Le Roman des Bannerets de Bretagne
Samedi 25 avril 2009, par
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Regards étonnés, Association des amis de Gaël Milin, Brest, 2003, p. 367-380.Citer cet article
Jean-Christophe Cassard, Le Roman des Bannerets de Bretagne, 2009, en ligne sur Tudchentil.org, consulté le 4 décembre 2024,www.tudchentil.org/spip.php?article639.
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Sans doute parce que découvert sur le tard par dom Morice et publié à la toute fin du tome III de ses Preuves qui intéresse l’époque moderne [1], le Roman des Bannerets de Bretagne est demeuré méconnu des spécialistes de l’historiographie médiévale. Il s’agit pourtant du premier abrégé, certes partiel, d’Histoire de Bretagne en français, antérieur de près d’un siècle aux fragments conservés de Jean de Saint-Paul [2] : à ce seul titre le texte mériterait déjà de retenir l’attention, mais, datant de 1377 (vers 344), il s’insère aussi dans un contexte politique et idéologique précis aux lendemains de la guerre de Succession dont il contribue, me semble-t-il, à préparer les ultimes rebondissements venant après l’exil contraint du duc Jean IV en 1373 [3].
La tradition de l’œuvre
Dans leur état actuel, les Bannerets occupent six colonnes pleines des Preuves, soit 348 vers à la métrique variée (de 8 à 12 pieds), le plus souvent regroupés par quatrains (46), mais aussi par sizains (7) et octains (5), enfin en quatre périodes plus longues (de 10 à 36 vers). Pour autant que j’en puisse juger, leur langue est du français normalisé tel qu’on pouvait l’écrire dans la seconde moitié du XIVe siècle, sans intrusions de formes dialectales gallo en dépit de l’origine, revendiquée comme de Haute-Bretagne en une occurrence (vers 106), de l’auteur comme de son commanditaire, la dame de Gouyon. Sans véritables effets dramatiques ni génie littéraire, les Bannerets intéressent au premier chef l’histoire.
Leur pauvreté formelle découle pour partie sans doute de la généalogie compliquée de l’œuvre [4] : il s’agit, en effet, de la laborieuse mise en vers d’un texte en prose romane qui reprenait lui-même un original latin aujourd’hui disparu, s’il a jamais existé. L’auteur se présente comme un moine lettré réélaborant en 1377 le travail présenté le 7 juin 1280 (vers 317 et 335) à « Dame Jeanne de Bretagne [5] / De Bertrand Gouyon la compagne » (vers 315-316) par « Frater Guillelmus, dit l’Amant » (vers 313) : ce frère Guillaume aurait été le prieur de Saint-Aubin « Jadis de la fondation / Des ayeux d’icelui Gouyon » (vers 311-312), très certainement Saint-Aubin-des-Bois (en l’actuelle commune de Plédéliac), une abbaye cistercienne du Penthièvre fondée vers 1138 [6]. Le versificateur insiste sur le fait qu’il ne propose qu’un abrégé du livre dont il disposait (vers 157-162 et 298-302), à l’en croire un historique complet des Bannerets (ou « Bannerains ») de Bretagne et plus spécialement du lignage des Gouyon exalté en la personne du fondateur légendaire de leur lignée, compagnon du duc Alain Barbetorte lors de son retour dans la péninsule quand « Un prince Banneret qui se clamoit Gouyon / Conduisist cette classe au port de Matignon » (vers 257-258).
Il s’agit donc à la fois d’un abrégé d’histoire armoricaine et d’un spécimen de cette littérature généalogique vantant les origines mythiques de tel ou tel lignage, un genre qui fit florès au Moyen Âge, en latin comme en français, dès lors que les seigneurs se soucièrent de se trouver des ancêtres à leur convenance et dont on n’avait signalé jusqu’ici l’existence en Bretagne que sous la forme de pieux romans hagiographiques [7]. Mais l’œuvre publiée par dom Morice est tronquée de tous les développements postérieurs au retour victorieux dans la péninsule d’Alain Barbetorte en 936, sans doute, comme nous le suggérerons dans la suite de cette étude, parce que moins susceptibles de coller à l’actualité du XIVe siècle, de répondre à la vraisemblance légendaire à l’heure de la seconde refondation de la Bretagne jadis.
En retour de ses bons et loyaux services, le duc Alain aurait donné au premier des Gouyon le havre de Matignon et la contrée environnante que celui-ci conquit sur les usurpateurs danois (vers 267-294) [8]. Plus tard, un autre Gouyon aurait été le fondateur de Saint-Aubin-des-Bois, une affirmation hautement suspecte puisque l’on ne possède plus la charte de fondation de cette abbaye et d’ailleurs tout à fait invraisemblable dans le contexte du second tiers débutant du XIIe siècle car le soutien à la réforme bénédictine de Cîteaux trouve en Bretagne son ressort au sein de la famille ducale et parmi la haute aristocratie seule [9]... Il n’empêche, les fils de saint Bernard et la maison noble apparaissent avoir eu partie liée aux siècles suivants (les Gouyon ont alors noué des relations d’affaires avec les cisterciens [10] et l’un d’eux, un certain Alain Gouyon, prêtre décédé en 1303, avait son tombeau – aujourd’hui disparu – dans l’église claustrale [11]) : le fait qu’à presque un siècle d’intervalle deux moines blancs de l’endroit aient dédié un écrit à la dame du lignage n’a donc rien d’impossible en soi. Même si ces deux clercs lettrés n’appartinrent évidemment pas à la domesticité des seigneurs de Matignon, ils ont pu en être assez familiers pour entreprendre d’enter une tige à leur nom sur le tronc commun de l’épopée de l’antique noblesse armoricaine.
La plus ancienne de bretagne en français
Le Roman des Bannerets de Bretagne tranche sur les dominantes thématiques de productions mémorielles plus célèbres élaborées sous les règnes de François II et d’Anne [12] : il s’agit d’une Histoire exclusivement laïque, à la différence de celles-ci qui entremêlent origines chrétiennes et litanie des règnes princiers, sans autre allusion religieuse que l’appel dupliqué à prier pour le salut de l’âme des dames dédicataires (vers 335-338 et 347-348). Cette abstention surprend a priori quelque peu puisque l’auteur du texte roman puis son réfecteur sont présentés comme des moines, mais c’est un fait : nulle part les racines catholiques des Bretons ne sont rappelées ni leurs « saints patriotes » évoqués, même pas dans le cas du roi Salomon (vers 183-186) dont la tradition fit pourtant volontiers un martyr et un saint. Une appréhension strictement nobiliaire et événementielle de l’histoire ordonne le récit, sans doute à l’identique des textes dont il s’inspire tout en les contractant.
Si aucune source précise n’est alléguée par le moine anonyme, il n’est pas trop difficile de reconnaître ses champs de référence. D’abord, le fonds commun de la littérature antiquisante avec les figures d’Alexandre, le conquérant de l’Asie, de Jules César, de Caligula, et l’Empire romain en général (vers 4-6, 11-20). Ensuite la matière de Bretagne, sans que ni l’éponyme Brutus ni ses origines troyennes n’apparaissent : l’histoire du duché commence avec Maxime, vainqueur du tyran Gratien, qui confie le pays à son lieutenant, le roi Conan Mériadec, avant de se diriger vers Paris (vers 21-42). Tout cela relève de la vulgate des origines bretonnes depuis Geoffroy de Monmouth (Historia Regum Britanniae, chapitres 84 et 86) et se trouve expédié assez rapidement. De même, les premiers temps de la principauté armoricaine pour lesquels surnagent Hoël le Grand « Qui en faits & en dits fut moult Prince flagrant » (vers 68) et Rivallon [13], le restaurateur de sa grandeur après une phase d’effondrement (vers 85-92). Mais du roi Arthur, pas un mot !
