Tudchentil

Les sources sur les gentilshommes bretons

L'histoire de Keroulas

Du Moyen Âge à nos jours

Par la famille de Keroulas.

Depuis le Moyen-Âge, le berceau de la famille de Keroulas se trouve au manoir de Keroulas à Brélès, en Pays de Léon. Plus de 6 siècles et près de 20 générations plus tard, cette belle demeure du XVIIe siècle est toujours la résidence de descendants de la famille.

Le manoir de Keroulas conserve de précieuses archives dont les plus anciennes datent de la fin des années 1300. Elles ont permis de remonter aux périodes les plus reculées de l’histoire familiale.

Le nom de famille de Keroulas s’est éteint en Pays de Léon au XVIIIe siècle. Les Keroulas d’aujourd’hui descendent de Ronan Mathurin de Keroulas (1730-1810) qui s’installe vers 1764 au manoir de Tal ar Roz au Juch près de Douarnenez. Sa nombreuse postérité estimée à plus de 5.000 personnes a surtout essaimé au Juch et dans les communes environnantes.

Ce beau livre illustré, travail collectif de plusieurs enfants de la famille, vous invite à plonger dans la destinée des Keroulas, à suivre son évolution au fil des siècles et à découvrir de nombreux épisodes parfois très surprenants.

Le livre est en vente chez l’éditeur aux éditions Récits au prix de 35 €.

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Vue de Morlaix et de l'église Saint-Martin (XVIIIe-XIXe.)
Photo A. de la Pinsonnais (2009).

Généalogie des Hervé de Léon (vers 1180 – 1363)

Lundi 29 septembre 2008, par Patrick Kernévez, Frédéric Morvan.

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Catégories de l'article

Source

Bulletin de la Société Archéologique du Finistère, t. CXXXI, 2002, p. 279-312.

Citer cet article

Frédéric Morvan, Patrick Kernévez, Généalogie des Hervé de Léon (vers 1180 – 1363), 2008, en ligne sur Tudchentil.org, consulté le 8 octobre 2024,
www.tudchentil.org/spip.php?article547.

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Généalogie des Hervé de Léon (vers 1180 – 1363)
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Le lignage des vicomtes de Léon est attesté dès le premier quart du XIe siècle. Il fut l’un des plus importants de Basse-Bretagne au Moyen Âge. À leur apogée, au milieu du XIIe siècle, ces vicomtes détenaient la totalité du Léon et des domaines en Cornouaille et en Trégor. A. de La Borderie fit d’eux les champions de l’indépendance bretonne, face à la mainmise Plantegenêt sur la Bretagne, dans la seconde moitié du XIIe siècle. H. Guillotel a montré depuis que cette puissante maison tentait avant tout d’échapper à la tutelle ducale. Après plusieurs révoltes, Guyomarch IV de Léon fut obligé de se soumettre, avant de décéder en 1179. Ses deux fils, Guyomarch et Hervé, ne parvinrent à récupérer leur héritage qu’au prix de la confiscation de Morlaix par Geoffroy Plantegenêt, duc de Bretagne, et de la scission des domaines patrimoniaux. L’aîné, Guyomarch, reçut les riches terres du littoral avec Lesneven, Brest, Saint-Renan et Le Conquet. Il continua la tige des vicomtes de Léon qui devait s’éteindre à la fin du XIIIe siècle, après avoir été dépossédée par le duc Jean Ier le Roux. Hervé de Léon, frère cadet et vassal de Guyomarch, reçut Landerneau, Landivisiau, Coatméal et des terres en Cornouaille, notamment les seigneuries de Daoulas, Crozon, Porzay et Quéménet. Grâce à une habile politique matrimoniale, ses successeurs y ajoutèrent hors de Bretagne, au XIIIe siècle, les seigneuries de Châteauneuf-en-Thymerais, dans le Perche (Eure-et-Loir), Noyon-sur-Andelle (aujourd’hui Charleval dans l’Eure), en Normandie, et Frémerville, en Picardie. C’est l’histoire de cette branche cadette de la maison vicomtale de Léon, dite des seigneurs de Léon, entre 1180 et son extinction en 1363, que nous allons évoquer dans les pages qui suivent.

L’histoire du lignage des vicomtes de Léon a été partiellement racontée par G.-A. Lobineau et H. Morice à partir des rares actes conservés pour les XIe et XIIe siècles et des chroniques de ce temps. Elle a été complétée à la fin du XIXe siècle par A. de La Borderie qui s’est notamment intéressé à l’extinction de la branche aînée des vicomtes de Léon, ruinée par les ducs de Bretagne au XIIIe siècle et, plus récemment, par H. Guillotel et A.-Y. Bourgès. Quelques tableaux généalogiques des vicomtes et comtes de Léon ont été publiés, notamment par H. Morice dont les travaux ont été exploités par L. Urvoy de Portzamparc, auteur d’une histoire des vicomtes de Léon en 1900. Il avait été précédé par A. de Blois qui rédigea la notice sur le lignage de Léon parue dans la Biographie bretonne de P. Levot, au milieu du XIXe siècle. Ces deux généalogies, quoique assez complètes, présentent l’inconvénient de ne pas comporter de références infrapaginales. Elles établissent également certaines filiations suspectes qu’il y a lieu de corriger, tant certains lignages essayèrent plus tard de se rattacher à cette prestigieuse maison.

Les sources dont nous disposons pour écrire l’histoire de la maison de Léon sont très fragmentaires. Les archives de cette maison ont été réunies à celles des Rohan, après l’extinction de la branche cadette, en 1363. Conservées à Blain, elles ont, pour l’essentiel, été détruites lors de la Révolution, en 1793. Seules quelques liasses ont été préservées. Elles sont aujourd’hui conservées à la médiathèque de Nantes, entre autres les testaments d’Hervé VII et Hervé VIII de Léon. Un certain nombre de ces pièces ont été publiées au XVIIIe siècle par les bénédictins G.-A. Lobineau et H. Morice. Beaucoup sont perdues ou uniquement collationnées sous forme de copies, notamment à la Bibliothèque nationale. Les cartulaires des abbayes de Saint-Mathieu, Daoulas et Le Relec ont disparu. Quelques documents nécrologiques, comme ceux de Daoulas, complètent utilement notre documentation. Les chroniques nous apportent quelques informations relatives à la participation des seigneurs de Léon aux croisades, aux révoltes contre les Plantegenêts dans la seconde moitié du XIIe siècle ou encore durant la guerre de Succession de Bretagne au XIVe siècle. A. de La Borderie a également répertorié et utilisé les actes relatifs à l’acquisition des terres des vicomtes de la branche aînée de Léon par les ducs au XIIIe siècle. C’est uniquement à cette période que la documentation devient plus abondante et que nous conservons des actes originaux instrumentés par les seigneurs de Léon eux-mêmes. Il s’agit notamment d’accords intervenus lors de litiges, quelques contrats de mariage, des partages successoraux et des donations pieuses.

Hervé Ier de Léon, fondateur de la branche cadette, a eu deux ancêtres prestigieux : son grand-père, le comte Hervé II, et son père, Guyomarch IV, vicomte de Léon. Hervé II participe aux rivalités politiques en Angleterre. Il obtient le titre de comte du roi d’Angleterre Étienne de Blois, lors de sa lutte pour la succession d’Henri Ier Beauclerc. Étienne lui confie la garde du château de Devizes, chef-lieu du comté de Wiltshire, mais Hervé est chassé de ce pays en 1141 par les partisans de Geoffroy Plantegenêt, mari de Mahaut, fille d’Henri Beauclerc, et rival d’Étienne de Blois. Hervé jouit d’une réputation prestigieuse acquise au combat où il a d’ailleurs perdu un œil. Il épouse une fille naturelle d’Étienne de Blois. Un de ses fils, Hamon, est évêque de Léon et un autre abbé de Landévennec. Soucieux d’étendre ses possessions, Hervé II guerroie contre les vicomtes du Faou. L’un d’eux le capture par surprise en 1163 et l’enferme dans le château de Châteaulin avec son fils, Guyomarch. Cette place est assaillie et emportée par une troupe menée par Hamon, évêque de Léon, et Conan IV, ancien duc de Bretagne. Le vicomte du Faou est, à son tour, enfermé par Hervé II dans le château de Daoulas où il périt de faim et de soif. Hervé de Léon s’oppose ensuite à Henri II Plantegenêt dont les troupes s’emparent de sa forteresse la mieux défendue en 1167 : son nom reste inconnu. Hervé II meurt peu après, en 1169. Son fils aîné, Guyomarch IV, lui succède et chasse son frère Hamon du siège épiscopal en 1169. Mal lui en prend. Conan IV le vainc lors d’une bataille près de Commana, dans les monts d’Arrée. Ces luttes fratricides mènent à l’assassinat d’Hamon par Guyomarch en 1171. Le vicomte doit se soumettre aussitôt à Henri II Plantegenêt et lui remettre ses châteaux. Il se révolte encore à deux reprises au moins, en 1177 et 1179. À cette date, Geoffroy, fils d’Henri II Plantegenêt, devenu duc de Bretagne après son mariage avec Constance, fille de Conan IV, confisque et démantèle le comté de Léon. Guyomarch ne conserve que deux paroisses et meurt peu après. Son fils aîné, Guyomarch, se voit provisoirement attribuer onze paroisses tandis que son frère cadet, Hervé, est retenu en otage par Geoffroy Plantegenêt. Nous rejoignons G.-A. Lobineau quand il affirme : « C’est apparemment là l’occasion qui fit tomber la plus grande partie des biens des vicomtes de Léon dans la Maison de ce puisné ». Les compositions intervenues ultérieurement entre les deux fils de Guyomarch IV, d’une part, et Geoffroy, sa femme Constance et leur fils Arthur, d’autre part, n’ont pas été conservées. Pierre Mauclerc les a fait détruire au début du XIIIe siècle. On ignore ainsi à quelle date précise remonte la partition définitive du comté de Léon entre Guyomarch V et son frère Hervé et quelles en ont été les modalités. Certains auteurs considèrent qu’elle est antérieure à l’assise du comte Geoffroy, datée de 1186. Selon J. Éverard, ce n’est qu’en 1187 que Constance se trouve obligée de sacrifier des baronnies acquises par Geoffroy pour maintenir ses positions et obtenir l’appui des barons bretons face aux deux fils d’Henri II Plantegenêt, Richard et Jean. Elle rajoute que c’est peut-être Guyomarch lui-même qui a octroyé un généreux apanage à Hervé, après que la vicomté lui ait été restituée par la duchesse Constance.

