Pierre de Dreux (1213-1250) et Saint-Aubin du Cormier
Lundi 27 octobre 2008, par
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Bulletin et mémoires de la société d’histoire et d’archéologie du Pays de Fougères, t. XLIII, 2005, p. 1-19.Citer cet article
Frédéric Morvan, Pierre de Dreux (1213-1250) et Saint-Aubin du Cormier, 2008, en ligne sur Tudchentil.org, consulté le 5 octobre 2024,www.tudchentil.org/spip.php?article549.
Dans un article précédemment publié dans le Télégramme de Brest [1], nous avions écris les quelques lignes qui vont suivre sans pouvoir y adjoindre des notes qui étaient alors trop abondantes. Ces notes étaient pourtant essentielles car elles révélaient l’importance de Pierre de Dreux, fondateur de la dynastie qui régna sur la Bretagne jusqu’à la mort d’Anne de Bretagne, mais aussi le rôle de Saint-Aubin du Cormier qui devait devenir le principal élément de défense tenue par le duc de Bretagne dans Nord de son duché. Cette place fortifiée avait de même pour but de montrer le retour de la puissance ducale aux seigneurs du Nord-Est du duché de Bretagne qui étaient devenus presque autonomes à la fin du règne des Plantagenêts. En effet, au début du XIIe siècle, les seigneurs de Dinan, de Fougères et surtout de Vitré étaient en pleine expansion territoriale et politique. Le seigneur de Vitré, par son mariage avec la princesse Catherine de Bretagne, belle-sœur de Pierre de Dreux, avait acquis presque tous les domaines ducaux dans le comté de Rennes. Pierre de Dreux, en fondant Saint-Aubin-du-Cormier, donna des privilèges importants à ses habitants qui devaient être protégés par un puissant et moderne château. Les seigneurs de la région ne pouvaient pas en faire autant.
Mais qui fut donc Pierre de Dreux ? Il faut en fait revenir au début du XIIIe siècle pour répondre à cette question.
Le roi de France, Philippe Auguste, qui contrôlait les destinées de la Bretagne depuis le début du siècle, ordonna le mariage ou plutôt les fiançailles, car elle n’avait que treize ans, d’Alix de Thouars, duchesse de Bretagne, avec un prince de la maison royale de France, Pierre de Dreux. Pourquoi cette décision ?
Pierre, le choix du roi de France
Dès le début du siècle, la Bretagne fut un enjeu entre les Capétiens et les Plantagenêts. Jean sans Terre avait besoin de la Bretagne pour garantir la liaison entre son royaume d’Angleterre et son duché d’Aquitaine. Philippe Auguste l’avait parfaitement compris et avait appuyé la révolte du neveu de Jean sans Terre, Arthur, duc de Bretagne, fils de son frère Geoffroy Plantagenêt et de la duchesse Constance de Bretagne [2]. Après l’assassinat d’Arthur par son oncle en 1203, Philippe Auguste écarta de la succession au trône de Bretagne Aliénor, sœur d’Arthur, alors en Angleterre, pour lui préférer sa sœur cadette, Alix, fille de Constance et du poitevin Gui de Thouars [3]. Le mariage de la nouvelle duchesse de Bretagne devint alors une affaire d’Etat. Elle avait été d’abord fiancée en 1209, à dix ans, à Henri de Penthièvre, qui avait quatre ans. Il était le fils du plus puissant seigneur breton, seul descendant en ligne masculine des anciens ducs bretons, alors que la dynastie régnante n’était arrivée au pouvoir que par des successions féminines plusieurs fois renouvelées [4]. Mais le retour d’une dynastie bretonne sur le trône de Bretagne ne se fera pas.
Le roi de France décida donc d’imposer à Alix, comme mari, Pierre de Dreux, un de ses plus proches parents. Il était le second fils du comte de Dreux, longtemps second héritier au trône de France et descendant direct du roi Louis VI le Gros. Pierre était donc un Capétien et possédait en propre quelques domaines en Champagne et en Ile-de-France [5]. La fidélité, sans faille, des Dreux au roi valut à Pierre de vivre à la cour, d’être fait chevalier par le roi lui-même [6] et enfin d’obtenir la main d’une riche héritière [7].
Face aux menées du roi d’Angleterre, le roi de France avait besoin d’un homme de guerre valeureux pour défendre la Bretagne et surtout pour lui amener un contingent militaire breton conséquent. Or, les deux principaux alliés de la France en Bretagne étaient mourants. Le père d’Henri de Penthièvre décéda le 29 décembre 1212, le père d’Alix, le 23 avril 1213. Le fiancé d’Alix, Henri de Penthièvre n’avait encore que sept ans. Par contre, Pierre de Dreux, vingt-deux ans, avait déjà combattu en Artois [8]. Mais, avant de lui céder la Bretagne, le roi exigea de lui de solides garanties. Pierre dut lui prêter un serment de fidélité gagée sur ses biens et ceux de sa famille (novembre 1212) [9]. Il dut aussi se soumettre à lui par un hommage strict, dit lige (27 janvier 1213) [10]. Philippe Auguste ne s’était pas trompé. Le nouveau souverain de Bretagne participa à la défaite du roi d’Angleterre en 1214 [11].
Pierre, le restaurateur du pouvoir ducal
Auréolé de gloire, Pierre, au nom de son épouse [12], mena la même politique que son auguste mentor, le roi de France. Il voulut affermir son pouvoir et étendre son Domaine. Il s’attaqua d’abord aux grands seigneurs bretons. Il s’empara ainsi d’une partie des biens d’Henri de Penthièvre, soit le Penthièvre et la Trégor [13]. Le tuteur d’Henri, Conan de Léon, se révolta et perdit Lesneven [14]. La mort d’Alix, en octobre 1221, sembla permettre à ses ennemis de contester la légitimité de Pierre [15]. Conduits par le seigneur angevin, Amaury de Craon, ils furent écrasés, en mars 1222, devant Châteaubriant [16]. Amaury perdit lui-aussi sa terre bretonne de Ploërmel [17]. L’année suivante, Pierre fit construire le château de Saint-Aubin-du-Cormier qui avait pour but de défendre le Nord-Ouest du duché [18], mais aussi de surveiller les seigneurs du pays rennais, surtout son beau-frère, André de Vitré (époux de la sœur cadette d’Alix), un concurrent potentiel à la régence de la Bretagne que Pierre exerçait maintenant pour ses enfants [19].
Dès son avènement, il se heurta aussi à la puissance des évêques bretons qui détenaient les grandes cités du duché [20]. La guerre avec l’Angleterre lui servit de prétexte pour les fortifier et ainsi réduire l’influence des évêques. Par deux fois, ils l’excommunièrent (1218-1220, 1228). Le pape accepta même de jeter l’interdit sur le duché. Tout sacrement religieux fut alors impossible [21]. Les évêques furent pourchassés, durent s’exiler ; leurs gens furent molestés, leurs terres confisquées. Mais, chaque fois, Pierre dut céder car les évêques avaient aussi l’appui du roi de France.
Pierre, le rebelle
Si jusqu’à la mort du roi de France, Louis VIII (1226), Pierre fut un vassal fidèle [22], il rechigna à obéir à la régente de saint Louis, Blanche de Castille [23]. Par trois fois, en 1227, 1231 et 1234, il se révolta et dénonça son serment de fidélité. L’armée française intervint et prit quelques châteaux bretons frontaliers, mais jamais celui de Saint-Aubin-du-Cormier. Pierre n’avait pas les moyens de lutter, d’autant que ses alliés, surtout le roi d’Angleterre, furent particulièrement passifs, quand ils ne le trahissent pas (comme le comte de Champagne). Ainsi, par trois fois, il dut se soumettre [24]. Les grands barons et les évêques bretons, qui s’étaient alliés à la France, gagnèrent [25]. En 1235, il était humilié. et dut puiser à pleines mains dans son trésor pour les dédommager. Deux ans plus tard, en novembre 1237, il abandonna le gouvernement de la Bretagne à son fils, Jean Ier le Roux [26].