Le texte devient plus prolixe pour les décennies suivantes : à la conquête de la péninsule par Charlemagne (vers 116-120) font suite l’émancipation de Nominoë face à [Louis le] Débonnaire (vers 121-130, 135-146 et 171-174), les règnes d’Érispoë et de Salomon (vers 179-186) déjà marqués par les discordes intestines « Car Neomenus mort, on n’y vit plus que transe, / Que dépredation, embûches & outrance » (vers 177-178), puis une guerre civile éclate entre les deux prétendants « Qui avoient machiné la mort de Salmon (vers 192), deux freres germains / Iessis de Neomene en vinrent ju qu aux mains » (vers 189-190), ouvrant grande la porte aux « Normands Danois » qui, toujours à l’affût, rôdaient autour de la Bretagne (vers 175).
Pascwethen commet alors l’imprudence fatale d’embaucher à son service « D’autant de Normans, que rencontra » (vers 196) : en dépit de la supériorité numérique écrasante ainsi acquise (30 000 hommes contre dix [mille], vers 198 et 203-204), Gurvant l’écrase grâce au secours des fidèles Bannerets (vers 195-210), mais l’auteur du Roman néglige ensuite d’expliciter comment la guerre civile se perpétue entre les héritiers des deux compétiteurs primitifs, Judicaël et Alain, jusqu’à ce que les Normands tranchent le débat en tuant en bataille Judicaël (vers 214), permettant par là même à Alain (surnommé le Grand, vers 194, ou Rebre [14], vers 211 et 215) de restaurer le duché (vers 211-218) par sa victoire sur Hasting [15] (vers 216). Il n’est pas jusqu’aux précisions fournies sur les effectifs mis en ligne tant par Pascwethen que Gurvant, qui ne trahissent l’emploi d’une source dérivée ou parallèle à la Chronique de Réginon de Prüm [16], quoique les circonstances proprement épiques du trépas de Gurvant amené, au dire de Réginon, déjà presque expirant, allongé sur une civière sur le champ de son triomphe, soient tues [17].
Après la disparition d’Alain le Grand, deux incapables (« deux faineans », vers 219) lui succèdent. Dès lors, en dépit de la résistance acharnée des Bannerets, les Danois se saisissent de la contrée armoricaine car Rollon [18] vole à leur secours (vers 223-226). D’où l’exode des Bretons survivants en Angleterre, tandis que des malheurs sans nom (« des vilainies infames », vers 234) s’abattent sur la péninsule désertée, martyrisée (vers 229-246). Un exil de cinq années en découle avant qu’Alain Barbetorte (« Icel jeune Alain élevé / De sang royal, comme est trouvé », vers 251-252) ne rassemble assez de navires et d’épées pour rétablir la Bretagne dans ses droits bafoués (vers 249-256) en l’an 936 (vers 287-290). Le rappel de ces faits sonne juste à l’oreille du lecteur familier des historiens contemporains : outre la trame chronologique d’ensemble convenablement restituée, s’introduisent ainsi dans le Roman l’écho de la première tentative de soulèvement fomentée par Alain sur ses terres paternelles du Poher, écrasée en 931 [19] (d’où les cinq années d’exil supposées), puis le rappel assourdi du débarquement ultime en Armorique de l’héritier des rois tel que l’a enregistré la Chronique de Nantes [20].
Des thèmes porteurs d’avenir historiographique
Ainsi, dès l’abord des temps carolingiens, il ne s’agit donc plus d’une histoire d’essence strictement légendaire, quoique les faits soient rarement datés à l’année près [21]. Ce constat conforte l’hypothèse qu’il circulait bien dans le duché dès le XIIIe siècle des abrégés assez fiables de son passé, consultés par les érudits du temps qui les façonnaient ensuite à leur guise afin de répondre au mieux aux souhaits de leurs commanditaires. En quelque sorte, Jean de Saint-Paul ou Pierre Le Baud ont eu des prédécesseurs inconnus, toutefois moins fascinés qu’ils le seront par le mythe troyen greffé sur le nom de Brutus, bien que ces premiers auteurs dessinent déjà avec netteté les lignes de faîte d’un temps reculé, mises au service d’une idéologie « nationale » appelée à être reprise et amplifiée encore par les Montforts. Ses composantes essentielles figurent, en effet, d’ores et déjà fermement campées dans le Roman.
Le théâtre breton armoricain occupe tout l’espace référentiel. Avec à l’extérieur deux pôles négatifs, un espace neutre et un pôle positif : la terre natale des Danois ne joue que les utilités lointaines, toujours prête à vomir de nouvelles bandes d’oppresseurs à chaque nouvel accès de faiblesse des Bretons ; la Normandie de Rollon sert, elle aussi, de repoussoir puisque les Danois s’en sont emparé et entendent depuis lors faire valoir en deçà du Couesnon les droits que leur aurait concédés un certain traité controuvé (vers 227-234) – une prétention qui renvoie à une longue controverse juridique autour de l’hommage que le prince breton aurait pu prêter comme vassal à son puissant voisin au Xe siècle. Le cadre du royaume de France n’est pas évoqué, sinon dans sa configuration antérieure quand l’Empire des Francs dominait le continent européen : les figures de Charlemagne, de Louis le Débonnaire s’intègrent de la sorte à la geste des Bretons en des termes non polémiques, tel un constat d’inclusion plutôt aléatoire. Quant à l’Angleterre – non reliée au souvenir des anciens Bretons de l’île –, elle sert de refuge temporaire aux Armoricains chassés de chez eux par les Danois à deux reprises (d’abord au temps de Rivallon, puis avec Alain Barbetorte) et revêt ainsi, de façon indirecte, une tonalité positive même si elle n’intéresse point pour elle-même.
Positives également les circonstances de l’entrée des Bretons sur le continent : ils y pénètrent par le droit de conquête à mains armées afin de se venger du tyran Gratien qui les avait injustement opprimés et contraints à s’exiler en Angleterre, le temps d’y refaire les forces des Bannerets. En somme, une conquête réparatrice des torts subis, donc honorable au contraire des détestables entreprises postérieures des « Normands Danois ». Victorieux des légions, leur chef Maxime se prépare à étendre son pouvoir à la Gaule entière en marchant sur Paris (vers 40) quand il laisse derrière lui le roi Conan Mériadec à la tête de ses meilleurs bannerets. Le mythe d’une conquête forcément glorieuse dans l’orbite de Rome se combine dès l’abord avec celui d’une Bretagne ayant atteint son ressort territorial complet : Nantes, Vannes et Rennes sont trois cités intégrées au royaume dès sa fondation, que Nominoë retrouva sans peine lorsqu’il « reprit Bretagne jusqu’à la Loir » (vers 130) – cette complétude géographique du duché sera également soulignée lors des enquêtes entreprises sous les Montforts [22], qui marquent toutes que la Bretagne est une, parfaite, homogène, sans enclaves étrangères en son sein, un symbole évident de souveraineté lié à la perfection d’un espace politique défini par des frontières établies de toute antiquité.
