Tudchentil

Les sources sur les gentilshommes bretons

L'histoire de Keroulas

Du Moyen Âge à nos jours

Par la famille de Keroulas.

Depuis le Moyen-Âge, le berceau de la famille de Keroulas se trouve au manoir de Keroulas à Brélès, en Pays de Léon. Plus de 6 siècles et près de 20 générations plus tard, cette belle demeure du XVIIe siècle est toujours la résidence de descendants de la famille.

Le manoir de Keroulas conserve de précieuses archives dont les plus anciennes datent de la fin des années 1300. Elles ont permis de remonter aux périodes les plus reculées de l’histoire familiale.

Le nom de famille de Keroulas s’est éteint en Pays de Léon au XVIIIe siècle. Les Keroulas d’aujourd’hui descendent de Ronan Mathurin de Keroulas (1730-1810) qui s’installe vers 1764 au manoir de Tal ar Roz au Juch près de Douarnenez. Sa nombreuse postérité estimée à plus de 5.000 personnes a surtout essaimé au Juch et dans les communes environnantes.

Ce beau livre illustré, travail collectif de plusieurs enfants de la famille, vous invite à plonger dans la destinée des Keroulas, à suivre son évolution au fil des siècles et à découvrir de nombreux épisodes parfois très surprenants.

Le livre est en vente chez l’éditeur aux éditions Récits au prix de 35 €.

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Voute et sablière de l'église Saint-Melaine de Morlaix, XV et XVIe siècles.
Photo A. de la Pinsonnais (2009).

L’ost de Bretagne au XIIIe siècle

Dimanche 18 mai 2008, par Hervé Torchet.

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Hervé Torchet, L’ost de Bretagne au XIIIe siècle, 2008, en ligne sur Tudchentil.org, consulté le 16 avril 2024,
www.tudchentil.org/spip.php?article509.

L’ost est une troupe composée des vassaux d’un seigneur.

Une liste récapitulant la totalité d’une assemblée de cette troupe est évidemment un précieux renseignement.

J’ai découvert en publiant l’Histoire de Bretagne de Bertrand d’Argentré dans sa version censurée en 1582 que la liste des vassaux du duc qui ont souscrit à la fondation de la ville ducale de Saint-Aubin du Cormier, en 1225, présentait d’étranges similitudes avec celle dite de l’ost de 1294, maintes fois commentée.

Voici quelques-unes des analyses que j’ai faites :
(en bas de page les images présentant les deux listes)

La colonne de gauche (fondation de Saint-Aubin) est dans l’ordre donné par d’Argentré (entremêlé d’éventuelles nuances de la liste telle que Dom Morice la publie d’après un vidimus du XVe siècle, Pr. I. 854). On voit du premier oeil la symétrie et donc le caractère féodal de la liste de 1225 qui, par bien des côtés, apparaît comme la première montre connue des vassaux ducaux toutes baillies confondues et non seulement comme une liste de témoins fondée sur le bon vouloir et les affinités de chacun.

Le chiffre qui accompagne les vassaux de 1294 est celui du nombre de chevaliers qu’ils déclarent devoir. On remarque aussitôt la densité des vassaux à 2 chevaliers dans la colonne de gauche. Ce sont surtout les grands qui sont comptés. Ceux que l’on voit moindres émanent surtout des baillies de Rennes et de Ploërmel et Broérec, qui sont toutes proches de Ploërmel et de Saint-Aubin-du-Cormier.