Pierre, le croisé
Pourtant, sa carrière ne s’arrêta pas là. Sa valeur militaire lui valut d’être choisi par le pape, en janvier 1238, comme un des chefs de la croisade pour « délivrer le tombeau du Christ » en Palestine. Même si l’expédition tourna court, le chevalier Pierre de Braine (il avait repris le nom de sa terre champenoise) se couvrit de gloire [27]. En août 1249, il accompagna saint Louis dans sa première croisade. Il fut blessé à la tête à la bataille de Mansourah (en Egypte, 22 février 1250). Fait prisonnier, délivré après le paiement de sa rançon, il ne survit pas à ses blessures et rendit l’âme sur le navire qui le ramenait en France (26 ou 27 mai 1250) [28]. Il fut inhumé chez lui, en Champagne, à Saint-Yved-de-Braine [29].
Son œuvre est méconnue, faute de documents. Il ne fut pas un homme de chancellerie comme son fils, mais davantage un homme d’action. Décrié plus tard comme aventurier, tyran et surtout anticlérical, d’où son surnom de Mauclerc, il laissa pourtant à ses héritiers un Domaine ducal accru, bien défendu, base d’une organisation administrative plus efficace. Surtout, s’installa avec lui, une nouvelle dynastie, capétienne, et donc d’origine française, qui régnera sur la Bretagne jusqu’à Anne de Bretagne (morte en 1514).
[1] « 1220, un capétien devient duc de Bretagne », dans le quotidien « Le Télégramme de Brest », dimanche 6 mai 2001.
[2] En 1199, Arthur de Bretagne prit Angers et Le Mans et obtint du roi de France l’investiture pour l’Anjou, le Maine, la Touraine et la Bretagne. En juillet 1202, à Gournay, Philippe Auguste reçut l’hommage d’Arthur de Bretagne, le fiança alors à sa fille, Marie, et l’aida à recouvrer le Poitou sur son oncle, Jean sans Terre, alors roi d’Angleterre (A. de LA BORDERIE, Histoire de la Bretagne, t. III, Mayenne, rééd. 1975, p. 288).
[3] En avril 1203, Arthur de Bretagne fut assassiné par son oncle et jeté dans la Seine, près de Rouen. Sa sœur et héritière, Aliénor, était alors prisonnière à Bristol où elle mourut en 1241 (LA BORDERIE, Histoire de la Bretagne, t. III, op. cit., p. 291-292 ; Guillaume LE BRETON, Philippide, R.H.F., t. XVII, v. 484-488 et 557-566). En fait, selon les travaux de Charles Bémont, l’assassinat d’Arthur de Bretagne fut connu seulement en 1208 de Philippe Auguste et de la cour de France par les révélations de Guillaume de Briouze (J. LEVRON, Philippe Auguste ou la France rassemblée, 1971, rééd., 1997, p. 163). Ce n’est donc que le 7 mai 1208, en plein conflit entre Jean sans Terre et Philippe Auguste, qu’Aliénor Plantagenêt se proclama duchesse de Bretagne et comtesse de Richmond, dans des lettres adressées aux évêques de Nantes, de Vannes, de Cornouaille, à Eudon du Pont, à Geoffroy de L’Espine, à Olivier Rugy, à Paien de Malestroit et d’autres barons bretons. Dans ces lettres, elle réclamait ses droits sur la Bretagne. Elle donnait toutefois tout pouvoir à son oncle, le roi d’Angleterre (MORICE (H), Mémoires pour servir de preuves à l’histoire ecclésiastique et civile de Bretagne, Paris, 1742-1746 (Dom MORICE, pr.), t. I, col. 812).
[4] En 1209, à Paris, devant la cour royale, Guy de Thouars, comte de Bretagne, et Alain, fils de comte, élaborèrent un projet de mariage entre leurs enfants, Henri (plus tard d’Avaugour) et Alix de Bretagne, héritière du duché. Ce contrat devait permettre à Guy de Thouars d’obtenir les revenus des domaines ducaux dans les évêchés de Nantes, de Vannes et de Cornouaille (Dom MORICE, pr., t. I, col. 812-813 ; F. MORVAN, « La maison de Penthièvre (1212-1334), rivale des ducs de Bretagne », dans Mémoires de la société d’histoire et d’archéologie de Bretagne (M.S.H.A.B.), t. LXXXI, 2003, p. 19-54 ; H. GUILLOTEL, « Les origines de Guingamp, sa place dans la géographie féodale bretonne », dans M.S.H.A.B., t. 56, 1979, p. 81-100.
[5] Pierre avait hérité de son père, Robert II (dit aussi de Braine), comte de Dreux et de Braine, les terres de La Fère-en-Tardenois, de Pontarcy, de Brie-comte-Robert, de Chilly et de Longjumeau (Père ANSELME, Histoire généalogique et chronologique de la maison royale de France, Paris, 3 éd., 1726-1733, t. I, p. 25). Les seigneuries de La Fère-en-Tardenois et de Pontarcy provenaient d’Agnès de Baudement, dame de Braine-sur-Vesle, troisième épouse de Robert de France, comte de Dreux, grands-parents de Pierre de Dreux. Le père de Pierre Mauclerc, Robert II le jeune, comte de Dreux, de Braine et de Nevers (Nevers par mariage) avait aussi obtenu les terres de La Fère, de Torcy, de Brie-Comte-Robert (ANSELME, op. cit., t. I, p. 206). Un acte en date du 4 septembre 1225, fait à Meaux, montre qu’en présence de Pierre, évêque de Meaux, Robert, comte de Braine et de Dreux, fit hommage-lige à Thibaut, comte de Champagne, après avoir reçu de son frère, Pierre, comte de Bretagne, le château de La Fère, que celui-ci possédait par droit héréditaire et qui fut réintégré dans le fief de Champagne (des comtes de Dreux) (A.N.F., J 1035, n° 17 ; Catalogue des actes de Pierre de Dreux, op. cit., p. 49, n° 92 ; H. d’Arbois de Jubainville, Histoire des comtes de Champagne, op. cit., t. V, n° 1678 ). Enfin, Pontarcy, Brie-comte-Robert, Chilly et Longjumeau passèrent au fils aîné de Pierre de Dreux, le duc de Bretagne, Jean Ier. La maison de Dreux s’en servit pour doter certaines princesses de Bretagne.
[6] Le 17 mai 1209, à Compiègne, Philippe Auguste adouba son fils, le prince Louis, futur Louis VIII, mais aussi Robert et Pierre de Dreux, avec une centaine d’autres nobles (J. LEVRON, Pierre Mauclerc, Paris, 1935 et G. SIVERY, Louis VIII, 1995, p. 80 ; Guillaume LE BRETON, op. cit., p. 82 ; Chroniques de Saint-Bertin, dans R.H.F., t. XVII, p. 82 ; C. PETIT-DUTALLIS, Etude sur la vie et le règne de Louis VIII , Paris, 1894, p. 11-12 ).
[7] Philippe Auguste maria, en 1212, Alix de Bretagne à Pierre de Dreux. La célébration fut retardée de quelques années car Alix n’avait alors que treize ans (LA BORDERIE, Histoire de la Bretagne, t. III, op. cit., p. 297).
[8] En 1212, Louis, futur VIII, obtint l’héritage de sa mère, soit l’Artois, et amena dans son expédition Pierre de Dreux et le fils du comte de Saint-Pol (SIVERY, Louis VIII, op. cit., p. 89).
[9] En novembre 1212, à Paris, Pierre, fils de Robert, comte de Dreux, promit solennellement au roi de France de garantir sa fidélité sur tous ses biens patrimoniaux et fournit comme cautions son père et son frère. Puis, il prêta au roi serment, accepta de ne recevoir les hommages des Bretons que « sauf la fidélité au seigneur-roi » et reconnut ainsi ouvertement la suzeraineté de Philippe Auguste (LEVRON, Pierre Mauclerc, op. cit., p. 9 ; Catalogue des actes de Philippe Auguste, par Léopold Delisle, Paris, 1856, p. 320-321 d’après le Trésor des Chartes de Bretagne ; Archives départementales de Loire-Atlantique (A.D.L.A..), N 48. Maître, Mandement des ducs de 1148 à 1237, op. cit., p. 130 ; Bibliothèque Nationale de France (B.N.F.), collection Dupuy, fol. 164). Son frère, Robert, fils de Robert, comte de Dreux, garantit aussi l’exécution de l’engagement pris par Pierre (Archives Nationales de France (A.N.F.), J 218, n° 6 bis ; Catalogue des actes de Philippe Auguste, op. cit., p. 321, n° 1411 ; Layettes du Trésor des Chartes, Paris, 1863-1902, t. I : 755-1223 par A. Teulet, 1863, p. 384, acte n° 1027, d’après A.N.F., J 218, Dreux, n° 6).
