. I, col. 1078, Blain.
[80] Bibl. munic. de Nantes, fonds Bizeul, n° 1701, fr. 1545.
[81] Cartulaire du Morbihan, op. cit., p. 337, n° 412.
[82] Dom MORICE, pr., t. I, col. 1098, Blain.
[83] Dom MORICE, pr., t. I, col. 1109, Blain.
[84] Dom MORICE, pr., t. I, col. 1109-1110, Blain.
[85] MORVAN (F.), « Le Livre des Ostz (1294). Un éclairage sur les rapports du duc avec la noblesse bretonne à la fin du XIIIe siècle », dans Jean Kerhervé, Noblesses de Bretagne du Moyen Age à nos jours, Rennes, 1999, p. 37-89.
[86] HALGOUET, La vicomté de Rohan... p. 95-97. Trois documents permettent de connaître l’importance de la vicomté au XVe siècle : les dénombrements effectués à la mort d’Alain IX pour le rachat de ses terres en 1461 (archives du château des Forges de Lanouée), un aveu de 1471 rendu par Tristan du Perrier, alors tuteur de Jean II (Chambre des Comptes de Bretagne. Loire-Atlantique, B 1982) et enfin un Mémoire pour la préséance aux Etats de 1479. Le Rohan se trouve divisé, dans l’aveu de 1471, en trois membres : la vicomté proprement dite ou seigneurie de Rohan, la châtellenie de Goarec et la seigneurie de Corlay. La seigneurie de Rohan comprenait 51 paroisses ou trêves : Mûr et ses trêves de Saint-Guen et de Saint-Connec, Saint-Caradec, Saint-Gonneri, Croixanvec, Neuillac et ses trêves de Kergrist et de Hémonstoir, Cleguerec (partie sud), Seglien (moins la trêve de Lichernin ou Lescharlin qui était en Guémené), Malguenac et sa trêve de Stival, Guern et ses trêves de Lomeltro et de Saint-Michel, Pontivy et Cohazé, Noyal-Pontivy et ses trêves de Saint-Geran, de Gueltas, de Kerfourn et de Saint-Thuriau, Saint-Gouvry, Saint-Samson (les villages les plus rapprochés de Rohan), Rohan, Crédin, Pleugriffet, Reguini, Radenac et sa trêve de Saint-Fiacre, Naizin, Moustoir, Remungol, Plumeliau et sa trêve de Saint-Nicolas-des-Eaux, Bieuzi et sa trêve de Castennec, Melrand, Baud, Guenin, Remungol, Moréac et sa trêve de Millerou, Locminé, Saint-Allouestre et sa trêve de Buléon, Bignan, Saint-Jean-Brevelay (partie nord), Moustoirac, Plumelin, Camors. La châtellenie de Goarec ou de Gouarec s’étendait sur 13 paroisses ou trêves : Plourai, Mellionnec, Plouguernevel (en partie) et ses trêves de Saint-Gilles et Gouarec, Pellan ou Plélauff, Lescouet (en partie), Silfiac (en partie) et ses trêves de Penret ou Perret, Cleguerec (partie nord) et ses trêves de Sainte-Brigitte et Saint-Aignan, Saint-Caradec-Tregomel, enclavé dans le Guémené.
[87] FLOQUET (C.), Châteaux et manoirs bretons des Rohans, Loudéac, 1989, p. 71.
[88] Voir la liste fournie HALGOUET, La vicomté de Rohan, op. cit., p. 14
[89] HALGOUET, La vicomté de Rohan..., op. cit., p. 97 : La seigneurie de Corlé ou de Corlay comprenait 12 paroisses ou trêves : Corlay, Saint-Martin-des-Près, Merléac et sa trêve de Le Quilio, Saint-Mayeuc et ses trêves de Saint-Gilles-Vieux-Marché et de Caurel, Laniscat et ses trêves de Saint-Guelven, de Rosquelfen et de Saint-Igeau, Plussulien . Dès le XIIe siècle, Corlay et Mûr ne firent qu’un seul fief avec deux seigneuries distinctes. Celle du Mûr appartient à la maison du même nom, dont Cadoret de Mûr, attesté en 1184, fut l’ancêtre de la maison de La Rivière-Mûr. Celle de Corlay était plus étendue et occupait un massif accidenté servant de noeud aux trois principales chaînes bretonnes, le Mené, l’Arhès et les Montagnes Noires. Elle avait pour élément principal la forêt de Poulancre formant avec les bois de Mûr, de Caurel, du Quelenec, du Roz, une masse forestière presque ininterrompue. La forteresse de Corlay se situait près du point de jonction des deux vallées de Gourveaux et de La Martyre, dont les eaux descendent au Blavet par un défilé rocheux. Elle aurait été détruite par le feu après l’avènement d’Alain Fergent et n’aurait pas été reconstruite. M. de Keranflec’h en découvert les vestiges à Saint-Gilles-Vieux-Marché. En 1198, les Rohan décidèrent d’édifier à Corlay, semble-t-il, un nouveau château, ne laissant que les ruines de la forteresse primitive (op. cit., p. 11). La seigneurie proprement dite de Corlay était constituée des paroisses qui ont invariablement formé son territoire : Corlay avec une partie de Haut-Corlay, Plussulien, Laniscat comprenant Rosquelven, Saint-Gelven, et Saint-Igneaus, ses trêves, Saint-Martin-des-Près, Merléac avec Saint-Léon et le Quillio sa trêve, localités citées dans les fondations de l’abbaye de Bon-Repos (op. cit., p. 12).