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Hervé Ier de Léon, fils cadet de Guyomarch IV, est donc le fondateur de la branche cadette de Léon tandis que son frère aîné, Guyomarch, conserve le titre de vicomte de Léon. Selon plusieurs témoins d’une enquête royale menée en 1235, Hervé tient son fief en juveigneurie de la branche aînée. Guyomarch et Hervé de Léon se révoltent à la fin de l’année 1186, après la mort de Geoffroy Plantegenêt. Ils s’emparent des forteresses de Morlaix et de Châteauneuf-du-Faou. Henri II Plantegenêt doit venir en personne entreprendre le siège de Morlaix. Albert Le Grand relate que le siège dura neuf semaines. Guyomarch et, sans doute, Hervé suivent ensuite Henri II Plantegenêt lors de ses guerres. Adam de Léon, peut-être un frère des précédents, participe, avec Richard Cœur de Lion, à la troisième croisade, où il meurt lors du siège de Saint-Jean-d’Acre, en 1191. Hervé et Guyomarch font partie des seigneurs bretons qui s’opposent à Richard, devenu roi d’Angleterre à la mort de son père en 1189, quand il essaie de s’octroyer la tutelle d’Arthur, héritier de la couronne ducale et fait emprisonner sa mère, la duchesse Constance, en 1196. Selon Pierre Le Baud, ils mettent le jeune prince à l’abri dans le château de Brest tandis que les troupes de Richard dévastent la Bretagne, en 1196. L’année suivante, l’armée de Richard qui se dirige vers Brest est défaite par les seigneurs bretons près de Carhaix. Le roi Richard doit composer avec la duchesse Constance. Guyomarch de Léon réussit alors, vers 1198-1201, à négocier un compromis avec Constance et Arthur et à récupérer ses terres. Lors de la disparition de Richard, en 1199, son frère Jean s’empare de la couronne d’Angleterre qui aurait pu revenir à son neveu Arthur, duc de Bretagne, fils de Geoffroy Plantegenêt, frère aîné de Jean. Il fait assassiner son propre neveu en avril 1203. Barons et prélats bretons se réunissent alors à Vannes et, rejetant la tutelle du Plantegenêt, confient la garde du duché à Guy de Thouars, troisième époux de la duchesse Constance. Ils prêtent aussi serment au roi de France, Philippe Auguste. Hervé Ier de Léon disparaît à ce moment, en juillet.

On ne connaît que deux actes émanant d’Hervé Ier de Léon. En 1186, il confirme les donations faites par son père, Guyomarch, sa mère, Nobile, son frère, Guyomarch, et lui-même à l’abbaye de Daoulas. Il s’agit notamment de la paroisse du château de Daoulas et de dîmes, entre autres celles de Sizun. Cette donation est intervenue en 1173, peu de temps après l’assassinat d’Hamon, évêque de Léon, par son frère, Guyomarch IV de Léon. La fondation de cette abbaye est parfois interprétée comme étant une œuvre destinée à les racheter de ce crime. Hervé possède à Daoulas un château attesté dès 1163. Cette place lui permet de défendre efficacement ses terres au sud de l’Élorn, terres qui sont acquises au détriment du lignage vicomtal du Faou. Ces donations des seigneurs de Léon sont ensuite confirmées par les évêques de Cornouaille qui les complètent. En 1199, on retrouve Hervé de Léon lors d’une controverse l’opposant à Guillaume, évêque de Quimper, au sujet de la nomination d’un clerc à l’église de Crozon. Cet acte semble démonter qu’Hervé détient dès lors la seigneurie de Crozon qui lui aurait été transmise lors du partage des domaines de la maison de Léon.

Selon plusieurs auteurs, Hervé de Léon épouse Marguerite ou Margilie, fille d’Alain III, vicomte de Rohan, et de Constance, sœur de Conan IV , duc de Bretagne. Elle lui donne plusieurs enfants : Hervé II, qui suit, Alain, Guyomarch, Salomon et Constance.

Alain, qui porte le prénom de son grand-père maternel, assiste à la translation des reliques de Saint-Mathieu, aux côtés de ses frères Hervé, Salomon et Guyomarch en 1206. On fait parfois de lui le seigneur de Penzé.

Guyomarch a pour fils Hervé qui passe un accord avec son parent, Hervé IV de Léon, en 1262. Il obtient alors en héritage les terres que son père a obtenues en bienfait, à savoir le fief de « Bosic ». Ce règlement intervient tardivement, en raison de la guerre survenue entre Hervé III de Léon et le duc, vers 1239-1241.

Salomon de Léon meurt le 20 avril 1223. Hervé, fils de Salomon de Léon, chevalier, est cité dans des actes de 1262 et 1265. Il décède entre 1277 et 1279, après avoir donné le tiers de ses terres à l’abbaye du Relec. Marié à Perrote de La Folleie, il a au moins deux fils, Salomon, l’aîné, et Hervé. Ce dernier prit le nom de Lesquelen avant 1279.

Constance est mariée à Pierre de Malestroit. En 1237, leur fils, Eudes de Malestroit, petit-fils d’Hervé de Léon et neveu d’un autre Hervé de Léon, réclame que les hommes des abbés de Daoulas dans ses domaines et juridiction d’Irvillac jouissent des mêmes droits que ceux accordés par les seigneurs de Léon en 1218. Constance a, vraisemblablement, été dotée dans ce secteur.

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Hervé II de Léon est, selon une lettre de 1206, le premier de tous les seigneurs de Léon à assister à la réception et à la vénération du chef de saint Mathieu. Dans cet acte passé à Landerneau, ratifié par l’apposition de son sceau et confirmé par ses trois frères, il fait donation au monastère de Saint-Mathieu, jadis fondé par ses ancêtres, de trois mesures de froment à prélever à Trémenvily en Plouvien. Il est alors reçu par l’abbé et ses moines comme frère de leur communauté, ces derniers s’engageant à dire pour lui des prières de son vivant et après sa mort. Hervé II est présent à Quimperlé la même année, aux côtés de son oncle Guyomarch, vicomte de Léon, lorsque Guy de Thouars confirme les donations faites par les ducs de Bretagne à l’abbaye Sainte-Croix. En 1208, il fait une nouvelle donation à l’abbaye de Daoulas. En 1212, il reçoit la permission d’aller en Angleterre. Selon divers auteurs, Hervé de Léon aurait été présent à la bataille de Bouvines. En 1218, au moment de partir pour la Terre sainte, il confirme les donations de ses ancêtres au monastère de Daoulas. Il les complète par un don de trois mesures de froment à prendre sur ses dîmes de Plougastel.

Hervé II participe à la cinquième croisade. Selon Guillaume le Breton, frappé par la mort de son beau-frère, Morvan du Faou, lors du siège de Saint-Jean-d’Acre, mais aussi rebuté par l’absence d’organisation et par le peu d’intelligence qui règne entre les chefs croisés, il s’embarque vers le milieu de l’automne, malgré les remontrances du patriarche de Jérusalem et les réprimandes d’autres croisés. Durant l’automne 1218 ou 1219, il fait naufrage et périt en vue de Brindisi (Italie). Le même chroniqueur relate qu’Hervé aurait alors tenté de rejoindre précipitamment la Bretagne, afin de mettre la main sur les terres de Morvan. Le nécrologe de Daoulas mentionne la mort d’Hervé de Léon au retour de la Terre sainte.

Hervé II se serait marié deux fois. Il épouse, en premières noces, la fille aînée d’Henri, seigneur d’Hennebont dont la fille cadette est unie à Olivier de Lanvaux. Lors du décès d’Henri, son fief de Quéménet-Héboi est partagé en deux ou trois parties. Selon Arthur de La Borderie, Hervé II de Léon hérite de territoires répartis autour du château du « Vieil-Hennebont » et de celui de Tréfaven, sur le Scorff. Ces terres prennent alors le nom de « fiefs de Léon. » Cette union paraît vraisemblable si on se réfère à l’acte de 1218 précité, passé à « Treisfaven ». En 1294, Hervé de Léon doit deux chevaliers d’ost pour son « fié de Kuemenet Theboe. » Il détient, avec le duc de Bretagne, le vieux château d’Hennebont, implanté sur la rive droite du Blavet, en face de la ville close édifiée dans la seconde moitié du XIIIe siècle. Une seconde union est suggérée par Guillaume le Breton qui fait d’Hervé II le beau-frère de Morvan, vicomte du Faou. Ce mariage, intervenu entre deux lignages vicomtaux longtemps rivaux, permet peut-être à Hervé de Léon d’étendre encore plus ses possessions vers le sud, au delà des châteaux de La Roche-Maurice et de Daoulas, ou tout au moins d’y renforcer ses positions et peut expliquer son retour précipité de la croisade après la mort de Morvan.