[10] Le dimanche 27 janvier 1213, à Paris, Pierre, duc de Bretagne, fils de Robert, comte de Dreux, prêta hommage lige pour la Bretagne au roi de France (A.N.F., J 218, Dreux, n° 5 ; A.N.F., JJ 7, n° 85 ; JJ 23 n° 115 v., JJ 26, n° 176 v. ; B.N.F., ms. latin 9778, n° 142 ; ms. latin 9779, n° 115 v ; Layettes du Trésor des Chartes, A. Teulet, op. cit., p. 387, n° 1033 ; Catalogue des actes de Philippe Auguste, op. cit., p. 321 ). En même temps, Pierre de Dreux, duc de Bretagne, promettait, par lettres, à Philippe II Auguste, roi de France, de tenir les conventions faites par Guy de Thouars, comte de Bretagne, à d’autres barons et hommes du roi en Bretagne. Il donna alors comme garant Robert de Dreux, son père, et l’évêque-comte de Beauvais, son oncle (A.D.L.A.., N 48. Maître, Mandement des ducs de 1148 à 1237, op. cit., p. 130 ; B.N.F., collection Dupuy, fol. 164).
[11] Guillaume Le Breton écrivit à ce propos : Quo audito reo, domissa obsidione gandari, premisso Petro, comite Britannie, cum DCCC militibus, reversus est cum exercitu ad obsessos et solvit obsidienem, et fugativit eos usque ad nave suas multis occisis et submersis usque fre duo millia et multus probos et stremuos captos adduxit : et cum victoria dam revertens, tota regine incircuitu incendio commendat (Henri-François LABORDE, Œuvre de Rigord et de Guillaume Le Breton, historiens de Philippe II Auguste, roi de France, t. I, Chroniques de Rigord et de Guillaume Le Breton, Paris, 1882, p. 251). En effet, on sait qu’en août 1214, Pierre Mauclerc fut chargé par le roi de France de soumettre Savary de Mauléon en Bas-Poitou. Dans un seul engagement, il fit 200 prisonniers. Savary dut se soumettre (LEVRON, Pierre Mauclerc, op. cit., p. 26). De plus, M. de La Roque mentionne que le 6 août 1214, lors de la guerre entre le roi de France et l’empereur germanique, Othon IV de Brunswick, en Flandre et Hainaut, les évêques de Rennes, Nantes, Vannes, Cornouaille, Léon, Trégor, Saint-Brieuc, Saint-Malo, Dol furent convoqués à l’ost royal, comme le furent le duc de Bretagne. Parmi les barons est cité aussi Geoffroy de Châteaubriand ; parmi les chevaliers de Bretagne : Guy de Thouars, comte de Bretagne (veuf de la duchesse Constance et régent du Sud de la Bretagne) ; Alain, fils de comte (le seigneur de Trégor et de Penthièvre) ; Guiomarc’h de Léon (vicomte de Léon) ; Hervé de Léon (de la branche cadette de Léon) ; Paien de Malestroit ; Eudes, fils de comte (de Bretagne, en fait le seigneur de Porhoët) ; Josselin de Rohan (l’oncle du vicomte de Rohan) ; Raoul de Montfort ; Guillaume de Montfort ; Pierre de Lohéac ; Roald, vicomte de Donges ; Guillaume de La Guerche ; Bernard de Bain ; André de Vitré (le seigneur de Vitré) ; Geoffroy de Fougères (l’oncle du précédent) ; Guillaume de Fougères ; Geoffroy Giron ; Alain de Châteaugiron ; Guillaume d’Aubigné ; Juhel de Mayenne (le seigneur de Mayenne et de Dinan-Léhon) ; Olivier de Dinan ; Jean de Dol ; Geoffroy de L’Espine ; Olivier de Tinténiac ; Hervé de Beaumortier ; Geoffroy de Châteaubriand (pour ses terres bretonnes) ; Guillaume d’Ancenis ; Guillaume de Clisson, dit le vieux ; Guillaume de Clisson, dit le jeune ; Guillaume de La Roche de Vens ; Guillaume du Plessis ; Jaculfus de Rais ; Olivier de La Roche ; Eudes du Pont (seigneur de Pontchâteau) ; Rolland de Rieux ; Geoffroy de Héric ; Aleman d’Aubigné (Traité de ban et arrière-ban de son origine et ses convocations anciens et nouvelles avec plusieurs anciens rolles par M. de La Roque, Paris, 1676, p. 2-6). Voici comment les évènements se déroulèrent : lors du Carême 1214, le roi d’Angleterre, Jean sans Terre, accompagné d’Aliénor Plantagenêt, sa nièce et en tant que fille de la duchesse Constance, légitime héritière du duché de Bretagne, débarqua à La Rochelle et surprit l’Anjou sans défense, prit Angers et attaqua alors Nantes. Pierre de Dreux ayant augmenté les forces de la ville vers le nord entre la Loire et L’Erdre, passa la Loire avec ses troupes et ceux du comte de Dreux, son frère. Les Anglais s’enfuirent. Pierre rentra donc à Nantes. Son frère, trop engagé, fut fait prisonnier avec 14 chevaliers français (LA BORDERIE, Histoire de la Bretagne, op. cit., t. III, p. 302 ; Œuvre de Rigord et de Guillaume Le Breton, op. cit., t. I, op. cit., p. 254 ). Puis, Pierre de Dreux commandant l’armée de Bretagne, aida Louis, fils aîné du roi de France, à arrêter Jean d’Angleterre et les Poitevins à La Roche-aux-Moines (PETIT-DUTAILLIS, op. cit., p. 47).
[12] Il est nécessaire de citer Guillaume Le Breton : « vers ce tens, Pierre Mauclerc, épouse la fille de Guy, vicomte de Thouars et quand il fu sesiz de la terre, il assembla ses gens et fist secorus monsieur Looys, le fils le roi Phelipe qui demoroit à Chinon et ou païs entor à granz gens par le commandement de son père pour guerroier au roi Jehan et pour defendre le païs et la contrée li roi Jehan avoit ja tenue en prison plus de XVIII anz Alienor, la seror Artur, le conte de Bretaigne, qui estoit ainznée fille le conte Gefroi, son frere, pour ce la tenoit en prison que il ne voloit pas que ele fust mariée, que il ne perdist la terre » (Recueil des Historiens de France, t. XVII, p. 402 b).
[13] De janvier à mars 1214, tout le comté de Penthièvre fut annexé sans qu’un seul nom de bataille ait été conservé par les chroniqueurs (LEVRON, Pierre Mauclerc, op. cit., p. 23). Quelques actes prouvent cette annexion : en mars 1214, à Rennes, Pierre de Dreux confirma à l’abbaye de Saint-Melaine de Rennes la possession de la dîme des poissons de sa cuisine et du four de Guingamp (J. LEVRON, Catalogue des actes de Pierre de Dreux, précédé d’une introduction sur l’organisation administrative de la Bretagne au début du XIIIe siècle, Rennes, 1931, p. 33, n° 9 ; A.D.I.V, H 24 ; J. GESLIN DE BOURGOGNE, A. de BARTHELEMY, Anciens évêchés de Bretagne (A.E.). Histoire et monuments, 6 vols, Saint-Brieuc-Paris, 1855-1879, t. VI, p. 154 et LA BORDERIE, « Recueils des actes inédits des ducs et princes de Bretagne (1108-1237) », dans Bulletin et Mémoire de la société archéologique du département d’Ille-et-Vilaine, t. XVII, 1885, n° 85). En même temps, la même abbaye reçut de lui et de son épouse la possession d’un four à Guingamp et précisa aussi que rien ne pourra être bâti entre la porte de Rennes et l’hôpital (A.E., op. cit., t. VI, p. 154 ; La BORDERIE, Recueil d’actes inédits…, op. cit., n° 85 ; J. LEVRON, « Les possessions de l’abbaye de Saint-Melaine de Rennes en Basses-Bretagne », dans M.S.H.A.B., t. X, 1929, p. 67). Le même mois, le même Pierre de Dreux demanda à sa femme de confirmer les aumônes qu’il avait faites à l’abbaye de Saint-Melaine et au prieur de Saint-Martin de Lamballe (Catalogue des actes de Pierre de Dreux, op. cit., p. 33, n° 10 ; Archives départementales d’Ille-et-Vilaine (A.D.I.V), H 24 ; LA BORDERIE, Recueil d’actes inédits, op. cit., n° 86). En octobre 1214, toujours à Rennes, il attesta que l’accord fait entre lui et Olivier Tournemine, (un des héritiers du lignage de Penthièvre), avec l’agrément d’Alix, comtesse de Bretagne, permettait à Olivier de posséder maintenant et à titre héréditaire Pléhedel, Landebiau et la forêt de Lamballe, nommée Lanmur (Dom MORICE, pr., t. I, col. 824-825 ; LEVRON, Pierre Mauclerc, op. cit., p. 27).