[90] Quatre paroisses : Noyal, Saint Gonnery, Melrand, Remungol, Moréac.
[91] HALGOUET, La vicomté de Rohan.., op. cit., .p. 2 ; TONNERRE (N.-Y.), Naissance de la Bretagne, Géographie historique et structures sociales de la Bretagne méridionale (Nantais et Vannetais) de la fin du VIIIe siècle à la fin du XIIe siècle, Angers, 1994, p. 512 : « le château de Castennec est situé sur un éperon, autour duquel le Blavet fait un méandre orienté nord-sud et le long de 900 mètres, il culmine à 75 mètres, soit 40 mètres au dessus du Blavet » ; LE MENE (J.-M.), Histoire du diocèse de Vannes, , op. cit., t. I, p. 67 : « Castennec est formé d’une enceinte triangulaire, d’un large fossé bordé d’un talus et de trois à quatre tertres. Naguère, il possédait une tour carrée protégée par une nouvelle douve. Il appartenait à l’origine aux vicomtes de Porhoët » ; FLOQUET, op. cit., p. 66 : Il construit au XIe siècle sur le site ancien de Sulis ou Sulim ; PESNEL (L.), Les mottes castrales et les enceintes circulaires du Morbihan occidental, XIe-XIIIe siècle, mémoire de maîtrise, Brest, 1993, p. 181 : « Il se situe au lieu-dit la Couarde. Sur un éperon aux pentes abruptes se dresse les restes d’une tour carrée sous un amas de ruines, contrôlant le goulet d’un éperon barré ».
[92] FLOQUET, op. cit., p. 71 ; LE MENE, Histoire... du diocèse de Vannes, op. cit., t. II, p. 324 : « Il est construit en 1127 (Dom MORICE, pr., t. I, col. 554) et détruit par les Anglais en 1342 »
[93] TONNERRE, op. cit., p. 512 : Rohan est une paroisse récente, datant de 1387 et minuscule, à peine 50 hectares
[94] HALGOUET, La vicomté de Rohan..., op. cit., p. 13 : La seigneurie de Gowarec ou Gouarec dépendait certainement de Corlay, fixée sur le territoire de Plouguernevel, en la trêve de Saint-Gilles et se situait au confluent du Sullon et du Blavet. Les Rohan en firent une châtellenie en 1280. Selon Ogée, il existait à Gouarec, en 1400 « un ancien château », confirmé par l’aveu de 1471 : « apparence de ville (forte) ... et de grandes douves »
[95] LE MENE, Histoire... du diocèse de Vannes, op. cit., t. I, p. 173 et p. 357 : « le château des Salles en Sainte-Brigitte fut construit au XIe siècle par les vicomtes de Porhoët et appartint vers 1116 aux Rohan ».
[96] HALGOUET, La vicomté de Rohan..., op. cit., p. 109-110 : la résidence des vicomtes de Rohan dans la châtellenie de Gouarec était le manoir de Penret, appelé aussi les Salles de Penret, à la lisière de la forêt de Quénécan, et sur les bords d’un vaste étang. Situé en Sainte-Marguerite, il a été édifié à l’emplacement d’une villa gallo-romaine. Vraisemblablement, les Rohan s’établirent en ce lieu dès le début de leur occupation, attirés, comme à Castel-Noec, par les vestiges d’une occupation ancienne. Une donation datant de 1232 en faveur de l’abbaye de Bon-Repos est signée à Penret (LE MENE, op. cit., t. I, p. 125).
[97] FLOQUET, op. cit., p. 108 et 333 : le château de la Salle en Pontivy était ruiné depuis 130 ans selon le mémoire de Jean II de Rohan. POTIER DE COURCY (P.), Nobiliaire et armorial de Bretagne, 2 vol., Mayenne, 1ere édition, 1846, 7e édition, 1993, t. I, p. 498 : les Rohan sont les seigneurs immédiats de Pontivy en Gohazé.
[98] FLOQUET, op. cit., p. 341.