Cependant cette unicité n’a pas toujours été respectée à l’échelle inférieure puisque si le Roman mentionne l’existence primitive de trois commandements « L’un dans le pays Rennois, l’autre à Nantes & le tiers / A Vannes » (vers 49-50), il évoque aussi celle, un temps, d’un royaume de Domnonée pour Rivallon (vers 91) – une partition en soi ferment d’amenuisement pour le restant du pays (vers 97-100) – tandis qu’il tait l’originalité de la moitié occidentale du duché, à peine suggérée par la mention d’une Haute-Bretagne qui implique son corollaire logique. La question de la diversité des langues n’est pas non plus abordée, encore moins celle de l’extraction prétendument troyenne du breton : comme je l’ai déjà signalé, cette Histoire ne prend pas en compte la souche légendaire de Brutus et de ses hommes issus de Troie la Grande et n’évoque en rien les conditions de l’établissement de leurs descendants dans la péninsule, notamment le « génocide originel » auquel ils auraient été réduits faute d’épouses de leur race [23]. Ces silences peuvent s’expliquer par la relative brièveté de la version du Roman dont nous disposons seule, comme par l’origine gallo de ses rédacteurs successifs, un ancrage géographique qui rend moins impérieuse la nécessité d’expliquer la dualité linguistique, marquante à l’échelle du duché mais sans pertinence dans leur environnement immédiat.
En tout cas, avec la conquête héroïque à seule fin de rétablir une élite opprimée dans ses mérites, avec la référence à une Bretagne parfaite « incréée » dès les temps de Maxime et de Conan Mériadec, avec le statut originel de royaume qui est le sien alors et qui le demeura des siècles durant, nous tenons déjà là trois composantes clés de l’idéologie justificatrice de l’État breton aux derniers siècles du Moyen Âge, des composantes ici parfaitement intégrées, soulignons-le, à un discours mémoriel indépendant de la raison d’État. Ce qui suppose que plutôt que les créer, les chantres du duché des Montforts ont récupéré et agencé à leur profit des thèmes qui leur préexistaient de longue date.
D’autres rapprochements peuvent encore être faits avec ce qui deviendra la vulgate officielle du passé breton. Comme chez Pierre Le Baud ou Alain Bouchart, le temps historique s’organise au rythme saccadé des règnes, avec les mêmes princes couverts d’éloges – déjà Nominoë, les deux Alain –, les mêmes causes récurrentes de faiblesse lorsque le souverain s’avère défaillant par nonchalance ou lorsque la discorde civile s’introduit, ouvrant grande la voie aux malheurs pour des Bretons abandonnés à leur triste sort, promis à l’extermination ou à la fuite loin de chez eux. D’où aussi la perte de statut du royaume originel, ravalé au rang de duché à l’heure du retour d’Alain Barbetorte sur la terre de ses ancêtres (vers 291).
L’appel à l’unité des Bretons derrière leur chef naturel, la méfiance à l’encontre des étrangers toujours soupçonnés des plus noirs desseins – non sans connotations xénophobes [24] –, l’état royal ancien de la Bretagne structureront eux aussi l’argumentaire des historiographes postérieurs, qui donnent seulement une tout autre ampleur érudite à leurs constructions. En cela le Roman des Bannerets de Bretagne apparaît bien – dès 1280 ou en 1377 ? – comme la première Histoire de Bretagne en langue vulgaire dont nous disposions. Mais le public visé n’est pas encore celui de la cour ducale placée en compétition avec ses homologues royales ou princières.
Entre passé et futur proche, les dynamiques de l’Histoire
Le titre de la composition versifiée présentée à la dame de Gouyon en 1377 définit en effet avec précision le public auquel l’auteur s’adresse : il s’agit des Bannerets, c’est-à-dire des chevaliers assez riches pour se rendre à l’armée à la tête d’une « bannière » regroupant plusieurs autres combattants nobles, en somme l’élite de l’aristocratie moyenne située au-dessus des simples chevaliers et autres bacheliers ou écuyers (vers 7-9). De fondation presque immémoriale puisque rapportée à l’Antiquité la plus honorable, ils auraient d’abord servi le souverain en tant que gardes de son corps (vers 15) jusqu’à ce que les injustices commises par Gratien ne les contraignent à l’exil outre-Manche, à la révolte ouverte : entraînés par un nouveau chef, Maxime, vengeur des exactions subies, ils demeurent, même établis comme seigneurs dans leurs Baronnies (vers 271-274 et 301-302), en liens de dépendance honorable avec le prince « de maniere / Qu’après le Duc ou Roy est toujours la Banniere » (vers 9-10). Ces Bannerets tiennent les châteaux et les terres que le roi Conan avait donnés à leurs ancêtres (vers 51-54), qu’ils avaient reconquis sous Rivallon (vers 93-96), que Nominoë avait redistribués (vers 143-146), que le duc Alain Barbetorte a confirmés pour de bon à leurs lignages (vers 291-294), un patrimoine collectif qu’ils ont su défendre au péril de leur vie, quels que fussent les aléas traversés par leur pays au fil des siècles. Ils auraient été à l’origine quarante-trois en Bretagne (vers 43 et 47) « Et leur furent baillez chacun une chentaine / De Chevaliers Bretons pour checun Capitaine » (vers 45-46).
Au vrai, les Bannerets incarnent ce pays de Bretagne dans son principe le plus authentique (vers 147-155) et procurent à son histoire sa véritable colonne vertébrale, dans ses périodes de gloire comme de misère : conquérants avec Maxime, garants ensuite de la paix et de sa sécurité extérieure (vers 175-176, 201-202, 221-224), ils sont aussi les derniers résistants lorsque le pays sombre par la faute de souverains ineptes (vers 235-246), les premiers à reprendre pied sur une terre dévastée par les courses de barbares sans foi ni loi (vers 229-234, 247-248 et 275) sitôt que se révèle un prince valeureux capable de prendre leur tête afin de chasser l’usurpateur étranger. Dans la narration de leurs faits et gestes, ce schéma héroïque se trouve appliqué complètement à deux reprises [25], toujours contre des envahisseurs danois ou supposés tels. Une fois le roi ou le duc rétabli dans sa dignité, les Bannerets exercent paisiblement leur fonction de chiens de garde de la Bretagne jusqu’à la catastrophe suivante.
Mais des concurrents redoutables se dressent contre eux après la disparition d’Hoël le Grand, les comtes qui « se disant du sang des Rois par grant méconte, / Firent ligue à part chacun de son costé, (...) Contes cuidoient bien usurper / La Royauté & l’exsurper » (vers 72-73 et 75-76). Mal inspirés, ces comtes ne se contentent pas de rompre l’harmonie d’une république nobiliaire composée d’égaux placés sous l’autorité éminente (vers 59-62 et 215-218) ou contrainte (vers 163-166) du prince ; en débauchant les obligés des Bannerets (vers 111-112, 132-133, 137), en corrompant « Faute de Roys mal apertis (...) Nobles jusqu’à Bannerets mesmes » (vers 101 et 104), ils amoindrissent le pays de Bretagne et le précipitent dans les discordes civiles à cause de leurs ambitions effrénées, le livrent à Charlemagne (vers 111-120), attirent les « Normands Danois » qui le ruineront et contraindront les meilleurs des Bretons à un exil temporaire, le temps de régénérer leurs forces et de retrouver un chef indiscuté. « Mais venant Roy nouvel, o celle Bannerie, / Puis ne fut en ce pays mot de mutinerie » (vers 107-108). Les comtes sont donc de sempiternels fauteurs de troubles, alors que les Bannerets rétablissent ordre et sécurité après leurs méfaits : cette dialectique à l’œuvre entre les deux groupes nobiliaires majeurs impose sa dynamique propre aux pulsations alternées de l’histoire du duché retracée jusqu’en 936.