En Cornouaille, cette surreprésentation des grands est encore plus nette : il y a en 1294 quatre vassaux qui doivent 2 chevaliers chacun : deux ramages de Poher (Kergorlay et Rostrenen), Pont-l’Abbé (qui en ajoute 1 pour Goarlot en Kernével près Quimperlé), et Fouesnant. La similitude de prénom pourrait donner à penser qu’Henri sénéchal de Cornouaille (on sait par ailleurs qu’il se nomme Henri Bernard) pourrait être un Fouesnant. Pour le reste, les deux Poher sont en 1225 Pierre fils de Hamelin de Poher et son frère Tanguy. On sait que le prénom Pierre est courant aussi bien chez Kergorlay que chez Rostrenen et Tanguy est un prénom que l’on rencontre chez Kergorlay. On a donc bien en 1225 la même liste que celles des grands de 1294. L’anomalie est seulement Le Faou, qui semble bien plus éminent en 1225 qu’en 1294, mais on verra à propos de l’héraldique qu’il y a fort à parier sur une mutation profonde de son fief entre ces deux dates. Pont-l’Abbé et Fouesnant surveillent l’Odet qui est l’accès le plus vulnérable de Quimper. Kergorlay et Rostrenen sont placés sur les deux routes les plus naturelles de Carhaix. Rien pour Crozon, Châteaulin, Douarnenez, sinon Le Faou : il est évident que la composition du contingent de Cornouaille a été déterminée à l’époque où les comtes locaux ont un château inexpugnable à Châteaulin : deux pour Quimper, deux pour Carhaix, ils sont eux-mêmes le deuxième (avec Le Faou) pour l’espace ouest-nord-ouest de leur comté.

On constate des anomalies : Olivier de Tinténiac paraît en 1225 sous Rennes, ce qui est logique, mais en 1294 seulement sous Broérec du fait de son fief de la Rochemoisan dont l’importance est évidente ; R. de Melecia vient en 1225 sous les couleurs de Ploërmel et Raoul de Malesse en 1294 sous celles de Rennes ; on pourrait y voir une dualité d’implantation qui se retrouve au XVe siècle, mais la liste de Dom Morice fait la correction d’elle-même ; Sylvestre de la Bouteillerie qui relève de l’évêque de Dol et dont le fief est situé en Combourg dans le diocèse de Saint-Malo entre Rennes et Dol, est compté en 1294 dans la baillie de Ploërmel, or on trouve dès le début du XIe siècle Rigaud le Bouteiller, certainement son ancêtre, témoin avec Ginguené évêque-archevêque de Dol de la restauration de l’abbaye de Saint-Méen, au beau milieu du Porhoet et très près de Ploërmel. Plus intrigante est a priori la présence de R. de Montfort en 1225 sous Rennes et en 1294 sous Ploërmel, mais la seigneurie de Montfort relève au fiscal de la châtellenie de Rennes au XVe siècle encore et Gaël est plus proche de Ploërmel. Donc rien d’inexplicable.

L’énumération de 1225 comme celle de 1294 commence par les Rennais : de toute évidence, le schéma féodal général est mis en place dans la première moitié du XIe siècle par le duc Alain, de la maison de Rennes. En 1225, ce sont même des représentants des deux ramages de Rennes (Vitré et La Guerche) mentionnés par d’Argentré et tous deux antérieurs à 1050 qui mènent la troupe. Si l’on ne peut affirmer avec le même aplomb que d’Argentré que Rennes est depuis toujours la capitale de la Bretagne, force est de constater qu’en ce qui touche la féodalité, Rennes est à la fois le centre et la prééminence du duché, alors même que les Cornouaille ont régné bien plus longtemps (et surtout postérieurement) que les descendants des comtes de Rennes. Le système reste sur la lancée de sa fondation.

On voit beaucoup de Dinan sous Rennes en 1225, et plutôt en Penthièvre en 1294. C’est là notamment question de frontière et l’on doit se souvenir qu’en 1225, la querelle du bail de Penthièvre est toute fraîche. Par conséquent, il faut à la fois affirmer le pouvoir ducal (donc Rennes pour la raison dite ci-dessus) et minimiser le Penthièvre confisqué. Au cas où. À moins qu’il n’y ait trace d’une distribution contemporaine du partage ducal qui a vu naître le Penthièvre, mais il manque des indices en ce sens. La dernière hypothèse serait que les Dinan sont sous Rennes en 1225 et s’y retrouvent sous la forme de quelques-uns des 10 chevaliers de l’évêque de Dol de 1294. L’attribution de Courréon aux Dinan a sûrement joué un rôle dans la bascule.

Du reste, la répartition entre baillies de Penthièvre et de Tréguier a été difficile à faire dans la colonne de d’Argentré. Et si la baillie de Tréguier se révélait postérieure à 1225 ?