[14] En 1216, Pierre Mauclerc occupa le Léon de Conan de Léon, tuteur d’Henri d’Avaugour. (LA BORDERIE, Histoire de la Bretagne, t. III, op. cit., p. 303, note 1). Plusieurs chartes de 1216 montrent que Pierre de Dreux s’attribua tous les droits et coutumes de la ville de Lesneven qu’il avait confisqué à Conan : en août, à Lesneven, l’évêque de Léon fit don de l’église Saint-Michel de Lesneven à l’abbaye de Saint-Sulpice et à la prière du duc et duchesse de Bretagne, de la chapelle N.D. de Lesneven (Catalogue des actes de Pierre de Dreux, op. cit., p. 36, n° 32 ; A.D.I.V., 24 H 109, fonds de l’abbaye Saint-Sulpice ; Dom ANGER, « Cartulaire de l’abbaye de Saint-Sulpice-la-Forêt », dans B.S.A.I.V., t. XXXVII, p. 12, acte n° LXXXIX). En septembre, Pierre, comte de Bretagne, et Alix, sa femme, duchesse de Bretagne et comtesse de Richmond, donnèrent au prieuré de Lesneven l’église de Saint-Marie et un domaine et le fournage de Lesneven (A.D.I.V. 24 H 109, abbaye de Saint-Sulpice-la-Forêt, prieuré de Notre-Dame de Lesneven, parchemin en latin ; Cartulaire de Saint-Sulpice, op. cit., t. XXXVII, p. 10-11, acte n° LXXXVIII et LA BORDERIE, Recueil d’actes inédits…,op. cit., p.163, n° 91).
[15] La duchesse Alix mourut le 21 octobre 1221. Pierre de Dreux devint alors régent de ses enfants. (LA BORDERIE, Histoire de la Bretagne, t. III, op. cit., p. 338 ; Croniques annaux, dans Dom MORICE, pr., t. I, col. 107 ; Chronique de Ruis et Chronique de Penpont, dans Dom MORICE, pr., t. I, col. 152 et 154)
[16] Le 3 mars 1222, bataille de Châteaubriant entre Pierre Mauclerc et Amauri de Craon et ses alliés (les comtes de Nevers, de Vendôme, Jean de Montoire, Hardouin de Maillé). Mauclerc obtint le soutien des sires de Dinan, Vitré, Fougères, Châteaugiron, Châteaubriant, Acigné. Il fit aussi appel aux milices communales de Nantes. Il avait donc peu de chevaliers et beaucoup de gens à pied (Guillaume LE BRETON, Philippide, dans R.H.F., t. XVII, vers 410-438 et Pierre LE BAUD, Histoire de Bretagne avec les Chroniques des maisons de Vitré et de Laval, éd. d’Hozier, Paris, 1638, p. 223-224 qui donne les noms des seigneurs bretons alliés de Mauclerc ; voir aussi LA BORDERIE, Histoire de la Bretagne, t. III, op. cit., p. 304-306 ; Dom MORICE, pr., t. I, col. 108).
[17] En 1206, Philippe Auguste, roi de France, avait donné à Maurice de Craon la châtellenie de Ploërmel à tenir à jamais de lui, héréditairement, contre une hommage lige (Catalogue des actes de Philippe Auguste, op. cit., p. 228, n° 995 ; A.N.F., JJ 8, n° 49 ; JJ 7, n° 70 ; JJ 23, n° 90 v. ; JJ 26, n° 212 ; B.N.F., ms. latin 9778, n° 168 v.). Il est à observer tout de même que les prétentions de la maison de Craon sur cette châtellenie de Ploërmel durèrent jusqu’en 1289. Le 3 avril 1222, sauf Vendôme et Craon, tous les prisonniers furent relâchés. Craon fut enfermé dans le château de Touffou, et contre sa libération, dut renoncer à Ploërmel et marier sa fille à Arthur, second fils de Pierre. Le vicomte de Léon continua le combat. Pierre de Dreux lui accorda une paix avantageuse (LA BORDERIE, Histoire de la Bretagne, t. III, op. cit., p. 307 ; Croniques annaux et Chronique de Tours, sous les années 1222 et 1223 dans Dom MORICE, pr., t. I, col. 108 ; LE BRETON, Philippide, op. cit., v. 447-450)
[18] En 1223, Pierre Mauclerc fit construire au milieu de la forêt de Rennes le château de Saint-Aubin-du-Cormier (LA BORDERIE, Histoire de la Bretagne, t. III, op. cit., p. 308 ; Bertrand d’ARGENTRE, L’histoire de Bretaigne, des Roys, Ducs, Comtes et Princes d’icelle (...), Rennes, 1618, p. 278). Un acte en date du 17 mai 1225, fait à Nantes montre qu’il donna aux habitants de Saint-Aubin du Cormier, avec l’accord des barons et vassaux du duché, un château neuf édifié dans la forêt de Rennes ; l’exemption de toutes chevauchées, de toute taille, de toute coutume, à la condition que chacun paiera à la recette ducale une rente de 5 sous et qu’ils serviront à l’ost du duc ; la franchise de toute coutume en quelque endroit qu’ils aillent en Bretagne ; la liberté de prendre du bois mort, de couper de la litière et de faire paître leurs bestiaux dans la forêt de Rennes hors bois. Dans l’acte sont aussi énumérés les noms des grands vassaux qui avaient approuvé l’acte (A.D.L.A.., N 48 : Maître, Mandement des ducs de 1148-1237, op. cit., p. 121 ; vidimus de janvier 1409 et de septembre 1450 : A.D.L.A.., E 157 ; A.D.L.A.., B 51, n° 96-98 , chambre des Comptes ; LA BORDERIE, Histoire de la Bretagne, t. III, op. cit., p. 309 ). L’acte cite comme témoins : André de Vitré, Geoffroy de Pouancé, Jacques et Galéran de Châteaugiron, Foulques Painel, G. de Melesse, Jean de Dol, Jean Painel, Olivier de Coëtquen, Richard Le Maréchal, Alain de Beaufort, Olivier de Tinténiac, Rolland de Dinan, Geoffroy et Raoul de Montfort, Eudes de Lohéac, Geoffroy de Châteaubriant, Geoffroy d’Ancenis (Dom MORICE, pr., t. I, col. 854, d’après un vidimus de 1408, du duc Jean V).
[19] En septembre 1211 avait eu lieu le mariage de Catherine de Thouars, fille de la duchesse Constance de Bretagne, avec André, seigneur de Vitré. En février 1213, Pierre Ier, duc de Bretagne, ratifia le don d’une rente de 60 livres donnée en dot par Guy de Thouars, comte de Bretagne, à Catherine (A.N.F., MM 746 ; A. de BROUSSILLON, La maison de Laval (1020-1605). Etude historique accompagné du cartulaire de Laval et de Vitré, t. I, Paris, 1898, p. 200). Un autre acte de 1222 précise la donation puisque Goranton de Vitré reçut des lettres dans lesquelles Pierre Ier, duc de Bretagne, l’avisa, que du fait de l’échange effectué avec André III de Vitré, à qui il avait rendu la part de la forêt de Rennes, dot de sa femme, il avait abandonné à celui-ci ses droits de suzeraineté sur lui (Catalogue des actes de Pierre de Dreux, op. cit., p. 47, n° 77 ; B.N.F., ms. fr. 22319, p. 164 ; Dom MORICE, pr., t. I, col. 850 ; BROUSSILLON, op. cit., t. I, p. 213 ; Voir aussi M. BRAND’HONNEUR, « Le lignage, point de cristallisation d’une nouvelle cohésion sociale. Les Goranton-Hervé de Vitré aux XIIe et XIIIe siècles », dans M.S.H.A.B., t. 70, 1993, p. 65-87 : « Seigneurs et réseaux de chevaliers du Nord-Est du Rennais sous Henri II Plantagenêt », dans Noblesses de l’espace Plantagenêt (1154-1224), Table ronde tenue à Poitiers le 13 mai 2000, sous la direction de Marin Aurell, Poitiers, 2001, p. 180.