Les données du jeu politique prévalant en 1377 éclairent sans doute l’intérêt que le moine anonyme et les Gouyon portent à ces épisodes surgis d’un passé révolu, au point d’entreprendre la réfection versifiée d’un texte mis en prose romane presque un siècle auparavant : depuis 1373 le duc Jean IV est en fuite, chassé de ses états par la grève du service que lui opposait sa noblesse devenue lasse de ses maladresses au sortir d’une interminable guerre civile. En dépit du traité de Guérande de 1365 qui réglait en apparence la question de la succession bretonne, Jean IV n’a pas su, en effet, s’imposer comme un souverain restaurateur de la concorde civile : sa situation présente peut se comparer à celle d’un Alain Barbetorte, tige de la dynastie moderne des ducs, lui aussi chassé de la péninsule par les fautes de sa noblesse. Mais en l’absence de « Messire Jehan de Montfort Chevalier, naguères Duc de Bretagne [26] » comme le définit Charles V en 1378, le devenir du duché demeure incertain : les Penthièvre n’ont pas réussi à se rétablir puisque le proscrit n’est pas physiquement mort comme l’auraient exigé les clauses, acceptées par eux, du traité de Guérande et qu’ils n’ont, en sus, aucun candidat à proposer [27]. Le trône ducal demeure en déshérence, des étrangers malfaisants rôdent toujours à travers la province et la menace se fait jour d’un rattachement unilatéral de la Bretagne au domaine royal. De cette forfaiture, la haute aristocratie – les comtes du poème – se ferait peut-être la complice, elle qui possède des intérêts dans le royaume, chacun le redoute à présent. Le devoir des Bannerets, en 1377 comme naguère, consiste donc à sauver ce qui peut encore l’être et le rappel de l’histoire peut aider à la mobilisation de leurs énergies : le sursaut viendra d’eux comme il est venu de leurs ancêtres, jadis, à maintes reprises « Qu’ont esté si grands et valeureux, / Et que pour défendre patrie / N’ont jamais refusé partie » (vers 306-308).
Mon hypothèse de lecture est que le texte réactualisé s’inscrit dans ce contexte très particulier d’une agitation croissante des esprits contre les hauts barons soupçonnés de vouloir ouvrir la voie au roi faute de pouvoir rétablir dans ses droits l’héritier absent de Jeanne de Penthièvre. Mais l’aristocratie moyenne commence à se révulser à la perspective de ce dénouement qui la priverait de son espace politique coutumier : déjà dans un passé récent les Bretons s’étaient insurgés contre le projet prêté à Jean III de céder à sa mort le duché au roi faute d’un héritier indiscutable dans son entourage [28]. La menace resurgit en 1377 et elle apparaît tout autant insupportable aux lignages féodaux qui, comme les Gouyon, ont pourtant combattu pour Charles de Blois de façon déterminée durant les décennies précédentes.
Les Gouyon et le retour de Jean IV
Dès le 29 août 1341, en effet, un certain Alain Goyon comparaît à Paris devant la cour de Parlement réunie à celle des Pairs de France afin d’apporter son témoignage en faveur des droits de Jeanne de Penthièvre à succéder selon la coutume de Bretagne à son oncle Jean III [29]. Puis d’autres Gouyon figurent régulièrement sous les armes dans le parti de Blois : ils sont notamment deux, Bertrand et Louis, dans la retenue de Beaumanoir lors du Combat des Trente le 26 mars 1351. Leur sœur Renée a épousé Sylvestre Budes, un chef de routiers célèbre, cousin par sa mère de Bertrand du Guesclin. Quant à lui, Alain, seigneur de Matignon († 1363), le chef de leur maison, se voit récompensé de ses conseils et de son aide par un don de Charles de Blois dès le 20 février 1342 [30] ; plus tard, en 1377, son second fils, Étienne, sert Jeanne comme maître d’hôtel [31] après avoir participé à différentes tractations diplomatiques en vue d’assurer la délivrance du duc Charles [32] et siégé au conseil de la duchesse [33]. Tout comme les autres membres des lignages de leur parenté, les Gouyon ont aussi combattu alternativement pour leur prétendant ou pour le roi de France [34] : leur engagement dans la guerre de Succession est donc clair, même si leurs faits d’armes ont laissé moins de souvenirs que d’autres [35]. Et après 1364 ils participent aux dernières opérations militaires contre les Anglais incrustés dans le duché, notamment lors du siège de Bécherel en 1371 [36], puis rejoignent les rangs de l’armée française qui occupe le duché après la fuite de Jean IV [37]. Mais comme les autres fils de l’aristocratie moyenne supérieure, ils ont dû assez vite déchanter à partir du moment où le roi a paru vouloir outrepasser ses prérogatives de suzerain...
Sous le voile de l’histoire, un projet politique sous-tend possiblement le Roman des Bannerets de Bretagne : celui d’une république nobiliaire placée sous l’égide d’un prince autochtone compétent, seul susceptible de bander les énergies bretonnes les plus saines afin de chasser les intrus qui ruinent le pays – « Nettir Bretagne d’estrangiers » (vers 280) – et de mettre au pas les mauvais, les comtes impudents, cette poignée de grandes familles prêtes à tous les abandons, dont l’histoire condamne les usurpations de gloire comme les trahisons faites de maladresses irresponsables. Que ce prince espéré débarque aujourd’hui comme naguère d’Angleterre, ce ne serait que la duplication de l’itinéraire emprunté dans un passé indéniable par Alain Barbetorte, l’actualisation du retour du prince salvateur que les Bannerets reconnaîtraient dès lors pour leur. Or, en 1377, Jean IV a précisément trouvé refuge dans la grande île voisine...
On sait ce qu’il advint : lorsque Charles V prononce en 1379 la commise du fief breton et sa réunion à la Couronne, des ligues de noblesse s’organisent aussitôt « à la garde & défense du droit Ducal de Bretagne, contre tous ceux qui voudroient prendre la saisine & possession dudit Duché, excepté à qui elle doit appartenir en droite ligne, & le roi de France en Souveraineté [38] », réunissant les anciens adversaires du temps de la guerre civile sous la bannière d’une république nobiliaire bien décidée à s’opposer à toute confiscation unilatérale du duché. Même Jeanne de Penthièvre y adhère puisque le jugement arrêté par le Parlement de Paris revient à déposséder les siens de son héritage. Même le fidèle parmi les fidèles de la Couronne, le connétable Bertrand du Guesclin, biaise et finalement n’obéit pas aux ordres reçus [39]. Jean IV débarque bientôt d’Angleterre et est accueilli partout dans le duché parce qu’il incarne dans l’immédiat la seule alternative possible à l’arbitraire royal.