[99] HALGOUET, La vicomté de Rohan..., op. cit., p. 23
[100] LE MENE, Histoire... du diocèse de Vannes, , op. cit., t. II, p. 108 : Alain VI l’avait en 1284, alors que les Lanvaux en étaient les seigneurs encore en 1260. FLOQUET, op. cit., p. 164 : le château fut rasé au XVIe siècle.
[101] LE MENE, Histoire... du diocèse de Vannes, , op. cit., t. II, p. 208 : « près de Lanvaux, en Pluvigner (paroisse contenant de nombreuses mottes féodales) se situe une énorme motte nommée Coh Castel (le vieux château). En 1238, elle appartient au duc, puis vers 1250 à l’abbaye de Lanvaux et vers 1283 à la collégiale de Saint-Michel. Le duc abandonnait-il cette importante place-forte à des institutions ecclésiastiques car il n’était pas sûr de son droit ? Les Lanvaux le réclament peut-être encore en 1294 ? FLOQUET, op. cit., p. 375 : le château de Lanvaux est attesté dès 1138 ».
[102] Locmalo, Lignol, Priziac, Ploerdut et Langoëlan.
[103] HALGOUET, La vicomté de Rohan..., op. cit., p. 35 : il se situe sur un monticule au confluent de l’Ellé et de la petite rivière du Pont-Rouge, à moins de trois kilomètres au sud-est du Faouet. Periou, fils de Benoît, comte de Cornouaille au XIe siècle semble avoir donné son nom à ce château. Le château de Cravial, en Lignol, au sud de Guémené, s’abritait derrière un coude du Scorff. Ces deux dépendances du Kémenet-Guégant donnaient à ce fief une grande extension sur les paroisses de Locmalo, Lignol, Priziac, Ploerdut et Langoëlan. FLOQUET, op. cit., p. 86 : « la première motte de Guéméné était surmontée d’un donjon carré en bois, construit au début du XIe siècle par Guingant, neveu du comte de Cornouaille. Au XIIe siècle, le château fut remanié ».
[104] FLOQUET, op. cit., p. 262 : Cravial est connu dès 1251 sur le coude du Scorff. PESNEL, op. cit., p. 205 : Il est constitué d’une motte de 30 mètres de diamètre à la base et de 5 mètres de hauteur.
[105] B.N.F., P.O. 730, Chemillé, n° 3 ; Bibl. munic. de Nantes, fonds Bizeul, n° 1701, fr. 1545 ; B.N.F., fonds français 22325, « titres de Blain », p. 842 ; Dom MORICE, pr., t. I, col. 1072.
[106] Bibl. munic. de Nantes, fonds Bizeul, n° 1705, fr. 1549 ; B.N.F., fonds français 22325, « titres de Blain », p. 884, copie.
[107] Cartulaire du Morbihan, op. cit., p. 331, n° 405.
[108] Dom MORICE, pr., t. I, col. 1075, Blain.
[109] Bibl. munic. de Nantes, fonds Bizeul, n° 1703, fr. 1552, original sur parchemin ; Dom MORICE, pr., t. I, col. 1096-1097, Blain ; Cartulaire du Morbihan, op. cit., p. 351-354, n° 430.
[110] Bibl. munic. de Nantes, fonds Bizeul ; Dom MORICE, pr., t. I, col. 1090-1091, titre de Kercado, français.
[111] Bibl. munic. de Nantes, fonds Bizeul, 1687, n° 1, parchemin 22, 5 cm x 25 cm, mutilé, deux sceaux sur double queue de parchemin, l’un de cire verte représentant l’écu de Dreux-Bretagne ; l’autre de cire brun du vicomte de Rohan, soit un cavalier armé d’un écu et brandissant une épée, en contre-sceau l’écu au 7 macles des Rohan ; Dom MORICE, pr., t. I, col. 1084 ; Cartulaire du Morbihan, op. cit., p. 344, n° 420.
[112] Dom MORICE, pr., t. I, col. 1085, Blain.
[113] A.D.M., fonds du château de Kerguehennec, 20 J 7 ; Dom MORICE, pr., t. I, col. 1129-1131, grand sceau équestre du duc, Blain ; Cartulaire du Morbihan, op. cit., p. 369-370, n° 446.
[114] A.D.M., fonds du château de Kerguehennec, 20 J 7, titres généraux ; Cartulaire du Morbihan, op. cit., p. 371, n° 447.
[115] Bibl. munic. de Nantes, fonds Bizeul, 1695, n° 1, parchemin, 25 cm x 21 cm, jadis scellé sur une double queue de parchemin, en français, très lisible ; Cartulaire du Morbihan, op. cit., n° 417 et Dom MORICE, pr., t. I, col. 1084-1085.
[116] Bibl. munic. de Nantes, fonds Bizeul, 1683, n° 1, reste 7 double queues de parchemin, français, 36, 5 cm x 30 cm ; Dom MORICE, pr., t. I, col. 1063.