[20] En 1215, Pierre de Dreux, duc de Bretagne, passa un accord avec l’évêque de Dol au sujet de plusieurs querelles nées entre eux et spécialement du droit d’appel des hommes de l’évêché de Dol à la cour de l’évêque à celle du duc (A.D.L.A, E 241, fol. 4 r° ; Catalogue des actes de Pierre de Dreux, op. cit., p. 35, n° 27 ; Dom MORICE, pr., t. I, col. 827). Le 5 juillet 1217, le pape Honorius III dénonça nominalement deux officiers du duc, Alain Le Fauconnier et Guiomarc’h de Servon, dans l’affaire de l’évêque de Nantes et ordonna leur excommunication. Le duc envoya alors à Rome l’abbé de Redon et un chevalier de la cour ducale (Catalogue des actes de Pierre de Dreux, op. cit., p. 36). Le 20 avril de la même année, le même pape enjoignit à l’évêque du Mans et à deux chanoines du Mans de procéder à une enquête sur les plaintes de l’évêque de Nantes (Catalogue des actes de Pierre de Dreux, op. cit., p. 36) car Pierre Mauclerc s’attaquait encore à l’évêque de Nantes auquel il contestait les droits spirituels et temporels à Nantes (LA BORDERIE, Histoire de la Bretagne, t. III, op. cit., p. 303).
[21] Le 5 juillet 1218, à Rome, le pape Honorius III envoya un mandement à l’évêque du Mans, au chantre et au maître des écoles de cette ville, leurs ordonnant d’excommunier Pierre de Dreux et ses complices jusqu’à ce qu’ils aient donné satisfaction et réparé les dommages causés à l’évêque de Nantes et à son évêché (Catalogue des actes de Pierre de Dreux, op. cit., p. 41, n° 51 ; Dom MORICE, pr., t. I, col. 835 ; R.H.F., t. XIX, p. 662). Le 31 juillet 1218, le pape envoya un mandement au duc de Bretagne par lequel il lui enjoignait de réparer les torts causés à l’évêque de Nantes sous peine de voir la sentence d’excommunication prononcée par l’évêque du Mans ratifiée par Honorius et le duché de Bretagne mis en interdit (Catalogue des actes de Pierre de Dreux, op. cit., p. 41, n° 52 ;.R.H.F., t. XIX, p. 662-663 ). Le 17 décembre, le pape envoya des mandements aux archevêques de Sens, de Tours, de Bourges et de Rouen et à leurs suffrageants par lequel il leurs ordonnait de faire proclamer l’excommunication portée contre Pierre de Dreux, duc de Bretagne (Catalogue des actes de Pierre de Dreux, op. cit., p. 41-42, n° 55, 56, 57 ; R.H.F., t. XIX, p. 674 ). Le 28 janvier 1220, à Viterbe en Italie, Honorius III fit un mandement aux abbés de Savigny et de Saint-Waast leur demandant de lever les sentences d’excommunication portées contre Pierre de Dreux s’il avait exécuté l’accord conclu avec l’évêque de Nantes et réparé les dommages causés à l’évêché (Catalogue des actes de Pierre de Dreux, op. cit., p. 36, p. 44, n° 66 ; Dom MORICE, pr., t. I, col. 840 ). Le 2 août, à Nantes, Pierre de Dreux, duc de Bretagne, se réconcilia avec l’évêque de Nantes et promit d’observer les conditions imposées par les délégués apostoliques et de réparer les dommages qu’il avait causés (Catalogue des actes de Pierre de Dreux, op. cit., p. 46, n° 73 ; Dom MORICE, pr., t. I, col. 846 ; LA BORDERIE, Histoire de la Bretagne, t. III, op. cit., p. 303 ; Le Baud, Histoire de la Bretagne, p. 223). Le 23 février, le duc renouvela sa promesse de paix avec l’évêque de Nantes auquel il reconnut tous les droits qu’il avait contestés et promit de l’indemniser de toutes ses pertes (LA BORDERIE, Histoire de la Bretagne, t. III, op. cit., p. 304-305 ; Dom MORICE, pr., t. I, col. 846). Il est vrai que l’évêque de Nantes pouvait être en colère car Pierre de Dreux avait donné aux Templiers de Nantes cette portion de muraille qu’au temps de la guerre Pierre avait fait construire sur leur territoire, avec autorisation de ne pas la reconstruire si elle venait à s’écrouler (Catalogue des actes de Pierre de Dreux, op. cit., n° 78 ; Dom MORICE , pr., t. I, col. 850). Le duc de Bretagne donnait ainsi aux Templiers qu’il protégeait l’autorisation de réédifier le mur qui entourait leur clôture et leur cimetière (Dom MORICE, pr., t. I, col. 850-851). En juin 1227, le pape Grégoire IX lança une nouvelle sentence d’excommunication adressée à deux chanoines pour aggraver l’excommunication prononcée contre Pierre Ier, et l’interdit sur les domaines du duc (Dom MORICE, pr., t. I, col. 861-862). Le 20 mai 1228, à Assises, ayant constater que Pierre avait ordonné lors de l’assemblée de Redon de ne plus payer ni tierçage, ni past nuptial, de ne point rendre les dîmes, de fréquenter les excommuniés, Grégoire IX, après avoir énuméré tous les griefs et dommages dont s’était rendu coupable Pierre de Dreux envers les évêques bretons et spécialement envers les évêques de Rennes, Tréguier et Saint-Brieuc, qui avaient dû abandonner leurs diocèses, demanda à Maurice, évêque du Mans, à P. de Domfront et G. de Laval, chanoines de cette ville, de renouveler les sentences d’excommunication et d’interdit portées contre le duc de Bretagne et de les aggraver (Catalogue des actes de Pierre de Dreux, op. cit., p. 56-57, n° 116 ; B.N.F., ms. fr. 22325, p. 475-476 ; Dom MORICE, pr., t. I, col. 861 ; LA BORDERIE, Histoire de la Bretagne, t. III, op. cit., p. 312). Le 30 mai 1228, le pape envoya un bref à l’évêque du Mans chargé de l’exécution de l’excommunication par lequel il prescrivait à tous ceux qui avaient fait le serment de Redon de l’abjurer et les excommuniait s’ils y persistaient (LA BORDERIE, Histoire de la Bretagne, t. III, op. cit., p. 313 ; Dom MORICE, pr., t. I, col. 909 ; B.-A. POCQUET DU HAUT JUSSE, « Pierre Mauclerc et l’esprit du XIIIe siècle », dans Annales de Bretagne, t. LIV-LV, 1947-1949, p. 93-120 ; Les papes et les ducs de Bretagne. Essai sur les rapports du Saint Siège avec un État, Paris, 1928).
[22] Lors de la guerre contre les partisans des Plantagenêts, Pierre de Dreux joua un rôle majeur dans le camps du roi de France. Le 21 septembre 1224, il prit le château angevin de Champtoceaux appartenant à Thibaut Crespin, seigneur de Champtoceaux (LA BORDERIE, Histoire de la Bretagne, t. III, op. cit., p. 309 ; Croniques annaux et Chronique de Tours dans Dom MORICE., pr., t. I, col. 108). En remerciement, en octobre, Louis VIII donna en fiefs liges à Pierre Champtoceaux, Montfaucon et toute la terre que possédait Thibaut Crespin (Catalogue des actes de Pierre de Dreux, op. cit., p. 49, n° 85 ; A.N.F., JJ 26, fol. 182 v° ; B.N.F., ms. lat. 9778, fol. 149 r.° ; Dom MORICE, pr., t. I, col. 852 ; R.H.F., t. XVIII, p. 306 ; Petit-Duvaillis, op. cit., catal. n° 173). Lors de la guerre royale contre la maison de Lusignan, favorable aux Plantagenêt, Louis VIII, roi de France, déclara, en mai 1226, que le comte de La Marche était tenu de remettre son château de Lusignan (son château patrimonial) à Pierre, comte de Bretagne, toutes les fois que le roi devait aller en Poitou (C. Petit-Duvaillis, op. cit., appendice VI, Catalogue des actes de Louis VIII, p. 463, n° 107). A partir de 1225, Pierre de Dreux accompagna le roi de France à la croisade des Albigeois. Il fut même un des vingt chevaliers qui en janvier 1226 réclama l’intervention du roi dans le Midi (A.N.F., J 428, Albigeois, n° 1 bis ; Layettes du Trésor des Chartes, Paris, t. II, 1223-1246 par A. Teulet, 1866, p. 68-69, acte n° 1742 ; LEVRON, Pierre Mauclerc, op. cit., p. 63 ; LA BORDERIE, Histoire de la Bretagne, t. III, op. cit. p. 311). Mais dans le Midi, les relations entre le roi de France et le duc de Bretagne ne furent guère bonnes. Pierre arriva en retard à l’ost car il était alors très mécontent. Il avait voulu en effet épouser la comtesse Jeanne de Flandre et avait négocié avec le roi d’Angleterre, Henri III, afin de faire casser le mariage contracté entre Jeanne et Ferrand, prisonnier au Louvre. Pour éviter cette union, en 1226, le roi de France avait libéré Ferrand (Dom MORICE, Histoire de la Bretagne, t. I, 154). Pierre conspira alors avec le comte de Champagne (Catalogue des actes de Pierre de Dreux, op. cit., p. 51, n° 99 ; B.N.F., Col. de Champagne, vol. 136, p. 170 ; Dom MORICE, pr., t. I, col. 856 ; H. ARBOIS DE JUBAINVILLE, Histoire des ducs et comtes de Champagne, Paris, 1861-1866, t. V, n° 1779) et quitta l’armée laissant le roi mourrant. Le 8 janvier, Louis VIII décéda de la dysenterie devant Avignon (C. Petit-Duvaillis, op. cit., p. 326-327).