Dans toute cette agitation les Gouyon tiennent plus que leur part, ils agissent souvent au premier rang. Le chevalier Étienne Gouyon ne se contente pas d’adhérer le 26 avril 1379 à la ligue de la noblesse : il en devient l’un des quatre maréchaux chargés de l’organiser [40], puis il figure en tête des quatre ambassadeurs dépêchés auprès de Jean de Montfort le 4 mai [41]. Après le retour de Jean IV, Étienne et Bertrand Gouyon lui renouvellent leur serment de fidélité à Dinan le 20 octobre [42], en attendant qu’Étienne ne reparte le 10 janvier 1380 n.s. vers l’Angleterre afin de s’y entretenir avec le roi Richard II au nom de son duc [43]. Les deux Gouyon ratifient de leurs seings le second traité de Guérande en 1381 [44]. Enfin, Étienne se voit récompenser par Jean IV qui lui accorde la charge d’amiral de Bretagne, attestée pour la première fois avec certitude en 1386, charge qu’il assumera jusqu’à son décès en août 1401 avec, en ses dernières années, l’aide de son fils Bertrand, vice-amiral [45].
Si le traité de Guérande ne règle pas toutes les questions pendantes comme le marquent les étapes ultérieures d’un règne sévèrement chahuté [46], il entérine la sortie d’une crise aiguë dans un sens favorable aux aspirations contrites de la bonne noblesse bretonne et ouvre de belles perspectives de promotion à certains de ses membres. Cet aboutissement risque fort d’avoir été au moins préparé dans les esprits par des textes de propagande dont le Roman des Bannerets de Bretagne me paraît fournir un intéressant exemple, même si son message demeure crypté en termes d’histoire ancienne. D’où sans doute la réécriture du précédent roman dans l’entourage des Gouyon, eux qui épousèrent la marche générale de leur groupe social en ces circonstances difficiles que transcende toutefois l’espoir du rétablissement d’une authentique république de nobles responsables et égaux, fiers de leurs lignées et conscients de leur responsabilité éminente dans le devenir de leur pays. Une utopie récurrente tout au long des derniers siècles du Moyen Âge [47] avant que ne s’impose sans recours le modèle de l’État princier, déjà absolutiste dans ses visées.