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On ignore tout des premières années de la vie d’Hervé III de Léon. Au moment de la mort de son père, les vicomtes de la branche aînée de Léon sont aux prises avec Pierre de Dreux, dit Mauclerc, devenu duc de Bretagne depuis son mariage avec Alix, héritière du duché, en 1213. Vers 1216, ce dernier réclame la garde et le bail de la terre d’Henri de Penthièvre, placé sous la tutelle de son oncle Conan, vicomte de Léon. On ne connaît rien des opérations militaires qui ont alors lieu mais les troupes ducales s’emparent de l’apanage de Penthièvre et d’une partie du Léon. Pierre Mauclerc agit en maître à Lesneven. À la mort d’Alix, en 1221, les barons bretons remettent en cause le pouvoir de Pierre Mauclerc. Ils se révoltent mais le duc est vainqueur, en 1222, lors de la bataille de Châteaubriant. Conan de Léon se soumet. On ignore si la branche cadette participe à la révolte. Seuls apparaissent les noms de Conan et de son frère, Salomon de Léon. Hervé II de Léon juge, semble-t-il, plus opportun de partir en croisade, afin de ne pas guerroyer contre le duc. Il est possible que son fils Hervé III, peut-être mineur, ait fait partie des barons ralliés à Mauclerc, si on considère qu’il se marie avec une parente du duc. En 1225, Hervé III est présent aux côtés de ses parents Conan et Salomon de Léon, à l’assemblée convoquée par Pierre Mauclerc à Nantes, pour entériner la charte des privilèges de Saint-Aubin-du-Cormier. En 1228, il confirme la donation faite par son père à l’abbaye de Saint-Mathieu en 1206 puis, en 1233, un échange entre les abbayes de Daoulas et du Relec. Hervé de Léon n’est pas présent lors de l’enquête royale faite en 1235 à Saint-Brieuc concernant les abus de pouvoir de Pierre Mauclerc. Plusieurs témoins y relatent les spoliations successives perpétrées par les Plantegenêts puis par Pierre Mauclerc à l’encontre des vicomtes de Léon. Il y est seulement mentionné qu’Hervé de Léon doit tenir ses terres des vicomtes de Léon en qualité de cadet ou juveigneur. Pierre Le Baud indique qu’Hervé, ainsi que Guyomarch, vicomte de Léon, et son fils Hervé assistent à l’investiture de Jean le Roux à Rennes en novembre 1237, signe d’une probable accalmie dans leurs relations. Hervé III confirme peu après, en 1239, les donations de ses ancêtres au monastère de Daoulas.

Jean Ier le Roux mène une politique autoritaire envers ses principaux vassaux. Il étend le domaine ducal, si besoin est par la force. En mars 1240, à l’issue d’une guerra, Hervé, vicomte de Léon, conclut un arrangement avec le duc à Quimperlé. Il lui cède la ville de Brest, son port et son château moyennant cent livres de rente et lui prête l’hommage pour tous ses fiefs. Les vicomtes de Léon perdent ainsi leur principale place forte. La même année, son parent, Hervé III de Léon, incendie, peut-être en représailles, le « château de Quimperlé » lors d’un conflit l’opposant au duc. Il décède l’année suivante, peut-être après un engagement malheureux. Les Léon, vicomtes et branche cadette, semblent soumis. Le fils d’Hervé III est mineur. Le duc, appliquant l’une des clauses de l’Assise au comte Geoffroy, exerce le droit de bail, c’est-à-dire exploite le fief jusqu’à la majorité d’Hervé IV de Léon. Il contrôle alors momentanément ses châteaux comme celui de La Roche-Maurice. Il est également possible qu’il confie certaines de ses terres à des vassaux qui ont fait défection à son père.

Peut-être faut-il analyser la disparition d’Hervé III comme l’issue d’un funeste revirement. En effet, Hervé III a épousé Marguerite, fille d’Hugues IV, seigneur de Châteauneuf-en-Thymerais dans le Perche, et d’Éléonore de Dreux. Cette dernière est la fille de Robert II, comte de Dreux, et d’une sœur de Pierre Ier de Dreux, duc de Bretagne. Il s’agit peut-être d’un mariage arrangé par ce prince en faveur d’un de ses fidèles barons. À la mort de son frère aîné, en 1253, Marguerite hérite d’un tiers de la seigneurie de Châteauneuf, avec les châteaux de Châteauneuf et de Senonches. Hervé IV de Léon, son fils, est alors nommé dans les actes seigneur de Châteauneuf et devient un vassal direct du roi de France.

Hervé III de Léon et Marguerite de Châteauneuf auraient eu trois enfants : Hervé IV, qui suit, Alain et Catherine. Alain de Léon serait le père de François qui épouse l’héritière de Kermavan et aurait relevé ce nom. Catherine se marie en 1240 à Juhel d’Avaugour, fils puîné d’Henri, seigneur de Goëllo (Avaugour) et de Marguerite de Mayenne.

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Hervé IV de Léon est encore mineur et peut-être même très jeune au moment du décès de son père. Le duc Jean le Roux exerce le droit de garde. En 1244, ce prince fait don à l’abbaye de Daoulas de la moitié du moulin à foulon de cette cité, pendant le bas-âge d’« Hervé, fils d’autre Hervé, seigneur de Léon ». H. Morice n’a publié aucun acte émanant d’Hervé de Léon avant 1260, date à partir de laquelle il apparaît dans de nombreux accords. Il est possible qu’en raison de la querelle l’opposant à Jean le Roux, le seigneur de Léon ait longuement résidé en France. Il s’y marie avec Mahaut de Poissy, dame de Noyon-sur-Andelle, et porte le titre de seigneur de Châteauneuf.

En septembre 1260, Hervé IV de Léon reconnaît l’autorité du duc en lui prêtant hommage. Cette soumission intervient une vingtaine d’années après la révolte et la mort de son père. Il s’engage, par lettres scellées et devant le roi de France, à ne plus jamais faire la guerre au duc de Bretagne ni à ses héritiers et à le servir loyalement. Il accepte même que son suzerain, le roi, puisse, en cas de révolte contre le duc, se saisir de ses terres en France et en prélever les revenus. Cet accord signé par Hervé, qui n’est encore qu’écuyer, met fin aux querelles avec Jean le Roux. Hervé s’engage à lui verser la somme colossale de 10 000 livres, afin d’être « quites & delivres de toutes les forzfaitures e les dommages que Hervé de Leon nostre pere fist à icelui duc ». C’est, vraisemblablement, la condition pour qu’il puisse récupérer toutes ses terres que le duc administre et dont il perçoit les revenus. Cet accord est suivi de plusieurs autres, passés entre Hervé de Léon et certains de ses vassaux infidèles qui ont pris le parti du duc dans les années 1239-1241. Ils nous livrent quelques informations utiles sur ces événements et sur l’entourage d’Hervé III et Hervé IV de Léon.

Un de ces vassaux est Yves de Coëtmeur qui, vers 1239, avec son fils Sylvestre, a mené un coup de main contre Hervé III de Léon. Il semble bien que Nuz, fils de Sen, ait aussi participé, vers 1241, à une opération qui a eu lieu à La Roche-Maurice, un des châteaux d’Hervé III de Léon. En janvier 1261, après une enquête, Hervé de Léon confie la tutelle du fils mineur de Salomon de Coëtmeur à son oncle Sylvestre, fils d’Yves de Coëtmeur. Sylvestre s’engage à abandonner les terres envahies (forprisiones) par son père qui appartiennent à Hervé de Léon et à lui remettre le château de Coëtmeur, en Plougourvest, durant les guerres qu’il pourrait mener. Il ajoute qu’il pourra cependant continuer à y résider avec trois chevaliers, trois serviteurs et sa femme, durant cette réquisition. Il donne pour témoins Hervé de Penhoët, chevalier, et Nuz, fils de Sen. Ce dernier reçoit, à son tour, en 1263, le droit de bail sur les héritiers mineurs d’Yves de Coëtmeur, après le décès de Sylvestre. Il s’engage pareillement à remettre le château de Coëtmeur à Hervé de Léon en cas de guerre et donne pour témoins Pierre de Kergorlay, Hervé de Penhoët, Salomon, fils de Nuz, et Mathieu de Crozon, tous chevaliers.

Hervé IV doit également se préoccuper des terres qui avaient été données en bienfait par Hervé Ier de Léon à ses frères. En 1262, il conclut un accord avec Hervé, fils de Guyomarch, auquel il reconnaît la possession du fief de « Bosic » à l’exception de tout autre. Ce dernier devient son homme lige. Par contre, à la même date, Hervé, fils de Salomon de Léon, un autre des frères d’Hervé Ier de Léon, cède au duc toute la terre qu’il a reçue en saisine dans la vicomté de Poher. Les deux hommes parviennent à un accord en 1265. Hervé, fils de Salomon de Léon, renonce, au profit d’Hervé IV, à des terres situées dans les paroisses de Mellionnec, Minihy-Paul, l’Ile-de-Batz, à des droits sur des bourgeois de Landerneau, ainsi qu’à une partie de la paroisse de Plabennec couverte de forêts, et lui prête hommage en tant que cadet.

En août 1261, à la demande de l’abbé de Daoulas, Hervé IV confirme à ce couvent les donations de son père et de ses ancêtres et lui concède, en outre, la moitié du moulin à foulon de Daoulas. Un an plus tard, en juin 1262, il procède de la même manière et reconnaît aux moines la possession de terres acquises depuis la mort de son père, en 1241, notamment la seigneurie laïque qu’il leur vend. En 1272 encore, il donne à l’abbaye cent sous sur la part qu’il perçoit au grand moulin du pont de Daoulas.

Les relations avec le duc finissent par se normaliser. En août 1264, un accord intervient entre Pierre de Bretagne, fils du duc Jean le Roux, et Hervé de Léon au sujet d’Hennebont. Les deux parties se partagent la « motte » d’Hennebont mais surtout les droits et les amendes perçus par leurs voyers et alloués sur les navires qui y abordent. Ils s’engagent à ne pas y construire de nouvelle forteresse, à ne rendre la justice que sur leurs hommes ainsi qu’à veiller aux intérêts de l’autre partie lors de la réédification du pont et de la construction d’un moulin par Pierre de Bretagne. L’intérêt économique l’emporte sur les vieilles discordes. On retrouve cette même préoccupation en 1281 dans un accord sur la cohue de Plouay. Le duc qui l’a acquise d’Adelice de Lanvaux, dame de Ty-Henri, y fait faire des travaux auxquels Hervé de Léon participe pour 91 livres, en tant que détenteur de la moitié des droits perçus sur le marché de Plouay. En 1276 déjà, Hervé de Léon a ratifié la convention passée entre le duc Jean le Roux et ses grands vassaux pour le changement du droit de bail en droit de rachat, soit une année de revenu d’un fief acquitté par l’héritier d’un seigneur défunt. On retrouve Hervé dans ses « fiefs de Léon », en 1281, quand il fait une donation de dix livres de rente à percevoir sur la coutume du port d’Hennebont à l’abbaye de Notre-Dame-de-la-Joie fondée par Blanche, duchesse de Bretagne, à proximité de cette ville. En 1284, Hervé de Maleterre octroie à Hervé de Léon, son seigneur, toute la mouture et le fouage de sa terre et de son fief dans la paroisse de Ploemeur.