[23] A la fin 1226 ou au début 1227, Pierre constitua une ligue contre la régente avec Thibaut IV de Champagne et Hugues de Lusignan, comte de La Marche (LA BORDERIE, Histoire de la Bretagne, t. III, op. cit., p. 312 ; Dom MORICE, pr., t. I, col. 856-857).
[24] En février 1227, La reine Blanche de Castille était à Chinon avec son armée. Le comte de Champagne se soumit laissant seul Pierre (LA BORDERIE, Histoire de la Bretagne, t. III, op. cit., p. 312). Contre sa soumission, le duc de Bretagne reçut, le 16 mars 1227, à Vendôme, d’importants avantages : sa fille Yolande devait épouser le prince Jean de France, troisième fils de Louis VIII. Pierre devait alors tenir l’apanage de son futur beau-fils, soit Angers, Beaugé, Beaufort. Il pouvait garder maintenant définitivement et à titre héréditaire le château normand de Saint-Jame-de-Beuvron, la ville et forêt de Bellême et le château de La Perrière dans le Perche (Catalogue des actes de Pierre de Dreux, op. cit., p. 52, n° 106 ; A.N.F., J 241, n° 4. ; B.N.F., ms. nouv. acq. fr. 7351, fol. 16 r° ; Layettes, t. II, op. cit., p. 119 ; Dom LOBINEAU, Histoire de la Bretagne, t. I, op. cit., p. 221 ; LA BORDERIE, Histoire de la Bretagne, t. III, op. cit., p. 312 ; Chronique de Tours dans R.H.F., t. XVIII, p. 319 ; Guillaume de Nangis, Vie de saint Louis, dans R.H.F., t. XX, p. 313 ; Elie Berger, Histoire de Blanche de Castille, Paris, 1895, p. 80-85 ; vicomte de ROMANET, Géographie du Perche et chronologie de ses comtes suivies de pièces justificatives formant le cartulaire de cette province, Mortagne, 1890-1902, p. 13-14, n° 16). Toutefois, Pierre n’accepta toujours pas, lui un prince capétien, d’être écarté du conseil de régence au profit d’une femme, même s’il s’agissait de Blanche de Castille. Avec d’autres grands seigneurs comme le sire de Coucy et le comte de La Marche, il projeta, en janvier 1228, d’enlever le roi Louis IX entre Orléans et Montlhéry. Le projet tourna court car Thibaut de Champagne dénonça les conjurés. Il avait décidé que cela devait être Mauclerc qui devait se rebeller le premier (LEVRON, Pierre Mauclerc, op. cit., p. 82-83 ; LA BORDERIE, Histoire de la Bretagne, t. III, op. cit., p. 313-314 ; Histoire de saint Louis de Jean, sire de Joinville, éd. N. de Wailly, Paris, 1874, p. 16). En conséquence de quoi, à Melun, le 31 décembre, Pierre de Dreux fut cité à comparaître devant le roi. Il fit défaut et fut condamné à perdre tout ce que le traité de Vendôme lui avait donné (LA BORDERIE, Histoire de la Bretagne, t. III, op. cit., p. 314). En janvier 1229, l’ost royal assiégea Bellême qui se rendit (LA BORDERIE, Histoire de la Bretagne, t. III, op. cit., p. 314 ; Guillaume de Nangis, Vie de saint Louis, dans R.H.F., t. XX, p. 316). Le duc de Bretagne réagit en octobre en s’alliant avec le roi d’Angleterre qui lui restitua ses terres anglaises, soit le très important honneur de Richmond (Catalogue des actes de Pierre de Dreux, op. cit., p. 58, p. 120). Le 14 janvier 1230, Pierre Mauclerc envoya au roi de France des lettres pour lui notifier qu’en raison des injustices dont il avait à se plaindre, il ne se considérait plus comme son homme (vicomte de Romanet, op. cit., , p. 18, n° 21). En mai, Pierre, qui était rentré en Bretagne, rejoint le roi d’Angleterre qui avait débarqué à Saint-Malo. Ensemble, ils rejoignirent Nantes où l’armée anglais fit montre d’une grande inaction (LA BORDERIE, Histoire de la Bretagne, t. III, op. cit., p. 316-319 ; E. Berger, Histoire de Blanche de Castille, op. cit., p. 168-170 ). Le 20 mai 1230, le roi Louis IX était à Angers (LEVRON, Pierre Mauclerc, op. cit., p. 112). Le mois suivant, l’ost royal planta ses tentes devant Ancenis et là, le roi de France fit reconnaître aux barons de Bretagne la déchéance prononcée contre Pierre de Dreux et leur demanda, en conséquence de venir lui faire hommage (Catalogue des actes de Pierre de Dreux, op. cit., p. 63, n° 144 ; A.N.F., AA 60, dossier 1544, n° 5 ; B.N.F., ms. nouv. acq. lat. 1229, fol. 18 ; B.N.F., ms. français 3907, fol. 39, n° 11 ; LA BORDERIE, Recueil d’actes, op. cit., n° 103). En même temps, les grands barons de France condamnèrent à la déchéance Pierre, comte de Bretagne (A.N.F., J 241, n° 5 ; Layettes du Trésor des Chartes, t. II, op. cit., p. 178, acte n° 2056 ; Dom MORICE, pr., t. I, col. 868). Le beau-frère de Pierre et un des plus puissants barons de Bretagne, André de Vitré, vint à Ancenis et prêta hommage au roi de France, toutefois en préservant les droits de ses neveux, enfants de Pierre et d’Alix (Catalogue des actes de Pierre de Dreux, op. cit., p. 63, n° 147 ; A.N.F., J 241, n° 7 ; n° 9 ; B.N.F., ms. fr. 18703, fol. 178 r. ; Teulet, Layettes, t. II, op. cit., p.180 a). Toutefois, Henri III d’Angleterre qui avait d’importantes difficultés financières, décida de mettre fin à l’aventure bretonne et annonça, le 17 août, à Mauclerc la conclusion de la trêve avec le roi de France (LEVRON, Pierre Mauclerc, op. cit., p. 119). Il laissa quelques fonds au duc de Bretagne ainsi que ses meilleurs capitaines, le comte de Chester et Guillaume II Le Maréchal (Catalogue des actes de Pierre de Dreux, op. cit., p. 66, n° 159). La situation du duc de Bretagne devint très vite périlleuse car en juin 1231, le roi de France réunit une forte armée pour attaquer Pierre Mauclerc. De Vincennes, le jeune Louix IX prit la route par Mantes, Le Mans, Laval, aborda la Bretagne par Vitré et Fougères (tenues par des ennemis de Pierre de Dreux) et attaqua Saint-Aubin-du-Cormier. Pierre Mauclerc ne dut qu’au soutien des troupes du comte de Chester, soit 1500 Anglais, de pouvoir signer devant Saint-Aubin une trêve de trois ans, jusqu’à la Saint-Jean Baptiste (24 juin) 1234 (Teulet, Layettes, t. II, p. 209, n° 2144 ; B.N.F., fonds français 8268, fol. 4-8). L’annonce de cette trêve fut faite au roi d’Angleterre le 4 juillet au camp devant Saint-Aubin (A.N.F., J 241, n° 34 ; Teulet, Layettes du Trésor des Chartes, t. II, p.211, acte n° 2141 ; Dom MORICE, pr., t. I, col. 1678 ; Catalogue des actes de Pierre de Dreux, op. cit., p. 70, n° 177 ; LA BORDERIE, Histoire de la Bretagne, t. III, op. cit., p. 321-322 ). Les conditions de cette trêve semblent au premier abord particulièrement difficiles pour Pierre : à Angers, en juillet, Pierre de Dreux dut remettre son donjon de