Le Roman des Bannerets de Bretagne
1. Banerets est moult grand honor
2. Tant à Roy, Prince que Seignor ;
3. Et sa fondation premiere
4. Vint d’Aléxandre & sa Banniere,
5. Quant la Perse alloit conquerant,
6. Et toute l’Asie guerrant.
7. L’ordre de Bannerets est plus que Chevalier,
8. Comme après Chevalier acconsuit Bachelier,
9. Puis après Bachelier, Escuyer ; de maniere
10. Qu’après le Duc ou Roy est toujours la Banniere.
11. Dès que fut le premier des Empereurs Jules
12. Cesar, je l’acertaine & le fait est tieule,
13. De nobles Bannerains il composa ses bandes,
14. Qui n’avoient petites prébendes.
15. Bandes estoient autant que les Gardains du corps
16. De l’empereur Cesar ; de ce je suis records,
17. Et par tout où alloit, tant devant que derriere
18. Estoit toujours Banniere.
19. Auguste Caligula & autres Rois ensuite,
20. Jusqu’à Gracian de bandes firent suite ;
21. Mais grand meschief en print à icel Gratian ;
22. Car il en perdit vie o tout l’Empire sian.
23. Gracian exila en la Grande-Bretagne
24. Bannerets par dedain & hains trop estragne,
25. Dont par leur maltalent eux qui cuidoient avoir
26. De jetter hors des Ducs la force & le pouvoir,
27. Si eslirent un pour enguigner l’Empire,
28. Appellé Maximus, auquel n’en fut pas pire.
29. Quand se vit institulé cil Maximus Clemens,
30. A bien chommer l’estat mit tous ses pensemens,
31. Et ot classe de bien cent mil hommes de guerre ;
32. Pour passer en Bretagne il quitta l’Angleterre.
33. Ses biaux Bers Bannerains y firent grand échec,
34. Et pas un des Romains, qui demeuroient illec,
35. Tout premier Legions n’y restierent en vie,
36. Tant avoient Bannerains de forsene & d’envie
37. Encontre Gracian, que qui estoit à lui
38. Si passa par l’espée, ou bientost se enfui.
39. Après ce pays conquis Maximus fit retrée,
40. Et torna vers Paris, ou voulsit faire entrée ;
41. Et pour ce avant partir Conan Meriadec
42. Laissa Roy en Bretagne & une bande avec.
43. Celle bande, qui estoit bien de quarante-trois,
44. Furent autant de chefs composés celle fois ;
45. Et leur furent baillez chacun une chentaine
46. De Chevaliers Bretons pour checun Capitaine.
47. Ainsi quarante-trois firent autant de bandes,
48. Et par sus tous, trois chiefs leur furent en commande ;
49. L’un dans le pays Rennois, l’autre à Nantes & le tiers
50. A Vannes, puis tantost dirai le démentiers.
51. A chacun fut donné maintes possessions
52. Pour tenir haut estats & faire pensions
53. A tous les enrollés, qu’estoit noblesse gente,
54. Et voisine du lieu à ce plus diligente.
55. Ainsi furent en celle saison
56. Les aisnés de chaque maison
57. Des nobles en toutes contrées
58. En celles bandes registrées.
59. Quant pour Princerains ils estoient principaux
60. En tote la Bretagne & comme generaux,
61. Qui n’avoient par sus eux que le Duc seulement,
62. Auquel ils gardoient foy bien & loyalement.
63. Ils commandoient sur tout quant il falloit poindre & mordre,
64. Puis en paix ils mettoient toute police & ordre.
65. Et ainsi furent dempuis ce Conan en grand pos,
66. Qui tinrent la Bretagne en paisible repos.
67. Bretagne fut en pos jusqu’à Hoel le Grant,
68. Qui en faits & en dits fut moult Prince flagrant.
69. Mais quant fut mort ce Roy, le meilleur que peust estre,
70. Bretagne vit que c’est de perdre tel maistre
71. Certains nouveaux gregneurs prinrent le nom de Contes,
72. Et se disant du sang des Rois par grant méconte,
73. Firent ligue à part checun de son costé,
74. Ou sans les Bannerains ne sçai qu’en eut esté.
75. Contes cuidoient bien usurper
76. La Royauté & l’exsurper ;
77. Mais en vain : car toujours Bannieres
78. S’opposerent à leurs manieres
79. Et rabatirent leurs desseins,
80. Qui n’estoient ni justes, ni saints.
81. Cela fut environ quatre cent quatre-vingt,
82. Que tote discordance en ce Royaume advint.
83. Puis les Normands Danois bien avant se glisserent
84. Et tant firent d’échec, que bien peu en laisserent.
85. Rivallon jeune & bel en Angleterre estoit
86. Qui par le commun bruit ce tumulte écoutoit,
87. Si partit & la mer traversit o sa suite
88. Si bien & si à temps, que mit Danois en fuite ;
89. Et jaçoit qu’autre Roy Breton
90. Fust, non d’effet, ainczois de nom,
91. Pourtant fut-il Roy de Domnonée
92. Clamé dès celle mesme année.
93. Et les Bannerets qu’il mis hors
94. Avoient Danois, quand les plus forts
95. Estoient, si reprinrent leurs erres,
96. Leurs possessions & leurs terres.
97. Encore deux cent ans patience dira,
98. Non mie en tote Bretagne, ainczois en ce coins là ;
99. Car jaçoit qu’autre part Bannerets eussent songne
100. Par la faute des Rois vaine, estoient leurs besognes.
101. Faute de Roys mal apertis
102. Contes refirent leurs partis,
103. Et debaucherent par leurs themes
104. Nobles jusqu’à Bannerets mesmes.
105. Bien près de l’an six cent que vint autre refrain,
106. Haute Bretagne fut toujours en mauvais train.
107. Mais venant Roy nouvel, o celle Bannerie,
108. Puis ne fut en ce pays mot de mutinerie.
109. Trois Rois l’un aprés l’autre y regnerent contents,
110. Et la Bretagne fut moult heureuse en ce temps ;
111. Mais ces trois Rois passés les Contes mirent bandes
112. O tous leurs Chevaliers en routes & debandes.
113. Quand les Bannerets furent bas,
114. Les Contes lors sans nuls debats
115. Firent leur desir en Bretagne.
116. Mais sur ce y vint Charlemagne,
117. Qui n’y trouvant plus Bannerets
118. A défendre Bretagne prests,
119. Tout ainsi comme affiexioit d’estre,
120. A bon marché s’en rendit maistre.
121. Bretagne estoit encore au Roi le Debonnaire
122. Quand Neomene vint qui lui sceut retraire ;
123. Et jaçoit que sous lui pourtant Bannerets sus
124. Remist qui les François firent bien aller jus.
125. Le vaillant Roy Neomenus,
126. Auquel ne se comparent nuls,
127. Ayant les bandes redressiées
128. Sans attendre autres Sentenciées,
129. Que de son simple & franc vouloir,
130. Reprit Bretagne jusqu’à la Loir.
131. Adonc les Bannerains, qui mis bas avoient armes
132. Tant par force, qu’aussi par faute de Gendarmes,
133. Que Contes hors son droit leur avoient débauchez,
134. Si devindrent plus grands que n’étoient devant chiefs.
135. Si advint en l’année huit cent quarante-deux,
136. Et affin d’obvier à cas si hazardeux
137. De leurs gens suborner, si les mirent à gages,
138. Et les y tinrent tous o chevaux & bagages.
139. Autres furent alors maint autres convenus,
140. Et leur furent haussiez honneur & revenus,
141. Si qu’un avoit tant gens par dessus vingt & quatre,
142. Qu’il en pouvoit nourrir en estat de combattre.
143. Aussi pour empescher surprises & cas tels
144. Leur furent ottroyez villes, forts & chastels
145. O honnours, dignités & telles convenances,
146. Qui des villes & forts font les appartenances.
147. Porter leurs écus en Banniere
148. Est d’institution premiere
149. Comme aussi sur les trois premiers
150. Avoir couronnes & cimiers
151. Si leur appartiennent & les portent
152. Et comme à les Ducs se rapportent ;
153. Et tout ainsi comme sont Rois
154. Et Ducs ainsi font-ils tos trois
155. En maintes belles entremises,
156. Que n’est mestier d’estre ici mises :
157. N’est celle traduction
158. Que pour donner déduction
159. En langue vulgare & connue
160. Des Bannerets la convenue,
161. Et non de tot le livre adonc,
162. Seroit icel translat trop long.
163. Quand le Ber Rochefort un de ces trois susdits
164. Un jour eut noise o Duc, tos furent si hardis
165. Que de le menacier se ne vouloit retraire,
166. Que bien sçavoient moyen comme il le falloit traire.
167. Bannerets estoient moult greigneurs
168. Et en Bretagne grands Seigneurs,
169. Dit le latin, quand fut l’entree
170. D’eux en celle noble contrée.
171. Or le fils Debonnaire eut moult grand dementier
172. O Neomene por le Royaume héritier.
173. Mais tosjors perdit temps, & fut contraint de faire
174. Paix, si vouloit ses gens de Bretagne retraire.
175. Pourtant Normans Danois en Bretagne rodoient
176. Et sans les bandes plus molestée l’auroient ;
177. Car Neomenus mort, on n’y vit plus que transe,
178. Que dépredation, embûches & outrance.
179. Le fils de Neomene Eruspoë clamé
180. Fut au lieu de son pere, au Royaume nommé ;
181. Mais Salmon, ja iessi de l’aisné Neomene,
182. Si l’occit, puis amprès souffrit mort inhumaine.
183. Salmon occit Eruspée ;
184. Puis Salmon par autre espée
185. Fut puni de ce mesfait ;
186. On lui fit comme avoit.
187. Quand Salmon fut occis, se fut Bretagne enqueste ;
188. Mais toujours eux avoient les Bannerets en teste,
189. Qui piller la vouloient, & deux freres germains
190. Iessis de Neomene en vinrent ju qu aux mains ;
191. L’un fut Pastenethein, l’autre eut nom Urfaon,
192. Qui avoient machiné la mort de Salmon.
193. Puis après maints debats tous s’y s’en passerent,
194. Et à Alain le Grand le Royaume laisserent.
195. Pastenethein si s’accointa