Hervé IV n’en est pas moins un seigneur jaloux de ses prérogatives. Ainsi, en 1277, Hervé, fils de Salomon de Léon, chevalier, concède aux moines de l’abbaye du Relec, en Plounéour-Ménez, le tiers de ses terres et redevances dans les paroisses de Plabennec, « Ploelan » (Guiclan) et « Ploebeneon » (Plouénan). Cette importante cession est, pour l’essentiel, entérinée en 1279 par Hervé de Léon, après la mort du donateur. Il rappelle toutefois qu’Hervé, fils de Salomon, tient ses terres comme juveigneur et doit le service d’ost. Le duc Jean le Roux confirme ces possessions quelques mois plus tard, tout comme le fils d’Hervé, un autre Hervé qui a pris le nom de Leskelen, en 1284. Cependant, en raison des contestations émises devant le duc par Hervé de Léon, les religieux finissent par céder les biens donnés par Hervé, fils de Salomon, à Guillaume de Lohéac, un proche du duc, pour 1 500 livres. Cette cession est contestée par Alain Nuz qui, en 1285, prétend lors d’une procédure portée devant le parlement de Paris que cette terre lui a été cédée par son oncle, Hervé, fils de Salomon, donation ensuite confirmée par ses neveux. Il demande à en avoir la saisine et réclame à Hervé de Léon qu’il reçoive son hommage pour cette terre à la place de Guillaume de Lohéac. Une enquête est alors ordonnée.

Hervé IV épouse Mathilde, ou Mahaut, de Poissy, dame de Noyon-sur-Andelle (aujourd’hui Charleval), fille de Guillaume de Poissy et d’Isabeau de Marly. Guillaume de Poissy est seigneur de Noyon-sur-Andelle, d’Hacqueville, de Bellefosse, de Malvoisine, de Radepont, de Bacheroux et de Viel-Manoir. Son fils, Robert, décède en 1263 et Mathilde hérite du fief paternel, après la mort de son père, intervenue entre 1270 et 1272. Hervé IV réalise ainsi une très belle alliance matrimoniale qui lui donne d’importantes seigneuries en Normandie et le contrôle du débouché de la vallée de l’Andelle, à l’est de Rouen. En 1272, dans le rôle d’armes de l’ost de Philippe III le Hardi contre le comte de Foix « Monseigneur Hervés de Léon doit service par XL jours d’un chevalier pour le fié de Chasteaunueuf et de IIII chevaliers pour la terre qui fu monseigneur Guillaume Poissy ».

En septembre 1281, Hervé de Léon concède au roi de France le tiers qu’il détient dans les châteaux et châtellenies de Châteauneuf-en-Thymerais et de Senonches avec toutes les dépendances. Il reçoit 400 livres tournois de rente annuelle à prendre sur la paroisse de Pont-Saint-Pierre et aux alentours, dans l’évêché de Rouen, ainsi que 1 000 livres de rente annuelle à prendre sur le Temple, à Paris. Cette vente est aussitôt ratifiée par Mathilde de Poissy, dame de Noyon-sur-Andelle, épouse d’Hervé de Léon. Les estimations faites sur ordre du roi l’année suivante montrent que ce fief avec le manoir de Senonches, la tour de Châteauneuf, les étangs, le bois de Timbrays, une part des revenus sur les halles de Châteauneuf avec les terres, les dépendances et divers autres droits lui ont rapporté annuellement un peu plus de 1 400 livres. Cette transaction permet à Hervé de Léon de renforcer son implantation autour des fiefs normands transmis par sa femme. Il continue, un temps, de porter le titre de seigneur de Châteauneuf.

La date de la mort d’Hervé IV de Léon n’apparaît pas dans le nécrologe de Daoulas. Il est probablement décédé sur ses terres normandes. Selon L. Fallue, il « mourut en 1290 et fut inhumé auprès de son père dans le chœur de l’église de l’abbaye de Fontaine-Guérard », proche de son château de Radepont. M. Charpillon retient la date de 1297 quand Hervé de Léon le jeune cède aux religieuses de Fontaine-Guérard le droit qu’il détient sur une pièce de terre dans la paroisse de Radepont.

François-René Baudot, plus connu sous le nom de Dubuisson-Aubenay, qui visite la Normandie dans les années 1640, a pu alors observer trois pierres tombales des seigneurs de Léon dans l’abbaye de Fontaine-Guérard et en relever les inscriptions. Nous donnons, ci-dessous, le texte de cet ouvrage peu connu : « Au milieu du chœur est une tombe de pierre… Proche icelle tombe est une autre tombe de pierre portant l’effigie d’un chevalier armé sur laquelle est escript : Cy gist Hervieu de Leon, sire de Nojon, qui trespassa lan M.CCC.LV la veille de Nostre Dame de Mars. Priez pour lame de ly que Diex mercy ly face. Sur lad. tombe il y a huit escussons de cuivre, sçavoir quattre de chaque costé. Le 1er et dernier escusson du costé droict porte un lyon rampant  ; le 2e d’azur échiqueté d’or  ; le 3e d’azur bandé de 3. pièces d’or. Le 1er et dernier du costé gauche portent un lyon rampant  ; le 2e escartelé de 4. lyons rampants, et le 3e échiqueté. A costé d’icelle tombe est une autre tombe représentant un chevalier armé, sur laquelle est escript : Cy gyst monseigneur Hervieu de Leon, chevalier, sire de Nojon qui trespassa à Paris, le mardi aprez la nativité Nostre Dame de septembre, en l’an de grace M.CC. et (en blanc). Priez diex qu’il ayt pitié et mercy de lame de ly. Amen. Au costé de la susd. tombe est une autre petite tombe sur laquelle est escript : Icy gyst Hervieu, le filz de Monseigneur Hervieu de Leon et madame Marie Poessi, dame de Nojon. Ses armes sont un lyon rampant. ». Cette dernière tombe est indiscutablement celle d’Hervé V de Léon, fils d’Hervé IV et de Mahaut ou Mathilde de Poissy, mort en 1304. La date de la première est erronée, celle de la seconde incomplète. Si on considère qu’Hervé VII et Hervé VIII de Léon ont demandé dans leur testament à être enterrés dans l’église de l’abbaye de Daoulas, comme leurs ancêtres, les deux tombes de l’abbaye de Fontaine-Guérard pourraient être celles d’Hervé IV et Hervé VI de Léon qui ont été sires de Noyon et sont décédés vers 1290 et en 1337. Ces pierres tombales n’ont pas été conservées.

Trois enfants seraient nés de l’union d’Hervé IV de Léon et de Mathilde de Poissy : Hervé V, qui suit, Guillaume et Amice.

H. Morice cite Guillaume de Léon comme chanoine de Nantes, en 1274, puis évêque de Léon, ce qui n’est nullement avéré. Par contre, Guillaume de Léon apparaît comme chevalier de la baillie de Caen dans le rôle d’armes de « l’ost de 1272 » de Philippe III le Hardi contre le comte de Foix. En 1281, lors d’une adjudication de biens, il se porte acquéreur des terres de Guillaume de Créac’h Miloc, non loin de l’Élorn, pour 70 livres. On ignore tout de ses descendants.

Amice est mariée à Guillaume de la Roche-Moysan. Elle semble avoir obtenu pour partage des terres dans le Quéménet-Héboi. En 1323, Étienne Gauvein, seigneur de la Roche-Moysan, chevalier, passe un accord avec Hervé VI de Léon au sujet de la succession de Guillaume de la Roche-Moysan. Hervé obtient, comme héritier de sa tante, Amice, les manoirs de la Roche-Moisan et de Botbleiz, la ville de Pont-Scorff, une partie de l’île de Groix, des terres dans plusieurs paroisses, notamment en Ploemeur et Guidel. Hervé de Léon accorde alors à Étienne Gauvein 400 livres de rente assises sur les terres de Sorel-le-Châtel et Villers, en Normandie.

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Hervé V de Léon succède sans doute à son père Hervé IV vers 1290. Ils sont tous deux mentionnés dans plusieurs accords relatifs à la dot de l’épouse d’Hervé V, Jeanne, fille d’Alain VI, vicomte de Rohan, et Ysabeau. En mars 1288, Hervé de Léon transige avec son beau-père au sujet des cent livres de rente annuelle et de cinq cents livres de monnaie courante promises lors de son mariage. Il réclame les arrérages de vingt-deux ans de revenus et parvient à composer pour 1 500 livres. Cet accord est confirmé par la cour ducale de Ploërmel l’année suivante. En 1291, le contentieux n’est pas encore réglé. Hervé de Léon réclame la paroisse de Noyal au vicomte de Rohan. Ce dernier accepte de donner à Hervé 100 livres de rente par an, assises sur les revenus des paroisses de Plussulien et Melrand, moyennant le renoncement d’Hervé à Noyal. Cet accord est confirmé par Hervé de Léon, son fils aîné, Hervé, et Alain VI, vicomte de Rohan, et son fils aîné, Alain.