[117] Hervé de Léon scella l’acte. Monsieur Olivier de Kergournadec’h scella l’acte pour Jeanne de Rohan. Au dos, sont présents : monsieur Alain de Rohan, monsieur Prigent de Coëtivy, monsieur Hervé du Bois de La Roche, monsieur Thibaud de La Feuillée, monsieur Olivier de Kergournadech, monsieur Thomas de Chemillé, monsieur Guillaume Le Noir, monsieur Geoffroy de Guernhapin, Salomon Nuz, Alain du Parc, Robert, son frère, Alain Destuer, Geoffroy de Brehant, Perrot de Bodegat, Alain Benerven, Jean de Quercoët, Guillaumet de Borquetel, Guillaume de Kerexaudi (B.N.F., ms. français 22325, extraits de cartulaire de Bretagne, anciennement des Blancs-Manteaux, n° 41, p. 803 ; Dom MORICE, pr., t. I, col. 1087-1089, sceau de Hervé de Léon : lion rampant avec une bordure d’annelets ; sceau d’Olivier de Kergournadec’h : échiqueté et chargé d’un lambelle de cinq pièces).
[118] Dom MORICE, pr., t. I, col. 1118-1120, Blain.
[119] Voir arbre généalogique.
[120] Sceau d’Alain de Rohan : un homme armé à cheval, épée en la main droite et écu en la gauche, chargé de sept macles, cheval maclé. Un autre sceau rompu où un cavalier avec un écu chargé de billettes et d’un cheval couvert de billettes (Dom MORICE, pr., t. I, col. 1132-1133).
[121] Sceau entier d’Alain en cavalier (Bibl. munic. de Nantes, fonds Bizeul, n° 1702, fr. 1546, original scellé ; B.N.F., fonds français 22325, « titres de Blain », p. 884, copie ; Dom MORICE, pr., t. I, col. 1133-1134, Blain).
[122] Dom MORICE, pr., t. I, col. 1135-1136, sceau du vicomte de Rohan équestre et armé et cinq sceaux : Conen, Fresne, Chemillé et Beaumanoir, français.
[123] A.D.L.A, E 151, n° 7 ; Dom MORICE, pr., t. I, col. 1134.
[124] Dom MORICE, pr., t. I, col. 1136, Blain ; Bibl. munic. de Nantes, fonds Bizeul, n° 1708, fr. 1552.
[125] Bibl. munic. de Nantes, fonds Bizeul, n° 1689, fr. 1533, original scellé de 21 sceaux ; Dom MORICE, pr., t. I, col. 1136, d’après « Titres de Bain ».
[126] Bibl. munic. de Nantes, fonds Bizeul, n° 1705, fr. 1549 ; B.N.F., fonds français 22325, « titres de Blain », p. 834 ; A.D.M., fonds du château de Kerguehennec, 20 J 7 ; Dom MORICE, pr., t. I, col. 1138 ; Cartulaire du Morbihan, op. cit., n° 449.
[127] Dom MORICE, pr., t. I, col. 1180 ; ANGOT (A.), Généalogies féodales mayennaises du XIe au XIIIe siècle, Laval, 1942, p. 627.
[128] B.N.F., fonds français 22325, « titres de Blain », p. 834 ; Bibl. munic. de Nantes, fonds Bizeul, n° 1702, fr. 1546 ; Dom MORICE, pr., t. I, col. 1181-1182, « pris sur l’original au château de Blain ».
[129] Bibl. munic. de Nantes, fonds Bizeul, 1695, n° 4 a, parchemin 19 cm x 11, 5 cm ; Dom MORICE, pr., t. I, col. 1201.
[130] B.N.F., ms. français 22338, fol. 12 ; Dom MORICE, pr., t. I, col. 1208-1209, « Titre de Blain ».
[131] Dom MORICE, pr., t. I, col. 1209-1211.
[132] Bibl. munic. de Nantes, fonds Bizeul, 1683, n° 2, parchemin 49 cm x 23 cm, reste de trois double queues de parchemin dont l’un porte les armes de Bretagne ; B.N.F., ms. français 22325, p. 793 ; Dom MORICE, pr., t. I, col. 1214-1216, d’après « Titre de Blain ».
[133] En juin 1258, le pape Alexandre IV fit savoir aux officiers de l’évêché d’Avranches qu’Alain, vicomte de Rohan, chevalier, et ses alliés laïcs des évêchés de Saint-Brieuc, de Tréguier et d’Avranches, pour avoir molesté les religieux de l’abbaye de Beauport, sur la question des dîmes, excommuniait le vicomte et décidait d’une sentence d’interdit sur ces biens (A.D.C.A., H 38, abbaye de Beauport, titres généraux ; A.E., t. IV, p. 150, n° CCXXXVII, abbaye de Beauport).