196. D’autant de Normans, que rencontra ;
197. Et se trouverent bien ensemble
198. Trente mille, comme il me semble.
199. Urfaon lors son recours eut
200. A Bannerets, à qui s’en deult ;
201. Et por ce qu’ô eux menoit guerre
202. Pas n’eussent mestier grand requerre.
203. Pastenethein avoit trente mille hommes en suitte,
204. L’autre seulement dix, encore prirent la fuite,
205. Sinon les Bannerets, qui tinrent toujours bon,
206. Et donnerent victoire à Gurvant Urfaon.
207. Onc ne fut un miracle tel
208. Que du preux Gurvant gent & bel,
209. Quant o les seules Banneries
210. Fit fouir tant de gendarmeries.
211. Advint un autre temps, qu’estoit Alain Rebré,
212. Contre Judicael forment moult accabré,
213. Por ly Royaume avoir, que Normands accorderent
214. Parce qu’en conflit mort Judicael ruerent.
215. Alain Rebré suivant d’accord partie après
216. Sur Hasting se rua ô tous les Bannerets,
217. Si bien & si à temps, que ce grand ost défirent,
218. Et puis couronner Duc de Bretagne le firent.
219. Après cetuy Alain furent deux faineans,
220. Qui rien l’un après l’autre ne valerent neans ;
221. Et pour ce les Danois vinrent sur celle affaire,
222. O les preux Bannerets n’eurent pas peu à faire.
223. Partant les Bannerains à force de courre sus,
224. A ces Danois Normans en eurent le dessus :
225. Mais si y vint Rollo, qui bien eut sa revange,
226. Mettant tout à la mort, ou bien en terre estrange.
227. Rollo pour des treus prétendus
228. Qu’on ne lui avoit mie rendus,
229. Si vint & envahit Bretagne
230. O une cruauté estragne.
231. Il renversa villes & forts,
232. Fit tous mourir, ou iessit hors
233. Bretagne tant hommes que femmes
234. O des vilainies infames.
235. Il n’y eut en Bretagne autre que Bannerains,
236. Ni Prince, ni Seigneur qui y missent les mains,
237. Et tant qu’illec y eut de villes en instance
238. Ils tinrent bon dedans & y firent resistance.
239. Si par monts & par vaux fut le pays assailli,
240. Et hors les Bannerets tos orent coeur failli,
241. Si que tout leur salut estoit fouir grand erre,
242. A qui premier passe en Angleterre.
243. Ils furent les derrains de Bretagne à yessir,
244. Et tant que fut pouer à eux de s’agencir,
245. Si tinrent bon ; mais quand ne porent plus sespeautre,
246. Tos navrés & recrus ils suivirent les autres.
247. Ainsi fut à ce Roy Bretagne en tos itans
248. Par ce cruel Rollo deserte d’habitans.
249. Puis au bout de cinq ans fortune mieux prospere
250. Fit soudre un jeune Alain qui remit tout en aire.
251. Icel jeune Alain élevé
252. De sang Royal, comme est trouvé,
253. Emprunta nefs en Angleterre
254. Por retorner en sienne terre,
255. Ou quand o sa gente fut venu,
256. Il fit prest sur gras & menu.
257. Un Prince Banneret qui se clamoit Gouyon,
258. Conduisist cette classe au port de Matignon,
259. Où arrivé que fut, il descendait sans faille,
260. Et mis grands & petits en ordre de bataille.
261. Un Chevalier illec estoit
262. Qui le nom de Goyon portoit
263. Bel & gent en toute maniere
264. Et qui estoit chief de Banniere,
265. Icel comme sage & expert
266. Conduisit tot l’ost comme apert.
267. Par un livre de Bannerie
268. Fait sans fraude & sans trufferie,
269. Ou estoit son bien & pouer
270. Pour plus seureté y trouver,
271. Ainsi comme la Seignorie
272. De Matignon sans genglerie
273. Qu’estoit moult haute Baronie
274. Appartenant à Bannerie,
275. Auquel pays art & démoli
276. Cuidoient bien ne trouver nully
277. Qui peut opposition mettre
278. A ce que vouloient outre mettre,
279. Qu’estoit sans crainte ni dangiers
280. Nettir Bretagne d’estrangiers.
281. Et pour ce tout le prime à terre
282. Fut o bande, sans plus enquerre,
283. Cil Gouyon, qui deça & là
284. Occisoit tout, sans dire hola,
285. Cette gent Normande & Danoise,
286. Qui tant leur avoit fait de noise.
287. Si advint qu’environ l’an neuf cent trente-six
288. En Bretagne Normans Danois furent occis
289. Par habitans du pays & gens de toute sorte
290. Après que passés mer furent sous Barbe-torte.
291. Ce nouvel Duc remist tous les Bannerets haut
292. Et leur donnit moyens & chevance que faut
293. Pour rebatir chastels & pour relever bandes,
294. Dont la plupart estoient à mort ou à debandes.
295. Chacun comme tantsa, usa de son octroy
296. Dont je ne me debats, ni ne m’en mets en émoy ;
297. Sinon de cil Gouyon pour qui j’ai fait ce livre,
298. Dont moult ai de regret que ne puis le poursuivre.
299. En lui donc finirai celle translation
300. Que pour lui seul je mets en compilation
301. D’un plus large traité touchant les Banneries
302. Qui de Bretagne sont les primes Baronnies.
303. Et est donc par ou ce beau livre
304. De Bannerets, sans plus en suivre,
305. Déclame de Bretagne & d’eux
306. Qu’ont esté grands & valeureux,
307. Et que pour défendre patrie
308. N’ont jamais refusé partie.
309. Et est ce beau livre en latin,
310. Que moy Prior de Saint Aubin
311. Jadis de la fondation
312. Des ayeux d’icelui Goyon,
313. Frater Guillelmus, dit l’Amant,
314. Ai translaté par le command
315. De Dame Jeanne de Bretagne
316. De Bertrand Gouyon la compagne ;
317. Et fut mil deux cent quatre vingt
318. Que de translater ce m’advint.
319. Mais pour ce que moult volontiers
320. Dire vouldroye en démentiers,
321. Que suis sur tant noble matiere,
322. De Gouyon suitte plus entiere,
323. Sçachent tant grands comme petits
324. Que les succedans & natifs
325. De tant nobles & preux personnages
326. N’ont pris, en leur race & lignages,
327. Dempuis autre nom que Gouyon,
328. Qui est tant noble & d’achoison,
329. Qu’encore aujourd’hui ceux qui vivent
330. Cette même volonté suivent.
331. Et est par ou finit ce livre,
332. Ou abbregé que je délivre
333. A celle Dame l’an susdit,
334. Ainsi comme dessus est dit,
335. Le septieme Juin. Et quand l’ame
336. De celle bonne & gente Dame
337. Yessira de son noble corps,
338. Jesus lui soit misericords. Amen.
339. Ce livre-ci fut fait & translaté jadis
340. Par un Moine, qui fut de bons propos & dits.
341. Aujourd’hui autre Moine en plus luisant langage
342. La mis de prose en vers, Dieu lui doint bon usage.
343. Et ce fut l’an que chacun sçait
344. Mil trois cent soixante & dix-sept,
345. A request d’autre Dame gente
346. A moult bien faire diligente ;
347. Plaise à elle agréer ce don,
348. Et à Dieu nous faire pardon.
[1] Mémoires pour servir de preuves à l’histoire ecclésiastique et civile de Bretagne, édités par Dom Hyacinthe Morice, tome III, Paris, 1746, col. 1761-1766.
[2] Arthur de La Borderie, Chronique de Bretagne de Jean de Saint-Paul, Nantes, 1881.
[3] Jean-Christophe Cassard, « Les Bretons tous félons ? 1364-1373 », dans Félonie, trahison et reniement au Moyen Âge, Montpellier, 1998, p. 571-598.
[4] Dom Morice dit avoir extrait son texte des Origines de quelques Coustumes anciennes & de plusieurs façons de parler triviales, recuillies par le Sieur de Brieux, & imprimées à Caen l’an 1672.
[5] Il est tout à fait exclu que cette Jeanne dite de Bretagne puisse être la fille de Jean Ier et de Blanche de Champagne ! S’il ne s’agit pas là d’une banale erreur de transcription, cette assertion traduirait à sa manière les prétentions infondées d’un lignage, pour alors encore subalterne, à cousiner avec la maison ducale...
[6] Sur cette abbaye, cinquième fondation cistercienne en Bretagne et fille de Bégard : André Dufief, Les Cisterciens en Bretagne. XIIe-XIIIe siècles, Rennes, 1997, p. 72-73.
[7] André-Yves Bourgès, « Archéologie du Mythe : hagiographie du bas Moyen Âge et origines fabuleuses de quelques lignages de la noblesse bretonne », dans Kreiz 4. Études sur la Bretagne et les pays celtiques, Brest, 1995, p. 5-28.
[8] Est-il utile de rappeler que le château de La Roche-Goyon des origines est aujourd’hui mieux connu sous le nom de Fort de la Latte ?
[9] André Dufief, Les Cisterciens..., op. cit., page 73 : le fondateur est probablement Geoffroi II Boterel, comte de Penthièvre (d’un ramage à peine cadet de la famille ducale).
[10] Jules Geslin de Bourgogne et Anatole de Barthélémy, Anciens évêchés de Bretagne, tome III, Saint-Brieuc/Paris, 1864, chartes de Saint-Aubin : n° XXXI, page 50 (donation en 1214 de la dîme de Plévenon par Étienne Goyon et son épouse Lucie), n° XXXVI, page 53 (fondation en 1219 de la chapellenie de Matignon par les mêmes), n° CLXXV, page 116 (l’abbé de Saint-Aubin figure parmi les exécuteurs testamentaires d’Alain Goyon en 1251), n° CCLXXII et CCLXXV, p. 157-160 (accord entre Denise, dame de Matignon, et l’abbaye), n° CCXCIX, p. 170-171 (affranchissement d’une rente par Alain Goion en 1284), etc. Guegon Goion est témoin d’un don à Saint-Aubin-des-Bois en 1139 : dom Morice, Preuves, tome I, col. 579.
[11] Tombeau mentionné sous le n° 155 dans le catalogue de Jean-Yves Copy, Art, Société et Politique au temps des ducs de Bretagne. Les gisants haut-bretons, Paris, 1986, page 269.