Hervé V conserve des relations conflictuelles avec certains de ses vassaux. En 1292, à l’issue d’une enquête, il transige avec Eudon de Coëtmeur. Le litige est réglé par Prigent de Coëtivy, Olivier de Kergournadec’h, chevaliers, et Hervé de Penhoët, écuyer, vassaux d’Hervé. Eudon de Coëtmeur conserve le « fié Gallon, le fils au Glas de Ploeziry » (Ploudiry) mais renonce à la moitié de « Ploelane » (Guiclan). Une autre affaire bien plus grave oppose Hervé de Léon à Alain Nuz qui a hérité du fief de Lesquelen en Plabennec et notamment du tiers de ces terres cédées par Hervé, fils de Salomon et petit-fils de Hervé Ier de Léon, à l’abbaye du Relec, vers 1277. L’affaire prend un tour tragique quand Alain Nuz est assassiné, vers 1296. Hervé de Léon et ses deux fils, Hervé et Guillaume, sont accusés d’avoir commis ce meurtre. Les parents et amis d’Alain Nuz portent l’affaire devant le roi, à Paris. Le duc Jean II rend un jugement en 1297 afin que cessent les « bataille, accusations, denunciations, toutes villeinies et toute maniere de persecution, qui estoient ou pouvoient estre pour reson de ladite mort ». Il est convenu qu’Hervé de Léon récupère des terres, saisies après le meurtre au bénéfice des plaignants, mais, qu’en contrepartie, il s’engage à leur verser 2 000 livres de dédommagement. Cette procédure n’est toujours pas résolue en 1298.

Hervé de Léon est un vassal direct du roi de France mais aussi du duc de Bretagne auquel il doit également le service d’ost. À partir de 1293, les querelles reprennent entre Plantegenêts et Capétiens. Elles sont marquées par les guerres de Guyenne (1293-1303) et de Flandre (1297-1302). La Bretagne se retrouve au cœur de ce conflit, notamment en raison de l’intense trafic maritime au large de ses côtes et de sa position sur les itinéraires maritimes entre Guyenne et Angleterre. Philippe le Bel confisque la Guyenne en mai 1294. La guerre est imminente. Le duc de Bretagne convoque son ost à Ploërmel à la mi-août 1294. Le « Livre des Ostz » dressé à cette époque nous fournit la liste des vassaux directs du duc de Bretagne, Jean II, une centaine au total, qui doivent 166 chevaliers et 17 écuyers. « Monseigneur Hervé de Léon » doit alors deux chevaliers, « pour son fié de Kuemenet Theboe », et « V chevaliers d’ost, pour sa terre de Leon ». Il fait partie du groupe de la douzaine de vassaux les plus importants qui assurent un service de plus de cinq chevaliers d’ost. L’importance des fiefs français est alors manifeste pour les Hervé de Léon. En Bretagne, Hervé V doit sept chevaliers d’ost contre cinq en France. Comme le critère semble avoir été un chevalier d’ost pour un château, il tiendrait du duc en Bretagne ceux de Tréfaven et du « Vieil-Hennebont » dans le Kéménet-Héboi et de La Roche-Maurice, Joyeuse-Garde, Landivisiau, Landerneau et Coatméal dans le Léon. Il semble bien qu’Hervé de Léon ait au moins conservé un manoir dans le Perche, après la vente de 1281 concernant les châteaux de Châteauneuf et de Senonches. Plusieurs châteaux existent dans leurs terres normandes, notamment à Radepont, Noyon-sur-Andelle, Hacqueville, Douville, Pont-saint-Pierre, Bellefosse et Bacqueville.

Malgré la situation de quasi-neutralité du duc et du duché de Bretagne, les Anglais se ravitaillent sur les côtes bretonnes, parfois par la force. Au début de l’année 1296, une armée anglaise pille l’abbaye et le bourg de Saint-Mathieu et, à deux reprises, les villes de Landerneau puis de Saint-Guénolé de Landévennec où les moines se retranchent dans leur abbaye fortifiée. On devine ainsi la vie d’Hervé V de Léon, partagée entre les services d’ost dus au roi lors des guerres de Flandre – il participe notamment aux campagnes de 1299, 1301, 1302 et 1303 – et la gestion de ses domaines en Bretagne et en Normandie. En 1301, il passe ainsi un accord à Morlaix avec ses forestiers au sujet de la forêt de Cuburien et un autre avec Guillaume de Guémené-Guingamp pour un hommage et des terres en Lignol en 1304. Dans une enquête de 1410-1411, un témoin relate « qu’au temps d’un seigneur de Leon appellé Hervé fieuz Mahaut » on a arraisonné un bateau « qu’il fut prins et rendu au dit seigneur dans le havre de Landerneau, devant son manoir de Guoeslet Forest, ou il pourist ». Cette information nous apprend que, dès cette époque, les seigneurs de Léon se sont fait bâtir cette demeure de plaisance à l’orée de la forêt de Landerneau, délaissant peut-être un peu l’austère forteresse de La Roche-Maurice. Il faut dire que les revenus familiaux ont considérablement augmenté, notamment en raison des fructueuses alliances matrimoniales.

Hervé V de Léon meurt en avril 1304. Il est inhumé dans l’abbaye de Fontaine-Guérard, en Normandie. On ignore l’année du décès de son épouse, Jeanne de Rohan, qui lui a donné plusieurs enfants parmi lesquels on cite, avec beaucoup d’incertitudes pour les trois derniers : Hervé VI, qui suit, Guillaume, Amice, Isabeau, Guy, Raoul et Olivier.

Guillaume de Léon est à l’origine de la tige des seigneurs de Hacqueville. Il épouse, en 1301, Catherine, fille d’Eudon, seigneur de la Roche-Bernard, qui lui octroie 300 livres de rente et 1 000 livres de monnaie courante pour son mariage. Le père de Guillaume lui promet en outre une rente de 500 livres pour son héritage après son décès, rente assise sur des terres en Léon et Quéménet-Héboi. Il reçoit sa part d’héritage en 1307, à savoir les 500 livres de rente à percevoir dans les paroisses de Plouyé, Plouray, Mellionnec et « Trozmoel »(Trégomel ?). Dès 1306, Guillaume de Léon, chevalier, porte le titre de seigneur d’Hacqueville. Cette terre provient de l’héritage de Mahaut de Poissy, sa grand-mère paternelle. Selon H. Morice, Guillaume a eu quatre fils : Guillaume II, Pierre, Jean et Olivier. En 1332, le fils aîné de Guillaume, également prénommé Guillaume, réclame à son oncle, Hervé VI de Léon, le versement de la rente de 500 livres dont a bénéficié son père mais accepte de transiger pour 50 livres de rente et 300 livres en monnaie courante. L’année précédente déjà, Olivier, son frère puîné, a obtenu d’Hervé de Léon 300 livres de l’héritage de sa tante défunte, Amice de Léon, mais a du renoncer à ses prétentions sur le « manoir de Caledan ». Ce même Olivier et son frère, Jean, reçoivent des dons de leur cousin, Hervé VII de Léon, lorsqu’il rédige le codicille de son testament en 1344. Olivier de Léon doit s’en servir pour payer sa rançon, sans doute due à sa capture à Porléac’h, en même temps qu’Hervé VII, en 1342. Le fils de Guillaume II, Guillaume de Léon, sire d’Hacqueville, est, en 1360, lieutenant de la place royale de Château-Gaillard, à 12 kilomètres d’Hacqueville. Il en devient capitaine avant 1364. Son fils ou son frère, Jean de Léon, lui a succédé dans cette charge en 1369. Il est attesté comme seigneur d’Hacqueville en 1371. Selon H. Morice, à la fin du XIVe siècle, un autre Guillaume de Léon, seigneur de Hacqueville, épouse sa parente, Catherine de Léon, fille d’Hervé VII de Léon et veuve d’Henri de Plédran. Leur fils, également prénommé Guillaume, est chambellan du roi Charles VI et vend à Alain VIII de Rohan tous les biens que Catherine de Léon, sa mère, avait en Bretagne, au début du XVe siècle. Son héritier, Guillaume, épouse Jeanne de la Planche.

Amice est mariée à Bernard, sire de la Roche-Bernard, en 1301, en même temps que son frère Guillaume épouse Catherine, la sœur de Bernard. Peut-être est-ce la même « Amice de Léon, dame de Barron », qui voit commuer son vœu d’aller en pèlerinage à Saint-Jacques-de-Compostelle, en 1317.

Isabeau ou Isabelle de Léon épouse Guillaume d’Harcourt, seigneur de Saussaye, terre située au sud d’Elbœuf, à une trentaine de kilomètres de Noyon-sur-Andelle. Ce chevalier est un grand personnage de la cour royale durant les règnes de Philippe IV le Bel, Louis X le Hutin et Philippe V le Long. En 1318, le roi lui fait remise des amendes que lui avait infligées le parlement de Paris pour avoir notamment fait emprisonner des officiers royaux. Il est alors conseiller du roi et fonde une chapellenie pour le salut des âmes de ses parents et de ses trois femmes successives, Jeanne de Thorigny, Isabelle de Léon et Blanche d’Avaugour qui ratifie cette fondation. Cette dernière est la tante de Marguerite d’Avaugour, femme d’Hervé VII de Léon, qui réclame sa part d’héritage après le décès de Blanche, en 1346.

Jean Froissart mentionne dans ses chroniques un nommé Guy de Léon qui est, à ses dires, évêque de Léon et défenseur d’Hennebont face aux troupes blésistes en 1342. Son existence semble bien hypothétique : il paraît être une invention du chroniqueur.

H. Morice signale ensuite « Raoul de Léon dit de Langueoez soit par partage, soit par alliance ». Languéouez est le nom d’un lignage implanté à Tréouergat dans le Léon. Hamon de Languéouez est un proche d’Hervé VII de Léon, qui le cite dans son testament.

A. de Blois est le seul à mentionner « Olivier, sieur de Caudan » comme frère d’Hervé VI de Léon. C’est vraisemblablement une erreur. Olivier de Léon est un des fils de Guillaume de Léon, seigneur de Hacqueville, qui est capturé avec son oncle à Porléac’h en 1342 et gratifié par ce dernier dans son testament en 1344 pour l’aider à payer sa rançon.