Bien entendu, le fait que le groupe de 1225 commence par le premier vassal de la baillie de Tréguier de 1294 (Avaugour) puis par le premier de celle de Penthièvre à la même date (Coiron, Coronan ou Coréon ?) milite dans ce sens. O. Tournemine se dédouble ensuite en 2 chevaliers en Penthièvre et 2 autres en Tréguier. Eudon d’Argenton est un Breton de fraîche date, un Français, on trouve son patronyme cité à propos de Dol en 1213 et de Dinan en 1250, mais en Trégor encore (donc dans l’orbite d’Avaugour) en 1426 et son prénom, très "Penthièvre" suggère qu’il est le fruit d’une alliance Argenton-Penthièvre ; et Eudon, fils de Merien ou de Morvan, pourrait bien appartenir à la très ancienne maison du Cosquer qui, implantée sous Tréguier, porte en toute simplicité pour armes les emblèmes de l’évêché de Léon, ce qui renvoie aux conflits frontaliers évoqués plus haut datant du XIe siècle. L’absence du vicomte de Tonquédec de la liste de 1225 laisse perplexe ; cette seigneurie pourrait être déjà à l’époque entre les mains de Coetmen, à qui elle est venue par alliance. Mais peut-être l’un des personnages désignés comme "fils de" est-il en fait le dernier de Tonquédec.

La division de l’ancien Penthièvre en deux baillies répond à la réalité du fief et le fait que Corron (ou Cour-Éon ? On verrait là Cor-Ouan plutôt que Coronan, et en 1294 Courr-Éun, il s’agirait de la Cour d’Eudon, fondateur du Penthièvre), premier cité de la portion Penthièvre, soit confié à Dinan qui a prouvé son soutien indéfectible aux autorités les plus fortes (Plantagenêt en 1160, Mauclerc durant la guerre du bail en 1220) et les plus centrales - sinon toujours les plus légitimes - donne à penser qu’on a voulu ancrer avec détermination les territoires annexés au pouvoir ducal. De là sans doute le transfert des Dinan du groupe rennais de 1225 vers celui de Penthièvre : la fidélité au duc.

Quant à l’évêque de Dol dont l’inféodation faisait l’objet de la guerre des années 1030 entre Rennes et Penthièvre, on le voit solidement implanté sous Rennes : il précise même que les 10 chevaliers qu’il déclare devoir sont à acheminer par lui jusqu’à Rennes même ; on ne peut être plus clair.

Il n’est pas indifférent de considérer le début de chaque groupe dans la version de 1225.

Rennes : Vitré puis La Guerche ; Nantes : Ancenis puis Derval ; Ploërmel et Broérec : Montauban puis Rohan ; Penthièvre et Tréguier : Avaugour puis "Couréon" ; Cornouaille : le sénéchal (en lieu du comte ?) puis Poher ; Léon : Léon puis Léon. Vitré et La Guerche sont ramages de Rennes, Montauban et Rohan sont ramages de Porhoet, Avaugour est Penthièvre, Poher (dans cette forme vicomtale) paraît ramage de Cornouaille, Léon est Léon. On voit donc avec précision la logique se dessiner et il faut bien qu’Ancenis et même Derval soient ramages (agnatiques ?) de Nantes. De même, "Couréon" qui est à Dinan en 1294 se présente comme un ramage de Penthièvre. Quant au sénéchal de Cornouaille, son cas est plus complexe car son titre le destine peut-être à représenter le comte devenu duc ; du reste, son patronyme Bernard n’exprime aucune caractéristique certaine et on doit peut-être deviner Gourin, Poher ou Fouesnant sous son masque. L’absence d’un représentant du comte de Nantes combinée à l’éventuelle substitution du sénéchal au chef cornouaillais traduit-elle le fait que l’ost a été conçu à l’époque où le comte de Cornouaille l’était aussi de Nantes (faute de quoi un comte de Nantes aurait sans doute reçu lui aussi un sénéchal pour tenir sa place) ? Peut-être.

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