Saint-Aubin-du-Cormier au comte de Boulogne, Philippe Hurepel, oncle du roi (A.N.F., J 241, Bretagne, n° 10 ; Teulet, Layettes, t. II, p. 214 b, acte n° 2142 ; Dom MORICE, pr., t. I, col. 1678 ; Catalogue des actes de Pierre de Dreux, op. cit., p. 70, n° 178 et LA BORDERIE, Histoire de la Bretagne, op. cit., t. III, p. 321). Le duc renonça à toutes ses prétentions sur le château de Bellême et reconnut tenir le duché de Bretagne en hommage lige et aux conditions spécifiés par le roi (ROMANET, op. cit., t. II, p. 24-26, n° 26). Toutefois, la situation de Pierre de Dreux n’était en fait pas dramatique : en 1233, le roi d’Angleterre donna à Pierre le château de Saint-James-de-Beuvron resté entre ses mains (LA BORDERIE, Histoire de la Bretagne, t. III, op. cit., p. 323) ; en janvier 1234, le comte de Boulogne mourut permettant à Pierre de reprendre son château de Saint-Aubin-du-Cormier (LA BORDERIE, Histoire de la Bretagne, t. III, op. cit., p. 322) ; de plus, profitant de la trêve royale, de février à mars 1234, le maréchal de Bretagne, Normand de Québriac, porta la ruine chez tous les grands seigneurs du Nord de la Bretagne qui s’étaient ralliés au roi de France sans que ce dernier ne puisse intervenir (LEVRON, Pierre Mauclerc, op. cit., p. 146). Toutefois, la trêve terminée, trois armées royales entrèrent en Bretagne. Pierre de Dreux ne résista pas (LA BORDERIE, Histoire de la Bretagne, t. III, op. cit., p. 323). En novembre, à Paris, il se soumit « haut et bas » à la volonté du roi de France et perdit définitivement Bellême et les seigneuries d’Anjou et du Maine (A.N.F., J 241, n° 14 ; A.N.F., J 240, n° 4 ; Teulet, Layettes, t. II, p. 277 ; ROMANET, Géographie du Perche, t. II, Cartulaire, op. cit., p. 29, n° 31). Le roi exigea un nouveau hommage, un serment de fidélité et des places de garantie : Châteauceaux, Mareuil (peut-être sur Lay, en Vendée), Saint-Aubin-du-Cormier et Saint-James de Beuvron (A.N.F., J 241, n° 11 ; copie : B.N.F., Collection Dupuy, vol. 607, p. 5 v° ; B.N.F., ms. fr. 18703, fol. 179 r° ; Catalogue des actes de Pierre de Dreux, op. cit., p. 73, n° 213 ; Dom MORICE, pr., t. I, col. 1679 ; Teulet, Layettes, t. II, p. 276, n° 2320 ; LA BORDERIE, Histoire de la Bretagne, t. III, op. cit., p. 324-325).
[25] André de Vitré fut autorisé par Pierre de Dreux à augmenter les fortifications du château de Vitré et celles de cette ville (Catalogue des actes de Pierre de Dreux, op. cit., p. 85, n° 252 ; B.N.F., ms. fr. 22329 ; LA BORDERIE, Recueil d’actes, op. cit., n° 107). Surtout en 1235, le roi de France fit une très importante enquête à Saint-Brieuc sur les dommages perpétrés depuis son avènement par Pierre de Dreux. Cette fameuse enquête accabla le duc (A.N.F., J 240, fol. 36 ; J 241A, n° 29 ; Teulet, Layettes, t. II, p. p. 298, 303-305 ; Catalogue des actes de Pierre de Dreux, op. cit., p. 80, n° 226, p. 81, n° 227, 228, 229 ; ; Dom LOBINEAU, preuves, t. I, col. 1825 ; LA BORDERIE, Nouv. recueil d’actes, n° 4-7, n° 18 ; Dom MORICE, pr., t. I, col. 885-888 ; A.E., t. IV, p. 99, n° CXII, abbaye de Beauport ; LA BORDERIE, Histoire de la Bretagne, t. III, op. cit., p. 325-326 et note 1, p. 326 ; Dom LOBINEAU, Histoire, t. II, col. 383 , 387 ; B.S.A.I.V., t. XXI, p. 97 à 105 ; A. ANGOT, Généalogies féodales mayennaises du XIe au XIIIe siècle, Laval, 1942, p. 611 ; A. de BARTHELEMY, « Enquête faite en 1235 sur les droits d’Henri d’Avaugour », dans R.B.V.A., t. XXIII, 1873, p. 333-347). Rare sont les mentions de dédommagements effectués par Pierre de Dreux, alors encore duc de Bretagne. En juin 1237, un acte montre qu’il fut contraint de donner des immunités de droit de bail, de rachat et de garde au seigneurs de Vitré pour la dot de Catherine, épouse d’André de Vitré, sur la forêt de Rennes. Le seigneur de Vitré obtint aussi de Pierre ce que Pierre avait obtenu de Foulques Payen et de son épouse et de leurs héritiers dans la terre d’Aubigné. Le seigneur de Vitré obtint donc la moitié de la seigneurie d’Aubigné, renforçant ainsi son implantation dans le comté de Rennes. En ce qui concerne les domaines des seigneurs de Vitré occupée par Pierre pour faire des fortifications à Saint-Aubin du Cormier et à Rennes, le duc fit un échange avec André de Vitré (B.N.F., ms. français 22319, château de Vitré, p. 147-148). En septembre 1237, à Rennes, il assigna encore à André de Vitré une indemnité à prendre sur les revenus qu’il percevait dans les fiefs des seigneurs de Vitré en échange des dommages estimés à 22 livres 2 sous causés à André (B.N.F., ms. nouv. acq. lat. 1229, p. 9 ; Catalogue des actes de Pierre de Dreux, op. cit., p. 86, n° 250 ; LA BORDERIE, Recueil d’actes, op. cit., n° 109). En ce qui concerne les évêques, le 27 septembre 1236, le pape Grégoire IX énuméra dans une lettre à l’archevêque de Tours les griefs dont Pierre de Dreux s’était rendu coupable envers l’évêque de Nantes et demanda que ledit Pierre en fasse réparation (Catalogue des actes de Pierre de Dreux, op. cit., p. 84, n° 240 ; Dom MORICE, pr., t. I, col. 903 ; POCQUET, Les papes, op. cit., p. 102).
[26] Le 16 novembre 1237, à Paris, le roi de France reçut l’hommage et le serment de fidélité de Jean Ier Le Roux (Chronique de Ruis, dans Dom MORICE, pr., t. I, col. 152 ; LA BORDERIE, Histoire de la Bretagne, t. III, op. cit., p. 329 et note 6). Pierre de Dreux n’était plus rien. Toutefois, il garda ses terres patrimoniales en Ile-de-France et en Champagne, ses domaines angevins de Montfaucon et de Champtoceaux et grâce à sa seconde épouse, Marguerite de Montaigu, sa seigneurie de La Garnache. Il était devenu alors un grand seigneur des marches de la Bretagne et se comporta ainsi : le 11 février 1238, Pierre de Braine (Pierre de Dreux portait alors ce nom) promit de ne pas réclamer à Raoul, seigneur de Retz, pendant la vie de ce dernier, les mille livres que celui-ci lui devait et lui promit aussi de ne lui causer nul dommage s’il détruisait son château de Saint-Etienne de Malmort (Catalogue des actes de Pierre de Dreux, op. cit., p. 86-87, n° 254 ; B.N.F., nouv. acq. fr. 6501, p. 536 ; Blanchard, Cartulaire des sires de Rais, p. 171). En fait, Pierre de Dreux semble continuer à avoir un grand rôle politique dans le Nord-Ouest du royaume, s’appuyant sur son fils, le duc de Bretagne, Jean Ier qui menait la même politique que lui.