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Le futur Hervé VI de Léon, surnommé « le jeune », est déjà chevalier en 1297, quand il fait une donation à l’abbaye normande de Fontaine-Guérard. Vers 1302, il signe une quittance de 100 livres pour ses gages, au moment où il accompagne son père aux guerres de Flandre. L’année suivante, il est requis pour aller à Arras avec plus de deux cents autres hommes d’armes, dont son père. Après le décès de ce dernier, survenu en avril 1304, il le remplace probablement lors de la campagne de 1304 et participe sans doute à la bataille de Mons-en-Pévèle, en août, où l’armée de Philippe le Bel remporte une difficile victoire sur les Flamands. Il est encore convoqué au service du roi pour aller faire la guerre contre les Flamands en 1318, sous Philippe V le Long, et en 1328, sous Philippe VI de Valois.

Hervé VI est le bienfaiteur de plusieurs abbayes. Il passe une première lettre d’association aux prières et messes dites par l’abbé et les religieux de Langonnet en 1307 et une autre avec ceux de Saint-Mathieu en 1332. Dans la seconde, les religieux s’engagent à dire des messes pour lui, ses ancêtres et ses descendants, dans l’église du prieuré de « Goelet Forest », sur l’autel des saints Gilles et Loup récemment édifié par Hervé. Il s’agit de l’église de La Forest-Landerneau, située à quelques centaines de mètres du château de Joyeuse-Garde, édifié entre la fin du XIIIe et le début du XIVe siècle. Hervé VI ne néglige pas pour autant l’abbaye de Daoulas, fondée par ses ancêtres et devenue la nécropole familiale. Lors d’une fondation en 1317, il offre aux moines des mesures de vin et une coupe d’argent afin de dire des messes pour le repos de son âme et celle de ses ancêtres. Il sait toutefois défendre ses droits et transiger avec les moines comme ceux du Relec en Plounéour-Ménéz, en 1310.

On le voit tout aussi soucieux de ménager ses intérêts lors de plusieurs accords passés avec d’autres clercs ou seigneurs : Pierre de Kergorlay, un clerc, en 1306 et 1310, Geoffroy de Malestroit, en 1309, Hervé de Névet, la même année, Guillaume de La Haye, en 1311, Hervé Adam, en 1319, ou encore l’évêque de Léon, en 1324, au sujet des dîmes de Plabennec et de Plouénan. En 1321, il signe un traité avec Rolland de Dinan-Montafilant concernant ses droits de chasse dans les paroisses de Pleyber-Christ, Plounéour-Ménez et Plourin-Morlaix. Les deux parties s’engagent à ne pas chasser dans les bois de l’autre mais s’autorisent à y poursuivre un gibier (cerf, biche, chevreuil ou sanglier). Dans le cas où les veneurs d’Hervé de Léon abattraient une bête dans le bois de Bodister appartenant à Rolland de Dinan, ce dernier aurait la moitié de la bête, mais seulement le quart si elle est prise après l’avoir uniquement traversé. Les veneurs d’Hervé doivent également aviser les hommes de Rolland à Bodister des dates de leurs chasses. Cet accord met fin aux excès commis par les hommes du sire de Léon, abus qui ont conduit Rolland et Henri de Dinan à dévaster certains de ses moulins.

Hervé VI doit aussi veiller à la gestion de ses autres fiefs en Bretagne et en Normandie. En 1323, il récupère l’héritage de sa tante Amice, mariée à Guillaume de la Roche-Moisan, dans les « Fiefs de Léon », à l’ouest d’Hennebont. Il s’en sert pour la dot de sa fille, Jeanne de Léon, veuve du vicomte de Rohan, en 1327. On le voit aussi, en 1328, percevant des droits sur des sécheries en Poulgoazec, près d’Audierne, et à Penhir, à l’extrémité de la presqu’île de Crozon. Hervé de Léon prélève également des taxes sur les navires qui font relâche dans les ports de sa seigneurie, comme à Camaret, Daoulas et Landerneau. En Normandie, il procède en 1306 à l’amortissement de 20 livres de rentes acquises sur son fief par les maîtres et les sœurs de la Maison-Dieu de Noyon-sur-Andelle. En 1308, il conclut un accord avec son frère, Guillaume de Léon, seigneur d’Hacqueville. Il est probablement à l’origine du mariage de sa sœur Isabeau avec un voisin, Guillaume d’Harcourt. En 1325, il obtient du roi l’établissement d’un marché hebdomadaire à Bourg-Baudoin, en dépit de l’opposition de seigneurs voisins. En 1328, le roi montre sa faveur en l’autorisant à lever à son profit sur ses vassaux des subsides pour payer ses frais relatifs aux guerres de Flandre. En 1331, il assigne 15 livres de rente aux chanoines prémontrés d’Abbécourt pour une chapellenie qu’il détient en leur église. En 1336 encore, il consent à une transaction avec les religieux de Lyre, au sujet des dîmes de Pont-Saint-Pierre. Il détient, par ailleurs, des terres et des rentes à Brou et Alluye, dans le Perche, probablement transmises par sa femme. On imagine sans peine Hervé de Léon se déplaçant de l’un à l’autre de ses domaines et confiant la gestion de ses biens et l’exercice de sa justice à de multiples sénéchaux, capitaines, receveurs, sergents et officiers. Nous ne conservons que quelques bribes de son histoire, qui apparaissent au travers de procédures judiciaires, parfois interminables. En 1335-1337, Hervé VI de Léon « le vieux », son fils, Hervé VII de Léon « le jeune », et son frère, Érard, sont en procès avec Yves de Boisboissel, évêque de Saint-Malo. L’affaire est portée devant le parlement de Paris mais elle n’est toujours pas résolue en 1341.

En 1336, Hervé VI de Léon organise des « fêtes brillantes » dans son château de la Roche-Maurice. Il a déjà rédigé son testament, lorsqu’il fonde un hôpital à Landerneau, la même année. Il ordonne qu’on y dise trois messes par semaine et que l’on pourvoie à l’accueil et à l’entretien d’une douzaine de malades. En janvier 1337, Hervé VI et son épouse, Jeanne de Montmorency, reçoivent le privilège d’obtenir l’indulgence plénière à l’article de la mort par le confesseur de leur choix. Hervé meurt en juin 1337. L’abbé de Daoulas s’engage alors, à la demande de son fils aîné, à dire des messes pour le repos de son âme et de celles de ses ancêtres, fondateurs de son abbaye.

Hervé VI, seigneur de Noyon-sur-Andelle, a épousé, en 1307, Jeanne, fille aînée d’Érard de Montmorency, seigneur de Conflans-Sainte-Honorine, et de Jeanne, dame de Longueval. Par ce mariage, la maison de Léon approche le milieu des grands officiers de la couronne. Érard de Montmorency est, notamment, grand échanson et conseiller du roi de France Philippe V le Long, jusqu’à son décès, vers 1324, tandis que son fils aîné, Mathieu IV de Montmorency, est amiral et grand chambellan de France. Un autre beau-frère d’Hervé de Léon, Guillaume d’Harcourt, mari d’Isabeau de Léon, est grand queu de France. La dot de Jeanne de Montmorency est considérable puisque son père lui donne les châteaux de Frémerville en Picardie et de Croissy-en-Brie avec toutes leurs dépendances et trois mille livres pour acquérir d’autres terres. Jeanne de Montmorency a eu cinq enfants avant de s’éteindre en 1341, quatre ans après son mari : Hervé VII, qui suit, Érard, Jeanne, Mahaut et Amice.

Érard reçoit sa part du patrimoine familial en 1339. Hervé VII, son frère, lui cède les terres que leur mère, Jeanne de Montmorency, a apportées à leur père dans la baillie de Gaillefontaine dans le pays de Bray, ainsi que l’a préalablement décidé leur père, et la terre de Frémerville en Picardie. Érard doit toutefois rétrocéder à Hervé les terres qu’il détient par héritage en Bretagne. Il porte dès lors le titre de seigneur de Frémerville. Érard combat auprès de son frère au début de la guerre de Succession de Bretagne et s’occupe ensuite des affaires de son neveu, Hervé VIII, dans les années 1355-1360. Il témoigne lors du procès de canonisation de Charles de Blois en 1371. Il est alors âgé de 55 ans, ce qui situe sa naissance vers 1316.

Jeanne de Léon, fille aînée d’Hervé VI, est mariée à Olivier, vicomte de Rohan, veuf d’une première union, en 1322. Elle reçoit alors 700 livres de rente assises sur les terres de la paroisse de Baud. En 1327, après le décès de son époux, son père lui octroie, en remplacement de sa rente, portée à 900 livres, « toutes les terres, rentes, fié & damoene que Madame Amice Leon ot jadis en Brouerec et Quemenétheboé ». Elle se remarie à Jean, seigneur de Derval, un proche du duc de Bretagne Jean III, qui lui concède la châtellenie de Pontcallec. Elle est inhumée aux Carmes de Ploërmel avant 1337, date du décès de son mari. Son frère, Hervé VII, gratifie ses neveux de cent livres de rente dans son testament.

Mahaut, appelée comtesse, devient la femme d’Hervé de Pont-l’Abbé, selon le contrat de mariage passé entre son père Hervé VI de Léon et Geoffroy de Pont-l’Abbé en 1318. Son père lui octroie une rente de 300 livres à percevoir sur les terres « dou Chastel de Coetmel » (Coat-Méal) quand Hervé du Pont, mineur, aurait quatorze ans, soit la majorité, et 1 500 livres en monnaie courante. Cet accord devient effectif en 1328, après le décès de Geoffroy du Pont, à la condition qu’Hervé du Pont obéisse au fils d’Hervé de Léon comme un juveigneur à son aîné. Hervé du Pont périt dans les rangs blésistes à la bataille d’Auray, après avoir, comme son beau-frère Hervé VII de Léon, un temps soutenu la cause de Jean de Montfort au début de la guerre de Succession.