[12] Jean Kerhervé, « Aux origines d’un sentiment national. Les chroniqueurs bretons de la fin du Moyen Âge », Bulletin de la Société Archéologique du Finistère, tome CVIII, 1980, p. 165-206. Ces ouvrages en français perpétuent la tradition initiée par la Chronique de Saint-Brieuc, en latin, compilée vers 1400.
[13] Ce Rivallon paraît dans la Chronique de Saint-Brieuc sous les traits de Rivallon Meurmarzou, vainqueur des Frisons et des Goths, aux lieu et place des Normands Danois (vers 83), qui opprimèrent l’Armorique après la disparition du roi Conober : édition Gwénaël Le Duc et Claude Sterckx, Rennes, 1972, chapitre CIV, p. 226-231.
[14] Alain Rebre pour Rebrit, « roi breton » : ce qualificatif est en fait appliqué à Alain III (1008-1040).
[15] Hasting : nom d’un chef viking, qui aurait laissé son nom à l’une des tours de la cathédrale de Tréguier.
[16] Cet auteur a inclus dans sa Chronique des extraits d’annales angevines perdues, fort bien documentées sur les relations entre Bretons et Francs aux IXe-Xe siècles. Cette source provenant de la France de l’Ouest, ou des textes équivalents également disparus ont pu perpétuer dans le duché le souvenir de ces événements dramatiques.
[17] Jean-Christophe Cassard, « En marge des incursions vikings : Gurwant, Réginon et les autres », Bulletin de la Société Archéologique du Finistère, tome CXXXI, 2002, p. 437-441.
[18] Il s’agit en fait de son successeur Guillaume Longue-Épée, duc de Normandie, dont l’intervention fut déterminante pour écraser la révolte cornouaillaise de 931.
[19] La révolte cornouaillaise de 931 est rapportée par les Annales de Flodoard, édition Philippe Lauer, 1905, page 50 et par Hugues de Fleury, ibidem, page 214, qui mentionne la fuite d’Alain après son échec.
[20] La Chronique de Nantes (570-1049), édition René Merlet, Paris, 1896, chapitre XXIX, p. 87-91.
[21] Il ne se rencontre que quatre dates dans le Roman : 480 (vers 81) marque la première irruption des Normands Danois ; environ l’an 600 (vers 105), la fin des troubles intérieurs ; 842 (vers 135), l’émancipation de Nominoë ; 936 (vers 287), le retour d’Alain Barbetorte au pays de ses pères.
[22] Notamment les « Enquestes sur les Droits Royaux & anciens usages du pais de Bretagne » (de 1455), dans dom Morice, Preuves, tome II, col. 1651-1668.
[23] Jean-Christophe Cassard, « Le génocide originel. Armoricains et Bretons dans l’historiographie bretonne médiévale », Annales de Bretagne et des Pays de l’Ouest, tome 90/4, 1983, p. 415-427.
[24] Laurence Moal, « La construction d’un ennemi héréditaire : l’Anglo-saxon dans les chroniques bretonnes de la fin du Moyen Âge », Annales de Bretagne et des Pays de l’Ouest, tome 108/3, 2001, p. 35-56.
[25] D’abord vers l’an 480 (vers 81-88 et 93-96), puis au Xe siècle avec les péripéties marquant le règne d’Alain Barbetorte (vers 219-256).
[26] Dom Morice, Preuves, tome II, col. 201.
[27] Les deux fils aînés de Charles de Blois, Jean et Gui de Bretagne, sont pour encore retenus en Angleterre en gage de l’exact acquittement de sa rançon contractée après La Roche-Derrien (1347) selon les clauses afférentes à sa libération conditionnelle survenue en 1357.
[28] Raymond Cazelles, La société politique et la crise de la royauté sous Philippe VI de Valois, Paris, 1958, p. 140-141.
[29] BNF, ms. fçais 22338, f° 125.
[30] Dom Morice, Preuves, tome I, col. 1430-1431, et Michael Jones, Recueil des actes de Charles de Blois et Jeanne de Penthièvre, duc et duchesse de Bretagne (1341-1364) suivi des actes de Jeanne de Penthièvre (1364-1384), Rennes, 1996, n° 4, p. 56-57.
[31] Ibidem, n° 344, page 256 (à Lamballe, en date du 20 octobre 1377).
[32] Dom Morice, Preuves, tome I, col. 1461 : Étienne figure parmi les ambassadeurs accrédités en 1348 pour passer en Angleterre ; ibidem, col. 1508 : il raccompagne Charles en Angleterre le 7 août 1356 ; ibidem, col. 1516, et Michael Jones, Recueil des actes..., op. cit., n° 200, page 178 : il revient le 13 juillet 1357 sur le continent avec le duc.
[33] Dom Morice, Preuves, tome I, col. 1464, et Michael Jones, Recueil des actes..., op. cit., n° 109, page 115 (acte du 1er septembre 1348).
[34] Bertrand Gouyon aurait porté la bannière de Bertrand du Guesclin lors de sa victoire de Cocherel en 1364 : Pierre Levot, Biographie bretonne, tome I, page 827.
[35] Leurs notices dans Pol de Courcy, Le Combat de Trente Bretons contre Trente Anglais, Saint-Pol-de-Léon, 1857, p. 43-44. Dom Morice, Preuves, tome I, col. 1469 et 1472 : Louis Gouyon, écuyer, sert comme homme d’armes dans la compagnie de Jean de Beaumanoir en juin et octobre 1351 ; ibidem, col. 1471 et 1474 : montre de Jean Gouyon servant avec sept archers sous ses ordres en juillet 1351.
[36] Ibidem, tome I, col. 1656 : Olivier Gouyon figure alors dans la retenue de Jean de Beaumanoir devant la place assiégée.
[37] Ibid., tome II, col. 81 : Geoffroy, écuyer, dans une montre passée à Saint-Lô en Normandie en 1374 ; ibid., col. 101, 102 et 104 : Bertrand Gouyon, écuyer, dans la retenue d’Olivier de Clisson passée en montre à Vannes en 1375.
[38] Ibid., col. 215 et 217.
[39] Barthélémy Pocquet du Haut-Jussé, « La dernière phase de la vie de Bertrand du Guesclin : l’affaire de Bretagne », Bibliothèque de l’École des Chartes, tome CXXV, 1967, p. 142-189.
[40] Dom Morice, Preuves, tome II, col. 214 et 215.
[41] Ibidem, col. 218.
[42] Ibid., col. 228.
[43] Ibid., col. 236 et 237, et Michael Jones, Recueil des actes de Jean IV, duc de Bretagne, tome I, Rennes-Paris, 1980, n° 334, page 285.
[44] Dom Morice, Preuves, tome II, col. 274 et 302 pour Étienne, col. 277 pour Bertrand.
[45] Michael Jones, « L’amirauté et la défense des côtes de Bretagne à la fin du Moyen Âge », dans Défense des côtes et cartographie historique (124e Congrès national des Sociétés historiques et scientifiques, Nantes, 1999), Paris, 2001, p. 17-32, spécialement page 20.
[46] Michael Jones, La Bretagne ducale. Jean IV de Montfort (1364-1399) entre la France et l’Angleterre, Rennes, 1998.
[47] On songe notamment aux diverses ligues de noblesse surgies en 1314-15 dans le royaume de France après la mort de Philippe Le Bel : Marie-Thérèse Caron, Noblesse et pouvoir royal en France. XIIIe-XVIe siècles, Paris, 1994, p. 66-70.