[27] Les projets de croisade de Pierre de Dreux commencèrent en fait en 1236, soit juste après la fin de la grande enquête de Saint-Brieuc. On peut se demander si en prenant la Croix, Pierre ne voulut pas échapper aux conséquences de ses actes pendant la guerre civile. De toute manière, le 23 octobre 1236, il fut cité comme croisé dans une série de bulles pontificales qui lui conféraient à ce titre d’importants privilèges (POCQUET, Les papes, op. cit., p. 119 ). Il était donc prêt à partir pour Constantinople où il ne devait pas être soumis ni à l’empereur d’Orient, ni à la République de Venise. Il fut suivi de ses anciens ennemis : André de Vitré, déjà pèlerin de Saint-Jacques de Compostelle, Foulques Paynel, seigneur d’Aubigné, Geoffroi d’Ancenis, Guyomar de Léon, Henri d’Avaugour, armé chevalier en 1233, Raoul III de Fougères, pupille de Pierre adoubé par saint Louis en 1235 (POCQUET, Les papes, op. cit., p. 120 et note 3 ; Dom LOBINEAU, Histoire, t. I, p. 239 ; Teulet, Layettes, n° 2319 et 2320 ; LA BORDERIE, Histoire de la Bretagne, t. III, op. cit., p. 336 et 352 ; A.E., t. V, p. 58). Toutefois, la Croisade eut des difficultés à s’ébranler. Le 18 mai 1237, avant le départ de la croisade, l’indiscipline régnait. Le comte de Toulouse dépensait ses forces à soutenir les Marseillais révoltés contre le comte de Provence. Le pape admonesta alors les principaux chefs croisés dont Pierre de Dreux (POCQUET, Les papes, op. cit., p. 122 ). Le 24 juin 1239 eut lieu enfin le départ de la croisade à partir de Marseille et d’Aigues-Mortes. Le contingent breton embarqué à Saint-Malo rejoint les croisés, qui refusèrent de faire voile vers Constantinople et partirent directement vers la Terre Sainte (POCQUET, Les papes, op. cit., p. 126). Pierre de Dreux dut alors abandonner ses rêves orientaux. Toujours en quête de trône, il semble qu’il aurait bien aimé devenir empereur latin de Constantinople. Le 2 novembre 1239, l’ost des croisés, soit 4000 chevaliers, arriva à Acre sans chevaux ni provisions. Le sultan de Damas comprit très vite que le plan des Croisés était de l’attaquer. Le second jour de son arrivée, Pierre de Dreux montra ses talents de grand guerrier. Il apprit qu’un grand convoi d’animaux à destination de Damas devait passer dans les environs. Devant la nécessité et devant le désir de gloire et d’action, Pierre décida d’attaquer. Il quitta de nuit le camp sans prévenir personne avec 200 chevaliers et autant de sergents. Il y avait deux routes vers Damas à partir du château d’Ascalon, il divisa donc ses troupes en deux, l’une sous ses ordres, l’autre sous ceux du poète Raoul de Nesle. Pierre prit position à un endroit où la route émerge d’un étroit défilé. Il avait alors un avantage tactique très grand. Les musulmans ne pouvaient plus manœuvrer. Pierre les chargea avec sa cavalerie et le combat devint un combat à corps à corps avantageant les croisés lourdement armés. Pierre fut tout de même obligé d’appeler à son secours Raoul qui arriva. La victoire leurs étaient alors acquises. Ils poursuivent donc les fugitif dans le château d’Ascalon et firent un massacre (K.M.. SETTON, A history of the crusades, vol. II, the later crusades, 1189-1311, Madison, Milwaukee and Londres, 1969, p. 474-475). Ce succès provoqua la jalousie d’un certain nombre de barons. En effet, les comtes de Bar et de Montfort, Hugues, duc de Bourgogne, Gauthier de Brienne, comte de Jaffa, Balian, seigneur de Sidon, Jean d’Ibelin, seigneur d’Arsuf, Odon de Montbéliard et le vicomte de Beaumont, accompagnés de 400 à 600 chevaliers, décidèrent d’aller au devant du sultan d’Egypte qui remontait par Gaza. Thibaut de Champagne, Pierre de Dreux (dans les textes, il est encore mentionné comme comte de Bretagne) et les maîtres des ordres militaires prirent connaissance de leur plan et protestèrent énergiquement. Les barons voulaient que l’ensemble de l’ost avance jusqu’à Ascalon et attaque dès que possible. Thibaut refusa. Ses propres vassaux étaient même contre lui. Les barons quittèrent tout de même Jaffa de nuit, chevauchèrent toute la nuit, passèrent Ascalon et arrivèrent aux frontières du royaume de Jérusalem. Ils furent écrasés par les troupes du sultan lors de la bataille de Gaza. Le comte de Bar fut tué. Le vicomte de Beaumont, le comte de Montfort et 80 chevaliers furent capturés avec beaucoup de sergents. Thibaut de Champagne et Pierre de Bretagne ne purent qu’accepter cette défaite et leur armée dut se retirer à Ascalon, puis à Acre. En fait, il semblerait que la retraite n’était pas due à la perte d’une centaine de chevaliers mais au manque de provisions et aux disputes entre les croisés et les barons du royaume de Jérusalem qui voulaient uniquement défendre leurs propres terres. Les croisés fortifièrent Ascalon. Après avoir négocié une trêve, ils rembarquèrent 14 septembre dans les mêmes bateaux qui amenaient Richard de Cornouaille et les croisés anglais (POCQUET, Les papes, op. cit., p. 127 ; Les Gestes des Chiprois, dans R.H.F., t. XXI, p. 594 ; Guillaume de Nangis, Gesta S. Ludovici et Chronicon, dans R.H.F., t. XX ; Philippe Mousket dans R.H.F., t. XXII, v. 28852-29226 ; SETTON, op. cit., p. 483).
[28] Le 28 août 1249, les croisés du roi de France quittèrent Aigues-Mortes, cinglèrent vers Chypre et décidèrent de se diriger vers l’Egypte. Ils prirent Damiette (LEVRON, Pierre Mauclerc, op. cit., p. 222 ; Joinville, op. cit., p. 84, 117, 134). Le 22 février 1250, l’ost royal connut une défaite écrasante à Mansourah. Le comte d’Artois, frère du roi, y mourut. Le roi de France et Pierre Mauclerc y furent faits prisonniers. Pierre, blessé à la tête, se retrouva enfermé dans les soutes d’une galère. Le roi racheta à prix d’or son armée (LEVRON, Pierre Mauclerc, op. cit., p. 222 ; Joinville, op. cit., p. 84, 117, 134). Le 6 mai, tous les seigneurs francs étaient libérés. Seul Alphonse de Poitiers fut gardé comme otage. Lors du voyage de retour, Pierre de Dreux, gravement blessé, fit son testament. Seul le procès-verbal des exécuteurs testamentaires nous est parvenu. Ces exécuteurs étaient alors Gauthier, prieur de l’abbaye de Val-des-Ecoliers, et Rainaud, évêque de Paris, qui relatèrent en 1260 l’accomplissement de leur mission. Pierre léguait au chapitre de Notre-Dame de Paris cent livres dont le revenu devait payer la célébration d’une messe annuelle dite pour le repos de son âme. Il prêtait aussi pour la nouvelle croisade au roi de France 8000 livres. Il mentionnait aussi qu’il souhaitait être enterré à Saint-Yved-de-Braine, près de Laon, dans la nécropole des Dreux (LEVRON, Pierre Mauclerc, op. cit., p. 217-218 ; Gallia Christiana, t. VII, Instrumenta, col. 280).
[29] Pour le tombeau de Pierre Mauclerc, voir P. de LISLE DE DRENNEUC, « Les tombeaux des ducs de Bretagne de la maison de Dreux et de Montfort », dans Bulletin Archéologique de l’Association bretonne, t. VII, p. 111. L’Epitaphe inscrite mentionne : Petrus, filius comitum, Britonum comis, bic nomenatum ; Eligit, profitum, juxta, monumenta parentum ; Largue, magnanimius, audendo, magna probatus ; Magnatum primus, regali sturpo curatus ; In sancta regina deco famul audo moratus ; vitam sublatus abiens parcet hic fumalutus ; Codi militum granddis de milites ; Summa laetitia comiti come oblignet Jesu (B.N.F., collection Duchesne 56, fol. 324.