Hervé VII de Léon concède sa part d’héritage à sa sœur Amice en 1339, après le décès de leur père. Il lui octroie 500 livres de rente à percevoir sur des terres en Normandie et en Île-de-France et 2 000 livres de monnaie courante à payer en cinq fois à compter de son mariage. Amice est unie à Olivier, fils du sire de Tinténiac, en 1343, au moment où Hervé VII est captif en Angleterre. Il revient à Charles de Blois et Jeanne de Penthièvre de confirmer le contrat de mariage, avec l’accord de plusieurs nobles de haut rang et de son frère, Érard de Léon. Charles de Blois s’engage notamment à lui garantir le versement de ses 500 livres de rente par son frère mais requiert d’Amice et de son mari qu’ils renoncent à toute autre part d’héritage de leurs « père et mère ». À la mort d’Olivier de Tinténiac, Amice se remarie avec Guillaume du Chastellier, vers 1349. Elle a beaucoup de peine à percevoir ses rentes en dépit de ses nombreuses réclamations auprès de sa belle-sœur, Marguerite d’Avaugour, tutrice d’Hervé VIII de Léon. Philippe VI de Valois, roi de France, rend un premier mandement en faveur d’Amice en 1349. Le litige n’est toutefois toujours pas réglé dans les années 1359-1360. Les terres sur lesquelles ces rentes ont été assises ayant été ravagées par les guerres et les épidémies. En 1377 encore, Jean du Chastellier, fils d’Amice et de Guillaume, en appelle au roi de France, après la mort de ses parents, pour obtenir auprès d’Alain de Rohan, seigneur de Léon, le paiement de ce qui lui reste dû.

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Hervé VII de Léon succède à son père en 1337. Il commence par octroyer son douaire à sa mère, Jeanne de Montmorency, en octobre. Il lui cède 1 200 livres de rente par an, certaines quantités de grains, la jouissance du manoir de « Rosenc » dans le diocèse de Quimper et de celui de Bois-Hérot en Normandie. Peu après, Jeanne lui abandonne tous ses héritages, moyennant un revenu supplémentaire de 200 livres et divers versements en nature sa vie durant. Hervé VII partage ensuite l’héritage paternel avec une de ses sœurs, Amice, et son frère, Érard.

Il a épousé Marguerite de Retz en 1323 ou 1326. Elle est la fille de Girard III Chabot, seigneur de Retz, et de Marie de Parthenay. Elle reçoit en dot 1 300 livres de rente et décède le 20 mai 1333 ou 1334. Hervé VII fonde pour elle et pour son père, Hervé VI, une messe anniversaire à l’abbaye de Daoulas en 1337.

Hervé se remarie avec une riche héritière, Marguerite d’Avaugour, fille de Henri III d’Avaugour, seigneur de Goëllo et de Mayenne, et de Jeanne d’Harcourt. Marguerite d’Avaugour est la tante de Jeanne de Penthièvre, fille de Guy de Bretagne, seigneur de Penthièvre, et de Jeanne d’Avaugour, principale héritière d’Henri III d’Avaugour et nièce du duc Jean III, qui épouse Charles de Blois en 1337. Un premier accord est passé en mars 1339 entre Hervé de Léon, Charles de Blois et sa femme, Jeanne de Penthièvre, pour déterminer la part d’héritage de Marguerite. Elle reçoit, à titre provisoire, 300 livres de rente pour les terres de Mayenne et 500 livres en monnaie courante. En 1354, Charles de Blois ordonne que l’on verse à Marguerite une rente annuelle de 1 000 livres sur des terres en Normandie. Marguerite d’Avaugour revendique notamment une part du patrimoine de son grand-père, Henri d’Avaugour, et de sa sœur, Blanche, en Goëllo, Mayenne et Normandie. Le riche héritage d’Avaugour donne lieu à de nombreuses contestations jusqu’à la fin du XIVe siècle. D’autres procédures opposent Hervé VII de Léon et Marguerite d’Avaugour à l’évêque de Saint-Malo mais aussi à celui de Quimper, son sénéchal et Hervé de Pont-l’Abbé, jusqu’en 1347 au moins.

En raison de ses possessions en Normandie et en France, Hervé VII doit le service d’ost au roi de France. Il combat sans nul doute dès le début de la guerre de Cent Ans en Flandre, durant l’été 1340 et s’illustre durant la première année de la guerre de Succession de Bretagne, en 1341-1342. Nous demeurons, pour cette période, bien trop tributaires des chroniques de Jean Froissart qui relate qu’après la mort de Jean III, duc de Bretagne, en avril 1341, Hervé de Léon se serait rangé sous la bannière de Jean de Montfort durant l’été et l’automne 1341. Il est ainsi le seul grand baron breton à répondre à l’invitation de Jean de Montfort qui a convoqué une assemblée à Nantes en mai 1341. Il l’accompagne lors de la chevauchée qui, en juin-juillet, lui donne bon nombre de places en Bretagne dont Brest, une des rares à lui opposer quelque résistance, tandis que d’autres se soumettent grâce à l’entremise d’Hervé de Léon. Cependant, par l’arrêt de Conflans-Sainte-Honorine, en septembre, le roi de France désigne Charles de Blois comme duc de Bretagne, au nom de sa femme. En novembre 1341, il lui accorde son soutien militaire en levant une armée qui vient mettre le siège devant Nantes, tenue par Jean de Montfort. Hervé de Léon commande alors une sortie désastreuse qui se solde par de nombreuses pertes dans les rangs des montfortistes. Les reproches que lui adresse Jean de Montfort entraînent son revirement. Peu après, Jean de Montfort rend la ville de Nantes, avant d’être contraint de plaider sa cause auprès du roi qui le fait emprisonner.

Les récits de Froissart – qui reprend ceux de Jean le Bel – étant quelque peu embrouillés, notamment d’un point de vue géographique et chronologique, Arthur de La Borderie a essayé d’y remettre un peu d’ordre dans son Histoire de Bretagne. D’autres historiens, comme M. Jones, ont clairement indiqué depuis que la chevauchée de l’été 1341 n’est probablement qu’un mythe tant il paraît impossible, en deux mois, d’aller mettre la main sur le trésor ducal à Limoges, mener plusieurs sièges ou rallier des capitaines de châteaux et de villes et se rendre en Angleterre puis à la cour du roi à Paris. Nous manquons ainsi d’autres sources pour confirmer qu’Hervé VII de Léon fut bien, initialement, un partisan de Jean de Montfort. M. Jones doute ainsi qu’ il « ait soutenu, même pour un instant, Jean de Montfort ».

Un acte nous montre avec certitude qu’Hervé est présent auprès de Charles de Blois lors d’une donation, le 20 février 1342. Ce revirement n’est pas sans risques pour lui si on considère qu’en décembre 1341 Robert d’Artois fait, pour le compte du roi d’Angleterre, l’allié de Montfort, une première incursion en Bretagne afin d’y malmener les partisans de Charles de Blois. L’hiver 1341-1342 donne lieu à de nombreuses tractations. Henri de Malestroit, maître des requêtes de l’hôtel du roi, se rend ainsi à Brest pour négocier avec Jeanne de Flandre, épouse de Jean de Montfort. Il organise le ralliement de plusieurs chevaliers qui ont choisi la cause de Montfort. Parmi ceux-ci se trouve Tanguy du Chastel, capitaine du château de Brest et vassal peu fidèle d’Hervé de Léon qui, par une lettre du 28 février 1342, fait savoir au roi qu’il se bat alors « contre messire Charles de Blois & Mr Hervé de Léon qui grever & destruire me vouloient & voulent enquores… ». Néanmoins, il accepte de se soumettre au roi. Cette soumission est de très courte durée, tout comme la trêve conclue le 1er mars 1342, car des négociations menées à Paris échouent. Durant ce temps, Jeanne de Flandre négocie une alliance avec le roi d’Angleterre. Une expédition anglaise débarque à Brest vers le 20 mai 1342. Son chef, Gautier de Mauny, aidé de Tanguy du Chastel, va surprendre Hervé VII de Léon qui séjourne avec plusieurs dizaines d’hommes dans le manoir épiscopal de Porléac’h, à Trégarantec, à trois kilomètres au sud-est de Lesneven. Ils le capturent avec ses proches et plusieurs de ses principaux vassaux parmi lesquels son frère, Érard, un cousin, Olivier, Emery du Pont et Raoul de Rosmadec. Ils sont envoyés en captivité en Angleterre au début de juillet 1342. C’est un rude coup porté au parti de Blois en Basse-Bretagne d’autant plus que la même troupe vient au secours d’Hennebont vainement assiégée par une armée franco-bretonne, en juin 1342. Une autre troupe anglaise, débarquée sur les côtes léonardes à la mi-août, oblige les blésistes à lever précipitamment le siège de Brest, investit le château de Joyeuse-Garde en La Forest-Landerneau et tente de s’emparer de Morlaix au début de septembre.

Hervé VII ne reparaît plus sur les champs de bataille bretons. Dès le 2 juin 1342, Guillaume de Montaigu, comte de Salisbury, prisonnier du roi de France essaie, à Vincennes, de négocier sa propre délivrance contre celles de John Randolph, comte de Moray, et d’Hervé de Léon. Cette transaction échoue. Hervé est toujours captif en Angleterre lors du mariage de sa sœur Amice un an plus tard, en juin 1343. C’est encore Jean Froissart qui nous renseigne sur les conditions de sa libération. Après l’exécution d’Olivier de Clisson et de plusieurs autres chevaliers bretons, en août et novembre 1343, par le roi de France, Philippe VI de Valois, en violation de la trêve de Malestroit, le roi d’Angleterre est tenté d’en faire autant avec Hervé de Léon, son prisonnier. Le comte de Derby l’en dissuade. Edouard III met Hervé de Léon à rançon pour dix mille écus et le charge d’aller porter une déclaration de guerre au roi de France. L’infortuné Hervé de Léon est pris dans une tempête lors de la traversée de la Manche, tourmente au cours de laquelle il perd la santé. Il décède peu après avoir remis son message au roi, nous dit le chroniqueur, « en allant en son pays en la cité d’Angiers » (Angers). Encore une fois, il est difficile de s’assurer des dires du chroniqueur. Des opérations militaires d’envergure ne reprennent qu’en 1345.

Hervé VII a pris soin de rédiger le codicille de son testament à Paris, le 6 septembre 1344, sans doute avant de rejoindre la Bretagne. En janvier 1345, le duc de Normandie, fils du roi de France et garde du fils mineur de « feu mes. Hervé de Léon », cède à Hervé de Léon tous les droits qu’il détient en la terre de son père dans les bailliages de Rouen, Caux et Gisors. Cette même année, le duc de Bretagne tient la terre de « l’enfant de Léon » durant la période de rachat des biens d’Hervé. La situation n’est pas des plus faciles, en raison des guerres. Les Anglais occupent Brest et plusieurs châteaux léonards. En 1343, Édouard III institue John Gatesdene comme capitaine de Brest et gardien de la vicomté de Léon. Quelques années plus tard, William de Bohun, lieutenant général du roi d’Angleterre en Bretagne, récompense le chef de guerre anglais Thomas Dagworth avec des terres confisquées à Hervé de Léon. Il en fait de même au profit d’Henri de Kaer en 1350.

Il ne semble pas qu’Hervé ait eu des descendants de sa première épouse, Marguerite de Retz. Sa seconde femme, Marguerite d’Avaugour, lui en donne au moins quatre : Hervé VIII, qui suit, Jeanne, Marie et Catherine.

Jeanne de Léon est mariée à Jean Ier, vicomte de Rohan, en 1349. Elle lui porte les terres de Léon, à la mort de son frère, décédé sans héritier, en 1363, et s’éteint en 1373. Son époux se remarie avec Jeanne de Navarre, sœur du roi de Navarre, et meurt en 1396. Jeanne de Léon a eu cinq enfants, Alain VIII, vicomte du nom, Edouard, Marguerite, Jeanne et Guy.

Marie de Léon épouse Jean de Kergorlay qui lui assigne son douaire en 1362, avant de périr à la bataille d’Auray dans les rangs blésistes, en 1364. Elle reçoit pour dot 500 livres de rente et elle en a autant lorsque son frère, Hervé VIII, rédige son testament. Marie se remarie à un seigneur normand, Jean Mallet, seigneur de Graville, avant 1369, date à laquelle elle reçoit sa part d’héritage de sa sœur Jeanne, après lui avoir fait un procès. Elle obtient la moitié des terres de ses parents situées en Normandie, notamment les châtellenies de Buchy, Malvoisine et Acquigny, tandis que Jeanne conserve Noyon et Radepont, plus Pont-Saint-Pierre, alors affecté comme douaire à leur mère.

Catherine de Léon épouse en premières noces Henri de Plédran, un chevalier, conseiller de Charles de Blois et de Jeanne de Penthièvre. Elle passe avec lui un contrat de donation mutuelle en 1392. Après le décès de son époux, en 1397, elle se remarie à un cousin, Guillaume de Léon, sire d’Hacqueville, petit fils de Guillaume de Léon, frère d’Hervé VI. En raison de son âge – une soixantaine d’années – il faut peut-être y voir une tentative des Léon d’Hacqueville pour récupérer une partie des terres de leurs ancêtres. Ils vendent peu après à Alain VIII de Rohan les biens que Catherine de Léon a eus en Bretagne.

Selon L. Urvoy de Porzamparc, Hervé VII aurait eu une quatrième fille, Marguerite, épouse d’Yvon de Trogoff. Elle n’est toutefois jamais mentionnée dans les actes de partage et doit, selon nous, être rattachée à une branche cadette.

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Hervé VIII de Léon naît au château de la Roche-Maurice, en novembre 1341, selon une note inscrite par un chapelain sur la Bible des sires de Léon. Il connaît à peine son père qui est capturé six mois plus tard et détenu pendant deux ans en Angleterre avant de décéder en 1344. Hervé VIII a une jeunesse sans doute agitée en raison des combats de la guerre de Succession de Bretagne, élément breton de la guerre de Cent Ans qui affecte, par ailleurs, ses terres normandes. Placé sous la garde de son vassal, Yvon de Coëtmeur, et de sa mère, Marguerite d’Avaugour, tutrice et garde de ses biens, il la suit probablement dans ses déplacements entre le Léon, la Normandie et sans doute Paris. On conserve plusieurs lettres et accords passés entre Marguerite d’Avaugour et sa nièce, Jeanne de Penthièvre, épouse de Charles de Blois. Ils concernent essentiellement l’héritage d’Avaugour et notamment la jouissance d’un hôtel à Paris que Jeanne de Penthièvre abandonne à ses tantes en 1348. Les liens sont étroits entre Marguerite d’Avaugour, Jeanne de Penthièvre et Charles de Blois, en dépit des contestations liées aux partages successoraux. Ces deux derniers s’occupent notamment, en 1343, du mariage d’Amice de Léon, sœur d’Hervé VII captif, avec Olivier de Tinténiac.

En janvier 1356, Hervé de Léon, « sous âge », c’est-à-dire encore mineur, assisté de son oncle Érard de Léon, assigne à Rouen son douaire à sa mère, Marguerite d’Avaugour, à savoir les biens normands de Pont-Saint-Pierre, La Neuville-Chandoiselle, Bacqueville, les moulins de Romilly et de Daville. Hervé de Léon semble alors être confié à son grand-oncle, Érard de Léon. H. Morice a publié quatre lettres des années 1359-1360 relatives à la part d’héritage réclamée par Amice, tante d’Hervé et sœur d’Érard. La première est adressée depuis le château de la Roche-Maurice par Hervé de Léon à Guillaume du Chastellier en septembre 1359. Il lui propose d’asseoir cette part sur des terres en Normandie, avec l’accord de Charles de Blois. Toutefois, le 15 décembre suivant, Érard de Léon écrit depuis le château de « Boscheieuc », en Normandie, que les terres devant servir à l’assiette de ces rentes sont alors soit saisies soit sans revenu car elles ont été ravagées lors des guerres. L’accord intervient six mois plus tard, le 16 juin 1360, par l’entremise d’Érard, présent à la Roche-Maurice. On voit ainsi Érard, sire de Fremerville, près d’Amiens, revenir en Bretagne où il s’était illustré aux côtés de son frère, Hervé VII, au début de la guerre de Succession.

Hervé VIII, déjà cité comme écuyer en 1356 – il a tout juste treize ans – , prend part aux derniers combats de la guerre de Succession. En juillet 1363, il est présent à la rencontre de la Lande d’Évran, au nord de Bécherel, une place anglo-montfortiste assiégée par les blésistes. Au lieu de livrer bataille, Charles de Blois et Jean de Montfort décident de négocier un compromis de paix et s’échangent des otages. Hervé de Léon est, avec son beau-frère, le vicomte de Rohan, un de ceux donnés par Charles de Blois. Ces otages sont conduits, selon Guillaume de Saint-André, à Penmur et à Guérande, places tenues par les montfortistes sur la côte sud de la Bretagne. C’est non loin de là, tandis que les négociations entre les deux partis traînent en longueur du fait de l’hostilité de Jeanne de Penthièvre à toute partition de la Bretagne, que nous retrouvons Hervé de Léon. Le 21 août 1363, ce dernier, seulement âgé de vingt et un ans, rédige son testament à l’abbaye de Prières. Peut-être y a-t-il été acheminé depuis le château de Penmur, distant de cinq kilomètres, pour y être soigné. Malade mais sain d’esprit, précise-t-il, il indique tout d’abord qu’il souhaite être enterré, comme ses prédécesseurs, dans l’abbaye de Daoulas, confirme le douaire octroyé à sa mère et les dispositions prises par lui à l’égard de son épouse dont le nom ne nous est pas connu. Il fonde deux chapellenies perpétuelles dans l’église de la Roche-Maurice, proche de son château, et lègue cent livres de revenus annuels pour l’entretien des chapelains. Profitant également de ses libéralités, l’abbaye de Prières obtient une rente de deux cents livres par an, celle de la Joie près d’Hennebont, cent moutons d’or, le monastère de Daoulas, cent livres, l’hôpital de Bourg-Blanc, cent livres. Le couvent des dominicains de Morlaix, ceux des frères mendiants des diocèses de Léon, Cornouaille et Tréguier, les fabriques de plusieurs églises et chapelles du Léon reçoivent aussi des dons. Hervé n’oublie pas ses parents comme sa sœur, Marie, épouse de Jean de Kergorlay, un de ses exécuteurs testamentaires, ou encore sa cousine, une autre Marie, fille d’Érard de Léon, et ses proches, chapelain, serviteurs, barbier et d’autres dont les fonctions et le rôle ne nous sont pas connus. Le 21 janvier 1364, Charles de Blois ordonne aux sénéchaux de Léon et de Cornouaille de permettre à Marguerite d’Avaugour de jouir des droits sur le tiers des terres de son fils défunt jusqu’à l’assiette de son douaire.

À la mort d’Hervé VIII, décédé sans enfant, les terres de Léon passent dans les mains de Jeanne de Léon, sa sœur aînée qui, en 1349, a épousé Jean de Rohan. Il est spécifié dans leur contrat de mariage que leur héritier portera les armes de Léon et de Rohan écartelées. Jeanne décède en 1373 et est inhumée à l’abbaye de Bon-Repos, nécropole de la famille de Rohan. Leur fils aîné, Alain, encore mineur, porte le titre de « sire de Léon » et fait ses premières armes avec Bertrand du Guesclin et Olivier de Clisson, notamment lors du siège de Brest en 1378. Devenu vicomte de Rohan en 1396, il a épousé Béatrice de Clisson, la fille du connétable Olivier de Clisson, mariage qui permet encore aux Rohan d’accroître leurs possessions. Le nom de Léon est toujours porté par les seigneurs de Hacqueville, en Normandie, dans la première moitié du XVe siècle.